Peu de choses sont connues de ce groupe allemand, les ex-membres ayant été assez peu loquaces dans une quelconque once de promotion. Et pourtant ! Derrière ce disque inconnu se cache un petit joyau bien trop enfoui ou bien trop vite enterré. En reprenant un peu les oubliés de 1997, je retrouve d’autres groupes non dénués de talent et qui pourraient partager cette étrangeté novatrice que ARATHORN a instillé dans ce "Niemals Kroenender Als Was Einst War". Nommons par exemple l’épique forestier à la flûte enchanteresse NEBULAR MOON avec "Mourning", le mélodico-symphonique NOCTES et son "Pandemonic Requiem" cuistre, l’ovni inclassable "Battle Furies" de EWIGKEIT, le sombre "Loreia" de SIEBENBÜRGEN, l’étoilé magnifique "Ode To The Nighsky" de MUNDANUS IMPERIUM, ou bien encore le givre furieux de "I Det Glimrande Mörkrets Djup" de SORHIN, le vampirique "The Grand Psychotic Castle" de TARTAROS, le moyenâgeux Wallachia de… WALLACHIA, le magnétique "Dionysos" de LUX OCCULTA. Je vais m’arrêter là pour vous éviter une quelconque indigestion/aversion de lire davantage sur le groupe qui a initié cette chronique et cet inventaire.

Tous pourtant ont en commun d’avoir eu ce génie, cette adresse musicale de saisir au vol leur propre inspiration de compositions et de développer de véritables motifs. ARATHORN aura donc ce mérite de nous avoir proposé un Black Metal suavement symphonique et épique, bariolé d’un mid-tempo étourdissant où des vociférations s’échappent pour conter de manière épique les chemins d’hiver et les légendes d’antan. Les claviers occupent une place centrale et servent de fil conducteur aux ambiances moyenâgeuses et Folk, distançant l’agressivité de la mécanique Black Metal. Certains auditeurs pourraient se contrarier de la longueur des titres mais ils feraient fi pourtant de cette langueur nécessaire pour entreprendre la véritable immersion que ce "Niemals Kroenender Als Was Einst War" demande. Longtemps je suis resté envahi par la torpeur du duo formé par les claviers et l’accordéon de "O Ultima Privire Asupra Luptei Din Tinuturile Transivaniei", tant l’envoutement prend forme au fur et à mesure que les couplets se répètent, et que se déclinent les hurlements féconds et les jeux vocaux de A.K. Quelque chose fonctionne dans ce titre original, à la maladresse perceptible mais ô combien hypnotique, et ce quelque chose je l’ai rarement entendu ou du moins d’une autre manière chez "Hin-Fort" de TRIST ou les captations mystiques et ensorcelées de FOREST SILENCE.

À l’image de cette pochette, ARATHORN imprègne la musique de son album avec des reliques du passé. Faisant infuser et baigner son univers dans une eau teintée de Black Metal, son aspect épique et païen ressort avec évidence. Au plus dynamique des titres "Die Inthronisation (Der Koenig Erwartet Euch)" répond le calme folklorique de "Die Hymne des Winters Zorn", où s’égayent notamment une guitare acoustique et une flûte qu’un chant clair accompagne. Les guitares sur l’ensemble de "Niemals Kroenender Als Was Einst War" mixées en arrière-plan, forment comme un givre qui galvanise les notes symphoniques de l’album. La batterie - quasi doomesque parfois - paraît aussi maintenir du mieux qu’elle peut cette dynamique, là où la basse semble bien trop peu audible.

ARATHORN est allemand, et à l’instar d’un MENHIR, la nostalgie, la mélancolie d’un temps perdu et sa reconquête animent brillamment l’album. Depuis 1997, ARATHORN n’aura produit qu’un autre album sorti onze années plus tard, "Treue & Verrat", et ce dernier enterrera définitivement le projet tout près des ruines enneigées d’un château perdu d’une campagne sans fin. ARATHORN ne pouvait pas rêver meilleure destinée pour survive et laisser trace, là-bas, quelque part, où règne la Nature. À découvrir !

Note réelle : 3,5/5.