BETRAYING THE MARTYRS

"Voilà, c'est fini, ne sois jamais amère, reste toujours sincère, t'as eu c'que t'as voulu, même si t'as pas voulu c'que t'as eu". L’ami Jean-Louis AUBERT n’a pas toujours écrit que du Verlaine (je ne parle pas de Tom, calmez-vous), mais en l’occurrence, il n’avait peut-être pas totalement tort. À peine entamée ma remontada de la discographie des Frenchies de BETRAYING THE MARTYRS que le clap de fin tombe brutalement, sans avertissement, après pourtant une tournée Hellfest Warm-Up qui avait drainé un nouveau public pour ces gaillards, sans doute véritablement plus reconnus en dehors de leurs frontières que chez eux. Leur envie alors, il y a un an à peine, était pourtant bien réelle et communicative.

Souffrant d’un manque de succès réel, voilà donc l’un des pionniers du Deathcore Sympho made in France qui jette l’éponge, fatigué des tournées non rentables de l’ère post-covid, à la peine depuis le départ d’Aaron Matts (qui a récemment formé TEN56.) et en pleine déconfiture interne. C’est donc le générique d’une conclusion un peu triste qui nous est livré en guise d’adieu, de testament. Deux pistes pour sécher ses larmes, se dire que c’était quand même bien avant, pour ressasser ces difficultés actuelles pour nombre de formations, a fortiori lorsqu’elles évoluent dans la niche extrême. Couché, Médor…

L’instrumental "Irae", la colère, ouvre le bal, lente, lourde, processive, dans un registre fatalement plus sombre qu’à l’accoutumée. Un clavier qui officie comme une bande-originale d’un thriller à la Fincher, des sombres cordes anxiogènes et mélodiques, des déflagrations ponctuelles rageuses, de celles qui illustrent la frustration et l’incompréhension d’un monde qui ne ressemble plus à celui qu’ils avaient attaqués bille en tête, quinze ans auparavant, l’enthousiasme juvénile en étendard. Le morceau est une sincère réussite, émouvante au possible, et sert de hors-d’œuvre au plat de résistance, "The Veil" (le voile), dernière chanson donc composée par Victor Guillet et sa bande.

Fortement teinté d’arrangements électroniques, à la limite entre le Deathcore et l’Indus, "The Veil" enfonce le clou et ça fait mal. Plus posé et soucieux de ne pas trop en mettre (le petit pêché mignon du combo), BETRAYING THE MARTYRS monte d’un cran en intensité, laissant d’immenses regrets liés à un potentiel pas totalement exploité au long des quatre LPs et deux EPs qu’ils ont sortis. Ce titre n’est pas exempt totalement du même syndrome, tant il manque encore un petit quelque-chose pour réellement toucher l’âme, ce supplément de magie difficile à décrire avec des mots. Les ingrédients étant pourtant eux bien présents.

"Godspeed", ou "bon voyage" de par chez nous. C’est tout le mal que l’on souhaite à une formation attachante, qui aura su effectuer un parcours plus que respectable dans un registre hautement casse-gueule. En espérant retrouver certains des membres dans d’autres aventures, une fois l’amer goût d’une fin en eau de boudin dissipé.

Note réelle : 3,5/5, rendez-vous donc prochainement pour le reste de la discographie à titre posthume sur ces pages. C’est la moindre des choses que NIME doit à BETRAYING THE MARTYRS.