L’occasion du premier passage sur scène de VEXED en nos vertes contrées en ouverture de CARNIFEX était trop belle pour que je n’en profite pas pour vous relater les promesses liées à son inaugural LP, "Culling Culture", paru en 2021 déjà. Que le temps passe vite… Encore sonné par l’impact de "Negative Energy", l’un des tous meilleurs albums de 2023, il m’a fallu un petit délai pour correctement appréhender son essai séminal, tant celui-ci évolue clairement un cran en dessous de son vorace successeur. Avec le recul qui sied à tout bon scribouillard de mon espèce, je dois reconnaître que la déception initiale fait peu à peu place à une clémence bienveillante.

Il a néanmoins fallu passer par là afin de déceler l’origine du mal et essayer de comprendre comment Megan Targett et sa bande en sont arrivés à un point aussi nihiliste et misanthrope deux ans plus tard. Point de grosse surprise à attendre, les germes de la haine étaient déjà écrits en caractère 60, et pas en filigrane.

Proposant déjà ce mélange de Deathcore sauvage, trituré dans tous les sens au travers d’arrangements électroniques pesant au moins 10 tonnes, le groupe sait s’aventurer sur des traverses Djenty à l’occasion, sans pour autant renier sa trve nature. Les guitares à huit cordes de Jay Bacon sont probablement détunées six tons en dessous du standard (au bas mot…). Visuellement, on dirait des harpes, mais je vous assure qu’auditivement, on évolue plutôt dans un registre destructeur, loin des oiseaux et des fleurs.

Et comme la section basse-batterie est à l’avenant, l’ensemble offre ainsi une piste de décollage cinq étoiles pour les hurlements ou le chant clair de Megan, qui en impose sérieusement dans le registre extrême : aurait-on trouvé le Will Ramos (LORNA SHORE) féminin ? Elle s’avère d’ailleurs bien plus à l’aise sur ses cris et ses growls que sur sa voix poppy qui n’est pas sans évoquer Gwen Stefani (NO DOUBT), mais manque quelque peu de coffre, pour ne pas dire d’intérêt. Malheureusement pour nous, elle a d’ailleurs tendance à en abuser légèrement sur ce coup-là, de façon bien plus marquée que sur "Negative Energy".

Les premières écoutes s’avèrent relativement déconcertantes, passant sans crier gare d’une sincère violence à des passages bien fades, caricaturant presque les schémas classiques du Metalcore tant honnis. Heureusement, les mélodies touchées à ces occasions sont tout sauf mièvres ou classiques et ne cherchent pas à reproduire des motifs entendus mille fois ou sentant la guimauve, mais elles ne présentent aucune accroche réelle, tant on en vient à se demander : « mais pourquoi donc ? ». Cette voix s’avère donc bien inutile au final, d’autant qu’elle ne présente aucune aspérité particulière.

Car c’est bien dans la castagne et la rage que VEXED brille de mille feux. Rythmiquement parlant irréprochables, les Britanniques ont également l’élégance de parsemer de milles leads et effets leur musique, jamais de façon futile, construisant ainsi un mur de son aussi impénétrable que subtil, quand bien même, là aussi, la production se révèle un chouya moins puissante et aboutie que sur son vénéré successeur. Je reste assez admiratif du travail de Jay Bacon dans son approche artistique, bien plus créatif et complète que nombre de gratteux évoluant sur ce créneau. Initialement dubitatif quant à sa capacité de reproduire ces effets en concert, je ne peux maintenant que confirmer que le bougre s’en tire parfaitement bien, restituant à merveille ses parties en live.

Les compositions en revanche semblent peu maitrisées, évoluant en permanence le cul entre deux chaises, hésitant entre baston et émotions, comme si trop d’envies antinomiques avaient été couchées sur ce disque inaugural, sans grande cohérence ni réflexion. Instinctif, "Culling Culture" l’est sans doute. Il possède les défauts qu’on est en droit d’attendre d’un premier jet, qui représente presque une esquisse de l’œuvre à venir. Si certains parviennent à concentrer leur talent du premier coup, ce n’est clairement pas le cas de VEXED, malheureusement. À contrario, parmi ces génies instinctifs, nombre sont ceux qui auront tout donné d’emblée et se seront ramassés par la suite (RAGE AGAINST THE MACHINE, GUNS N’ ROSES,…).

VEXED saura pour le coup apprendre de ses erreurs pour nous pondre "Negative Energy" et entamer une pente ascendante des plus prometteuses, quand bien même "Culling Culture" ne fera jamais honte à la discographie au point de l’occulter totalement (n’est-ce-pas, PANTERA ?).

Note réelle : 2,5/5.