Bien difficile à la vue d’un split black metal de ne pas se souvenir d’un disque historique de 1993, préliminaire à l’ascension de deux géants du metal. Alors, VLAD TEPES a-t-il la valeur d’EMPEROR, BELKETRE peut-il raisonnablement se comparer à ENSLAVED? Evidemment non. Si les deux formations norvégiennes ont commencé dans les bas-fonds, elles s’en sont vite extirpées grâce, certes, à leur talent, mais aussi à la médiatisation des aventures de quelques personnalités très turbulentes du royaume, particulièrement proches de ces deux groupes quand elles n’en firent pas tout simplement partie. VLAD TEPES et BELKETRE vécurent sans jamais voir la lumière du jour car, partisans d’un black underground inconnu des masses incultes, ils n’ont, à ma connaissance, jamais tenté de distribuer leur œuvre ailleurs que dans les cercles noirs les plus restreints.
Musicalement, si EMPEROR n’est pas aussi accessible que le brillantissime tatoué pré pubère révélé chez Popstar M-(athieu, ichel, axence, iniprout…?) Pokora qui vient, pour notre bonheur à tous, de sortir un nouveau single avec l’excrément portoricain Ricky Martin, si les apparitions radio d’ENSLAVED sur Nrj sont moins nombreuses que celles de l’expert libanais en immobilier K-(arim, amel, aliboulboul…?) Maro, dont l’inutilité de l’œuvre est à rapporter à la lucidité du personnage sur cette même œuvre, la rugosité de V-(lad) TEPES et BELKETRE est suffisante pour leur interdire une quelconque reconnaissance du grand public, même metal, dont ils n’ont jamais rêvé.

Wladimir’s march est une surprise. Surprise pour les curieux que l’absence de production pourrait légitimement rebuter, surprise pour les adeptes de sons extrêmes, peut-être étonnés d’entendre une introduction aussi mélodique dont la ligne de guitare et les schémas de batterie rappellent instantanément le grand GRAVELAND. Le deuxième titre fait preuve d’une toute autre vélocité, l’armée combat déjà, la tactique se veut grandiose. Mais VLAD TEPES montre vite que ses talents de stratège ne sont pas infinis. Car dès In holocaust to eternal darkness, la soldatesque se change en une escouade de chiffonniers au bellicisme amateur. Et la paupière se ferme peu à peu à la vue de ce champ de bataille brouillon et désordonné.

Les premières notes jouées par les membres de BELKETRE réveillent le tympan sans délicatesse. Cela grince comme rarement en black metal et l’oubli absolu des basses fréquences inflige à nos cellules cochléaires une épreuve recommandée par les audioprothésistes en mal de chiffre d’affaires. Si on lui enlève cette coquetterie, le groupe se démarque encore par un goût très prononcé pour les atmosphères cafardeuses, en attestent certains instrumentaux (le crépusculaire Hate et le découragé Despair) et la performance du vocaliste. L’alternance entre poussées fiévreuses et accalmies maléfiques étonne et séduit. L’univers de la formation de Bergerac intrigue.

Plus intéressante et surtout plus variée, la parole de BELKETRE se fend de quelques formules originales qui méritent d’y prêter un minimum d’attention. Mais le discours de VLAD TEPES qui ouvre malheureusement les débats est trop convenu pour faire de ce split un objet digne d’un total intérêt. Les acheteurs potentiels sont prévenus, encore faudrait-il qu’ils trouvent cette galette qui n’a jamais été que très faiblement distribuée.