« Imagine une musique officiant au croisement des univers de MASTODON et de GOJIRA, dont personne n’aurait entendu parler, qui se cacherait au fin fond des hautes terres d’Écosse… »
« Naaann, J’déconne... »
« Mais Imagine quand même… »

Constitué sur les vertes plaines de Sir William Wallace en 2016, à Édimbourg plus exactement, IRON ALTAR devrait, espérons-le, connaître un autre destin à défaut d’entrer dans la légende. Mais sait-on jamais, tant ce premier essai est porteur d’espoirs. Là où certains d’entre nous pleurent la disparition des aspérités les plus extrêmes des Géorgiens (US) et des Landais au profit d’ambitions plus nobles et accessibles, voilà un groupe qui ne rechigne pas à la tâche et qui assume pleinement, tout en sachant montrer par moments une sophistication fort appréciable.

Œuvrant donc largement dans le Death à tendance Proggy, les Britanniques ne se montrent pas avares en circonvolutions, versant parfois à la limite de penchants Doomesques voire Sludge, des plus savoureux. On notera également quelques petites touches d’un Groove que les Virginiens de LAMB OF GOD ne renieraient certainement pas. Voilà pour ce qui est des références, et avouons-le, il en existe de bien pires. Du coup, la question se pose : comment tel pédigrée est-il resté aussi confidentiel, alors que "Pillars Of Blood" est sorti depuis 2018 ?

Ma foi, étant moi-même totalement passé à côté de la formation au cours de ces cinq dernières années, je me garderais bien de prétendre apporter une réponse définitive. Artwork raté, à l’image d’un nom somme toute relativement éculé, pour ne pas dire banal ? Tout juste essaierai-je d’apporter mon écot avec ces quelques lignes afin de corriger les absurdités de l’Histoire, et tenter par là-même d’apporter une forme de réparation, alors que s’annonce déjà "Promethean", prévu pour cet automne. Gageons que je ne manquerai pas de vous en donner des nouvelles, faites-moi confiance.

En attendant, c’est "Pillars Of Blood" qui nous intéresse ici, et il mérite franchement que l’on se pose deux minutes dessus, et plus si affinités. Pour commencer, disons que l’univers du Metal vit ou périt par le Saint Riff. C’est comme cela, je ne suis pas l’instigateur des règles. Et ça tombe plutôt bien, les guillerettes fées de la guitare s’étant proprement vautrées dans le berceau d’IRON ALTAR. L’album en est littéralement gavé, dans un registre inspiré qui plus est. Là où le "Omens" de Randy Blythe et sa bande m’avait consterné par sa fadeur, Daniel Drever et Neil Mathers s’en donnent à cœur-joie tout au long des cinquante minutes que dure la galette. Rien que "Small Gods" en enchaîne 4 ou 5 sans coup férir, chacun plus abouti que tous ceux présents sur le dernier effort de LAMB OF GOD. Ce titre possède de surcroît les progressions assez typiques de GOJIRA, chant estampillé Duplantier inclus, ce qui ne gâche rien, bien au contraire.

Généreux, IRON ALTAR l’est incontestablement dans la diversité. Sachant se montrer limite Punk, voire Thrashisant par instant ("Lost Insignificance"), le combo balaie tout un panel de sons extrêmes au sein d’un même titre, parvenant à trouver un point d’équilibre qui sonne naturel, là où tant d’autres se forcent dans un exercice de démonstration aussi immature que futile. La lente et conclusive procession de "Echo Chambers" devrait ainsi parvenir à séduire les amateurs de pesanteur, ponctuellement transpercée par quelques leads bien stylés. Quand on réalise que l’ultime piste répond finalement à l’introduction du disque, on ne peut que reconnaître l’intelligence de la construction de "Pillars Of Blood", abouti de bout en bout.

Pour tenter de trouver des explications quant au relatif anonymat des Écossais, il faut à mon sens se pencher sur une relative carence en mélodicité. Rythmiquement parlant, IRON ALTAR est franchement emballant, le haut du panier... Si le chant d’Andrew Callis peut manquer d’un brin de personnalité et de profondeur, trop souvent noyé dans la reverbe, il fait le job malgré tout. Non, ce qui fait défaut ici, c’est plutôt l’absence d’accroche, d’harmonies entêtantes, de passages à siffloter sous la douche. Les soli ne sont pas en cause, mais plutôt les lignes musicales dans leur ensemble, guère mémorables. C’est sans doute ce qui fait la différence avec les références mondiales auxquelles ils ont visiblement été biberonnés, qui savent, elles, allier la puissance de l’enclume avec une délicatesse plus grisante. Ce n’est pas la fin du monde, certes, mais c’est peu et beaucoup à la fois.

Cela n’empêchera aucunement les amateurs de prendre un grand plaisir à l’écoute de "Pillars Of Blood", qui se consomme sans modération, l’opus se dévoilant au fur et à mesure des écoutes, incontestablement un gage de qualité. Les colosses ayant déserté les rives de la violence pour d’autres horizons, une couronne est à saisir, et, voyez-vous, je miserais bien quelques piécettes sur IRON ALTAR pour se frayer un chemin auprès des aficionados de monstres gigantesques. Après un Kaijū ou un mythe fantasmagorique, il y a désormais une place libre pour une autre créature légendaire issue des brumeux lacs Gaéliques.

Note réelle : un véritable 3,5/5, à suivre de très près, tant j'aurais aussi bien pu arrondir à la hausse.