Amis lecteurs, il faut que je vous parle de FOR I AM KING pour que vous puissiez faire connaissance sonore avec Alma Alizadeh et ses sbires. Vous ne serez pas déçus, je vous assure, pour peu que vous ayez un léger penchant extrême, ou tout au moins, pas une aversion vis-à-vis des vocalises arrachées, du genre qui donnent envie d’offrir une boîte de Strepsil à la personne qui se tient derrière le micro. Car pour le reste, le niveau de violence est parfaitement acceptable pour le commun des métalleux.

Ma porte d’entrée dans cet univers sans concession a été l’immense Mikael Stanne (DARK TRANQUILLITY, The HALO EFFECT, GRAND CADAVER et maintenant CEMETARY SKYLINE, mais qu’on lui file un Lexomil, bordel !). Parvenant à procurer des émotions malgré une instinctive illisibilité des textes et des mélodies, j’ai plongé à pieds joints dans cet univers à la fois mélodique et tellement agressif. Et je puis vous avouer qu’il n’y a pas réellement de chemin de retour ("no way back, man", aurait dit Sly dans "Expendables 8"), tant l’intensité de l’expérience ne trouve que peu d’équivalents dans un monde plus « conventionnel ». Faites donc bien attention à ce que vous faites, car FOR I AM KING pourrait être votre porte d’entrée à vous. Ils officient d’ailleurs dans un registre relativement similaire aux parrains du Melodeath made in Göteborg, période "Haven", ce qui tombe plutôt bien car ce n’est rien de moins que mon album favori de la formation.

Voici donc "I", qui n’est pas du tout le premier disque des Néerlandais contrairement à ce que l’on pourrait penser, mais plutôt le second. Ouate, comment se fait-ce, qui, quand, autant de réponse que je ne saurais vous livrer, n’épiloguons donc pas sur le pourquoi du comment. Il s’appelle "I", et puis c’est tout. Faisant suite à un "Daemons" ultra-prometteur, j’émettais à l’époque deux réserves. Primo, la voix de la belle Alma manquait quelque peu de maîtrise sur certains passages, malgré cette capacité déjà à toucher sa cible. Secundo, l’ensemble s’avérait un chouïa homogène, les compositions souffrant quelque peu d’une carence en variété, en aspérités, en lignes mélodiques. L’opus avait beau s’avérer très solide, il n’était pas totalement abouti. À mon sens, ces défauts sont globalement corrigés sur son successeur, à mon grand plaisir.

Plus nuancé, moins monolithique, ce second LP saura satisfaire nombre d’amateurs de Death Mélodique, tant il regorge d’envie, de pépites, d’harmonies dans la plus pure tradition du genre. Jaap Relou, cogneur en chef, a clairement élevé son niveau de jeu, apportant bien plus de variations sur un titre que sur l’ensemble de "Daemons". Et comme le duo de guitaristes tient ses promesses, il n’y a pas grand-chose à redire musicalement sur la performance de FOR I AM KING, efficace en tout point. "Forever Blind" offre un bel aperçu de ce que le combo sait nous offrir : des leads entêtants, un riff presque Heavy par certains aspects, dans une construction plutôt classique, donc aisément mémorisable. On croiserait entendre du ARCH ENEMY, clairement… En plus inspiré (en tout cas si je m’en réfère à ces derniers temps).

Mais résumer les Bataves à un sous-clone d’Amott et sa clique ne serait pas leur rendre justice. Car Alma a progressé, et franchement. Elle varie beaucoup plus ses intentions, growle parfois ("Misery" et ses ambiances chiadées en est un exemple flagrant), apportant bien plus de variations que deux ans auparavant (non, mais ces cris de succube échappée des enfers sur "In Flames" sont dignes d'ORANSSI PAZUZU). Les émotions qu’elle parvient à transmettre sont ainsi mises en avant, d’autant qu’elle s’avère relativement intelligible en ce qui concerne les paroles, talent qu’elle partage donc avec le Maestro Stanne.

L'agencement de la tracklist est assez exemplaire par ailleurs, organisant les pistes avec intelligence, alternant brutalité et titres plus posés, d’autant que FOR I AM KING sait enrichir sa musique d’éléments symphoniques dosés avec élégance, ou de passages brise-nuque en mode Metalcore-nervous-breakdown. Les quarante minutes passent donc beaucoup trop vite, gage de qualité s’il en est. Ni trop bourrin, ni trop cheezy, le groupe trouve ici un bel équilibre, à défaut d’une profonde originalité.

Car après tous ces compliments, il convient de reconnaître qu’au-delà du charisme de sa chanteuse, "I" n’apportera pas de parpaing personnalisé à l’édifice érigé en icône de la scène Scandinave des années 90. D’une redoutable efficacité, il se contente de dépoussiérer les glorieux anciens, en modernisant leur son, y adjuvant des touches contemporaines qui ne sont pas pour me déplaire.

Relativement méconnus à ce jour encore si je m’en fie aux statistiques de ma plateforme favorite, je ne puis, à mon humble échelette, que contribuer à tenter de changer le cours de l’histoire, et offrir à FOR I AM KING quelques auditeurs supplémentaires. Ils le méritent. "I" est un très bon album. Ça joue, ça tape, ça crie, ça touche, c’est mélodique : c’est bieng ! Et mieux vaut que cela soit consigné dans notre sombre registre maléfique pour les siècles des siècles (Amen).