Un beau dimanche d'avril, je feuilletais l'ouvrage "Vikings" proposé par le YouTubeur Nota Bene, livre de vulgarisation sur les scandinaves au moyen-âge et le phénomène viking. Je tombai sur les dernières pages dédiées au thème des Vikings dans la culture contemporaine, excité à l'idée d'y trouver une petite bafouille éventuelle sur l'impact de l'imaginaire Viking dans le Metal, et un peu plus si affinités.
Mais ces affinités ne furent point au rendez-vous. Venant d'un type donnant tout de même l'impression d'un geek et metalleux accompli, aucune bafouille sur le Viking Metal en tant que tel, outre une ligne de commentaire fugace sur une pochette d'album d'AMON AMARTH.

Il faut croire que ce sous-genre (ou cette scène, appelez ça comme vous voulez) aura été davantage un épiphénomène, comme bien peu de groupes aujourd'hui ne s'en revendiquent, que peu de formations historiques demeurent en activité, voire que certaines se sont tournées vers des horizons plus éclectiques (ENSLAVED fait du Prog, EINHERJER du Black'N'Roll, amen). Alors certes, on trouve encore des exceptions,comme SKÁLMÖLD, toujours au poste, ou des percées plus traditionnellement Black comme l'incroyable "Eventide" de The FLIGHT OF SLEIPNIR.

Et comme par défi, je me lançai de nouveau à la conquête d'un nouvel album de véritable Viking Metal à me mettre sous la dent, et la Suède était une évidente destination.

EREB ALTOR, dans un petit coin de l'univers Doom, a su garder une réelle constance dans son attachement au genre. Le pendant païen et héroïque d'un ISOLE plus funèbre, les Suédois gardent sur l'autel un portrait de Quorthon, et si leur formule a eu le temps de prendre du muscle (frôlant dangereusement la gonflette), il semble qu'à chaque nouvelle sortie, l'aura du père fondateur est palpable. Il ne faudrait qu'un "Alvablot" monumental pour s'en assurer, tout comme il suffisait d'un "Midsommarblot" dans le solide "Nattramn", dernier album du groupe qui avait retenu mon attention.

Entre ces deux titres mentionnés, il y avait une suite d'albums baignant dans des tempos plus soutenus et une allure agressive peu aguicheuse pour mes oreilles, et surtout un peu trop inégaux et brouillons pour générer un récit cohérent. Et c'est bien cela que "Vargtimman" a en plus : des riffs porteurs et des refrains systématiquement accrocheurs, des longueurs en moins, et surtout uniquement des titres baignant dans ce mid-tempo entre Heavy Doom guerroyant et Black orageux, atmosphérique à souhait tout en gardant une emphase forte sur les guitares. Le groupe se resserre de nouveau sur un Viking Metal proche de BATHORY et FALKENBACH, à une accélération sur le AMON AMARTHien "Rise Of The Destroyer" près (qui se rattrape par un refrain poing en l'air).
EREB ALTOR garde le cap et la juste mesure, c'est le calme qui porte ses tempêtes, mais plus encore, chaque inflexion de Mats ajoute à un récit fait de tumultes émotionnels. Entre déclamations, plaintes et hurlements, il évoque tantôt celui qui incante les Dieux ("I Have The Sky"), prend les armes ("Vargtimman") ou refuse de les lâcher (ce final de l'excellent "Heimdals Horn"). Il y a parfois comme ça quelques piqûres de rappel nécessaires : le Viking Metal vit principalement par ce sens du drame, cette nostalgie grandiose, et la maîtrise du chant est bien souvent la clé. Rares sont encore les groupes attachés à ces "choeurs viking", dont l'utilisation s'estompe à mesure que le nom de ses héros s'efface.

Ce sens du drame jamais excessif est supporté par des guitares rompues à l'exercice d'harmonies de riffs (parfois très "Sogna Metal") ou de battements martiaux attendus mais efficaces, quelques claviers discrets mais soulignants intelligemment les atmosphères, et de vrais moments de tension plus Black Metal, comme l'incantatoire "Den Dighra Döden", proche du THYRFING de "Vansennisvisor".

Il faut croire qu'à ce niveau il ne m'en faut pas énormément plus pour hautement saluer l'effort : le sentiment d'une solidité à toute épreuve, de quelque chose qui tient à la fois de l'apport moderne et de l'hommage. EREB ALTOR ravive la flamme, ce qui est aujourd'hui tout à fait suffisant à mon bonheur.