Ce cher Abbath. L’homme est une vraie caricature en soi. Une personne qui ne se prend pas toujours au sérieux et qui est d’une instabilité constante depuis son départ du groupe qu’il avait lui-même créé en compagnie de son "frère", Demonaz. Étant donné que l’un est indissociable de l’autre, un petit retour des faits s’impose.

Après l’enregistrement et la tournée supportant "All Shall Fall", le trio formé de Abbath, Demonaz et Horgh retourne dans les studios pour préparer la suite. C’est à ce moment que tout tourne au vinaigre. Selon les versions, les raisons sont différentes. Selon Abbath, Demonaz aurait tenté de reprendre une main-mise plus grande sur l’élaboration de la galette, et aurait même été jusqu’à déménager tout le matos du groupe en compagnie d’Horgh. Selon la version du duo, Abbath n’avait plus grand intérêt musical, et était beaucoup plus intéressé à se plonger tête première dans l’alcool. Demonaz aurait donc commencé à être de plus en plus impliqué dans le processus créatif. Après avoir attendu que le principal intéressé règle ses problèmes de boisson, le duo en aurait eu assez et aurait simplement foutu le camp.

Bon, à partir de là, une bataille juridique s’ensuit pour récupérer le nom du groupe. Légalement, Demonaz remporte finalement les droits. Mais cela n’arrête pas Abbath qui monte son propre groupe avec son propre nom et sort un album très rapidement.

Deux galettes plus tard et un changement de line-up plus nombreux que les pellicules sur le cuir chevelu de l’idiot du village, Abbath se retrouve en concert en Argentine, à Buenos Aires en 2019. Après plus de deux heures de délai, il monte sur scène, mais est visiblement en état d’ébriété avancé. Après des faux-départs et des fausses notes répétées, le panda tire sa guitare et quitte la scène, escorté par la sécurité. S’ensuit alors un mécontentement bien compréhensible de la part de la foule. Finalement, le constat est lancé : Abbath annule le restant de sa tournée sud-américaine pour aller en cure de réhabilitation.

Une fois sorti, il reçoit un message de Horgh le félicitant de se prendre en main. C’est alors que tous les espoirs sont permis pour votre humble serviteur : celles de revoir Abbath revenir au bercail. IMMORTAL allait enfin pouvoir revenir au trio principal et faire de la vraie musique. Car, faut-il le dire, IMMORTAL sans Abbath n’est pas vraiment IMMORTAL. Il manque ce petit quelque chose de plus Heavy. De même, Abbath sans Demonaz dérive vers du Heavy/Black sans grand génie.

Mais voilà, comme toute bonne télé-réalité, l’histoire ne s’arrête pas là et les couteaux dans le dos sont de la partie. Car Demonaz décide d’aller enregistrer le nom officiellement (marque déposée)… à sa seule propriété, au détriment du pauvre Horgh qui claque évidemment la porte devant le manque de tact de son collègue.

Demonaz est maintenant seul, en froid avec Horgh. Abbath entre donc dans les studios, avec comme toujours une équipe pour l’épauler, bien décidée à continuer son petit bout de chemin de son côté sans ses vieux partenaires.

Fin des péripéties, début de la critique de "Dread River".

Alors, ce troisième album du panda norvégien ? Déjà, la pochette est vraiment jolie. J’adore le Abbath diabolique et conquérant qui colle parfaitement bien au personnage et à l’ambiance générale. La production est toujours au top, un peu comme les deux premiers essais. On nous livre ici tout ce qui a fait le succès des deux premières galettes, alors les fans de la première heure ne seront pas dépaysés.

On a des beaux moments, comme le riff principal de "Myrmidon", le refrain catchy du titre éponyme (Abbath a gardé le meilleur pour la fin). Bien sûr, ceux qui ont vu la tracklist vont immédiatement se poser la question : est-ce qu’Abbath a réussi ? A-t-il réussi à amener "Trapped Under Ice" de vous-savez-qui dans son monde glacial ? Et bien oui, en même temps c’était un exercice des plus faciles. Car non seulement la thématique hivernale colle à la peau de notre homme, mais la musique pratiquée par METALLICA sur ce morceau est parmi les plus rapides et les plus Thrash de leur répertoire musical. Tout de même, donnons à César ce qui lui revient : il n’a pas détruit le morceau comme bon nombre de groupes de Black Metal reprenant des succès le font si bien.

Maintenant, dans la catégorie négative. Abbath recycle ses riffs et ses thématiques. Des morceaux comme "Septentrion" ou "The Book Of Breath" n’a aucune réelle saveur, et on passe par-dessus sans trop s’en apercevoir. Abbath reste donc fidèle à lui-même, en restant percher du haut de sa montagne qu’il refuse d’abandonner. Il nous tamponne les cervicales de pièces assimilables Black/Thrash né du riffing inimitable de l’homme-panda. Peu de passages atmosphériques au rendez-vous donc, pour donner libre cours à des agressions sonores à la six-cordes.

Le charismatique leader nous offre donc un troisième essai qui constitue un minimum syndical en somme, avec un sursaut d’originalité par moments, qui n’est pas un échec cuisant, mais sans être une réussite. "Dread River" est donc la suite logique dans la discographie d’ABBATH, le groupe. Ce qui ne constitue ni un compliment ni une insulte en soi.

Morceau préféré : "Dread River".