Voici donc le premier album de SEVEROTH dont le talent certain parcourt les plaines d’Ukraine depuis ses tous débuts. L’histoire discographique de Illia Rafalskyi dévoile sans peine son amour pour l’Ambient, le Dungeon Synth et le Black Atmosphérique. "Winterfall" marie un peu tout cela sans aucune maladresse. Avant de déployer des ailes encore davantage prestigieuses, ce premier méfait nous annonce la couleur de ce qui suivra toujours l’entité SEVEROTH : plages hypnotiques et rêvasseuses des claviers, riffing racé et mélodies suprêmement entêtantes des guitares, voix torturée et embrumée en arrière-plan.

Je le conçois aisément, je trouve SEVEROTH passionnant. Le sens qu’a Illia à développer des ambiances suprêmement atmosphériques est assez magistral. C’est peut-être son identité slave coulant dans ses veines qui rend sa musique particulièrement belliqueuse et poétique à la fois. La rigueur, la rudesse et l’envoûtement paraissent s’allier pour créer de longs titres généreux en mystère et en mélancolie. Ils sont peut-être un peu trop longs pour certains, là est le défaut principal de ce premier album. Ces longueurs pourtant ne leur font pas perdre pour autant l’éclat majestueux et aveuglant qu’ils nous dressent. Car il y a tant d’émotions dans ces nappes sonores. Il y a tant d’espoirs et de peines dans ce riffing si efficace. Écoutons ensemble "III" et partons voler au-dessus des terres désolées en attente de jours meilleurs. Percevons les derniers râles des combattants pour la patrie, des sauveurs et protecteurs de la nation d’Ukraine. Sentons et ressentons la présence des anciens, leurs pouvoirs et leur héritage. Combattons ensemble par l’esprit la guigne et les tourments.

Très instrumental quelque part, en tous cas bien plus que les suivants, "Winterfall" s’anime bien plus lorsqu’il manie le riff et l’appaire avec ces claviers qui nous font vaciller dans un firmament sombre. La reprise de DARKTHRONE n’est point anecdotique mais sonne de manière très SUMMONING-ienne. Et le titre aux claviers qu’est "IV" nous ramène aux premiers amours de Illia pour le Dungeon Synth lorsqu’il l’explorait dans son projet musical dédié, GALDUR, en sommeil depuis quelques années. "Winterfall" en somme est un projet où l’on perçoit assez fortement l’influence de BURZUM. Il ravira les fans du genre en quête des émotions à jamais perdues de Varg Vikernes. Ce trait d’union avec le Norvégien s’exprime pleinement notamment dans les deux premiers titres de l’album : lugubrité des ambiances, mid-tempo hypnotique et écorchements vocaux.

Illia assoit déjà une volonté farouche d’enivrer l’auditeur et de l’embarquer à découvrir les paysages splendides des Carpathes ukrainiennes. Disque tout à la fois reposant et sombre, "Winterfall" n’en demeure pas moins un premier essai abouti et très intéressant. Sa pochette équivoque – dessinée par sa compagne qui est l’autrice de toutes les pochettes des albums de SEVEROTH – vous fera glisser à la bonne température à contempler les cristaux musicaux de Illia. Gardez en tête que cet album est déjà très beau (notamment le très réussi "III"), mais que la suite discographique est très souvent à couper le souffle. Ne badinez donc pas avec ce Black Atmosphérique de haute volée made in Ukrainia. Une pensée donc à Illia et à ses proches (il a deux enfants) et aux temps difficiles que traversent leur pays.