Nous faisons face tous deux à cette Nature qui se déplie sous nos yeux et nous avons peine, semble-t-il, à croire possible une telle ponctuation de couleurs, un tel déploiement de beauté. La neige pleut doucement sur tes joues et nous sommes en septembre. Tes lèvres sont exsangues et gagnées d’un froid saisissant, elles semblent comme se figer imperturbablement. Ton visage semble grave. Viendrais-tu d’embrasser la Mort ? Qu’as-tu donc pour ne plus avoir le désir de me répondre ? Ta respiration ample trahit ton désir de vie, qui donc es-tu devenu ?

Tu te meus en silence en te terrant dans un mutisme inquiétant, tu marches fixement vers cette forêt dense et majestueusement enneigée. Tes yeux sont grands ouverts et semblent mirer de manière charnelle une nature noirâtre qui émerge davantage devant eux. J’ai peine à te suivre mais je crois en toi et en ta destinée alors je continue avec toi cette marche, en reprenant tes pas qui, tour à tour, parfois, semblent s’effacer. Tu t’éloignes bien trop vite, attends-moi !

Ta tête s’incline, quand doucement s’élève des sapins une envolée de choucas et de corneilles. S’ébrouant en l’air, ils laissent retomber des nappes de flocons tendres que la nature happe et absorbe délicieusement. Tu sembles resplendir de ce spectacle et tes sombres pensées, "Dark Thoughts", étincellent en miroir les cristaux qui t’entourent. Entends-tu ces tintements sinistres résonner au loin, paraissant étreindre la nuit ? As-tu oublié d’où nous venons ? Ne souhaites-tu pas te retourner ? Revenir ?

Tu sembles oublier que nous sommes quelque chose et que nous pourrions être à nouveau dignes de recommencer, de vivre encore un peu, pleinement, sans fuir, sans heurter nos pensées profondes et nos rêves animés. Et toi pourtant tu éloignes inexorablement. Tu sembles comme flotter à quelques centimètres du sol, lévitant au-dessus d’une quelconque pesanteur. La nature s’immisce entre nous, elle reprend ses droits, elle me barre la route qui me ramènerait à toi. Ne sens-tu pas que je ne t’aperçois presque plus ? Cette forêt aurait-elle fondu en toi ? Je ne te distingue plus, où es-tu ? L’obscurité se presse, "When The Night Falls…", est-ce l’heure où je dois me résoudre ? En est-il fini de toi, de moi, de nous ?

Je te connais, ô sombre automne qui nous entoure, tu ne nous épargneras pas et dès que nous faiblirons tu nous dévoreras de l’intérieur. Tes projets funestes ne sont d’aucun secours et ta berceuse, "Winter Sang Her Lullaby", me renvoie à ma faible condition, à ma temporalité vacillante. Je te trouve si beau et si mortel à la fois. Est-ce donc toi qui l’as envoûtée de ton charme ? L’aurais-tu absorbée à ce point qu’elle ne puisse plus m’entendre ? Ta magnificence a sublimé ce chemin qui nous a séparés. Je reconnais ton talent, ta mélancolie brumeuse que ma peau absorbe, alors je te laisse maintenant me guider. Sois juste et intraitable, je gagnerai mon âme et, puisque tu l’as décidé, nourris-moi une dernière fois de la Nature pour qu’ensuite à mon tour je puisse la nourrir éternellement.

N. B. : Un amour de SEVEROTH ! Oui, je ne badine pas avec les mots mais je dois bien assumer mon excitation longue durée devant ce onemanband qui truste très haut dans mon cœur et que j’estime beaucoup. À l’instar d’un EVILFEAST à la discographie impeccable, celle de SEVEROTH me déroute à chaque écoute et me permet de quitter rapidement la pesanteur terrestre pour fondre pied en avant, yeux bandés dans la majesté de ce Black Atmosphérique sublime dès les premières notes engagées. SEVEROTH ne trompe pas la rêverie, il l’engage intensément !

Note réelle : 3,5/5.