Ukrainien, SEVEROTH l’est dans l’âme et le sang. Et l’Ukraine est cette terre remplie de sang et de trahisons, dont elle porte et portera sans doute toujours et encore les stigmates et les amertumes. Connaissez-vous l’Holodomor ? L’holocauste ukrainien, l’histoire de cette grande famine de 1932-1933 orchestré par les Soviétiques qui a fait, selon les estimations des historiens, entre 2,6 et 5 millions de morts… Savez-vous que la langue ukrainienne a été interdite plus de trente fois au cours de son histoire au profit du Russe qui s’est largement implanté à force au sein de la population ? Pourquoi donc pensez-vous que la haine anime certains hommes ? Pourquoi cette haine ne pourrait-elle pas s’exprimer au travers de la musique la plus belliqueuse qui soit ?

Mais SEVEROTH a décidé d’honorer sa fierté d’être et de calmer son agitation psychique en sublimant ses émotions au travers d’un Black Metal atmosphérique de haute volée. Et c’est ce que l’on ressent fortement depuis les débuts de sa discographie toujours empreinte d’une préciosité mélodique hautement émotionnelle et exacerbée notamment depuis les deux derniers albums que sont "When The Night Falls" (chroniqué en ces lieux), et "Vsesvit" (qui suivra selon toute logique…). Ce nouvel album, s’il n’est pas différent sur ce point, emprunte des consonances plus délicates et variées. Notons par exemple que des nappes d’Ambient teintées de cliquetis électroniques qu’un clavier habile orchestre épouse à merveille le titre "Sons Of Steel Will", mais aussi introduisent la majestuosité du titre d'ouverture "Sunrise Will Come". Des effets sonores symphoniques se font nettement pressentir au sein de "And Winter In My Heart…", tandis que SEVEROTH manie davantage de chant clair avantageant à nouveau l’expression d’une palette d’émotions mélancoliques.

Les leads sont toujours la pierre angulaire des embardées mélodiques de SEVEROTH mais les claviers se font aussi plus présents . Ils tissent - à la manière de MIDNIGHT FOREST – des architectures sonores comme autant de chapitres, et soutiennent tout autant les envolées des riffs que la beauté des textes de SEVEROTH. Car il s’agit d’un album impressionniste habitée par la Nature et la puissance des éléments. L’éther d’ajouts plus Post-Black Metal paraît se joindre aux observations hivernales de "And Winter In My Heart…", à moins que ce ne soit la lumière miroitante et chatoyante d’un Black Metal triste et empli d’espoir. Ainsi "By The Way Of Light" pourrait me faire penser à LUSTRE, avec son jeu BURZUMien de mélodies plus lumineuses que lugubres. Mais la comparaison s’arrête là. J’aurai aimé dire aussi que SEVEROTH ressemble étrangement à Neige de ALCEST (et pas que physiquement), et je pressens que notre cher Ukrainien explore avec ce nouvel album de nouvelles directions. Du reste en écoutant la piste instrumentale "Frozen Moment" qui conclue l’album, je remarque que ces boucles sonores sont aussi l’expression d’un voyage onirique sous le scintillement des étoiles et le hululement de rapaces nocturnes. Mais qu’il y a bien quelque chose paraissant s’extirper de cette forêt dense et sauvage qui a tant inspiré SEVEROTH sur ces anciens albums. Quelque chose se trame et semble vouloir sortir de cette douce mélancolie terrestre. L’avenir nous le dira… Peut-être.

"By The Way Of Light" est un album qui demande du temps. Bien mieux produit que les précédents, SEVEROTH diversifie sa dimension atmosphérique mais intensifie sa teneur mélodique notamment au travers des leads qui ont fait sa singularité d’écoute et d’ambiances. Je reste un tant soit peu sur ma faim mais j’imagine aussi qu’il s’agit peut-être là d’un album charnière. J’avais espéré aussi plus de mélodies entêtantes de prime abord mais à la faveur de réécoutes, ces dernières s’installent progressivement dans mon cerveau (comme pour le titre "To The Stars!"). Mention spéciale au premier titre qui est juste superbe. Un beau retour après quatre années de disette. SEVEROTH est plus que jamais une entité qui sait faire resplendir avec mélancolie et beauté un Black Metal Atmosphérique puissant et mélodique. Sa pochette mystérieuse et splendide n’est que l’exact miroir d’un contenu musical à découvrir.

Note réelle : 3,5/5.