Recherche avancée       Liste groupes



      
BLACK MÉLODIQUE  |  STUDIO

L' auteur
Acheter Cet Album
 

 

- Style : Blut Aus Nord, Rebirth Of Nefast
 

 Bandcamp (371)
 Facebook (10)
 Chaîne Youtube (12)

AARA - Triade Ii: Hemera (2022)
Par DARK BEAGLE le 30 Mai 2022          Consultée 2268 fois

Plus personne ne semble en mesure d’arrêter les Suisses de AARA qui offrent déjà une suite au premier chapitre consacré à leur transcription de "Melmoth". Difficile de ne pas s’incliner devant un tel stakhanovisme qui frôle l’hyperactivité, d’autant plus que nos Helvètes franchissent un nouveau palier. Non pas en termes d’écriture ou de production, mais en intensité. Le Black Atmosphérique des débuts s’efface toujours un peu plus pour devenir plus primaire, plus direct, sans pour autant se défaire d’une touche épique qui colle vraiment bien au sujet, qui s’en nourrit afin d’être restitué au mieux, avec les moyens du bord.

Ce qui ne les empêche en aucun cas de proposer une fois de plus une très belle pochette. Toujours tout en simplicité. Elle se rapproche de celle d"En Ergô Enai", l’œuvre qui aura mis les musiciens sous le feu des projecteurs en 2020, sans en être une copie puisque là nous sommes face à des ruines. Le visage inquiétant de l’opus précédent est effacé, oublié et il nous reste la contemplation de ces vieilles pierres, vestiges d’une architecture passée et qui ne semblent absolument pas représenter un point de salut qui ne transparaît de toute manière pas dans la musique pratiquée.

Le son de l’album pourrait être un frein pour ceux qui aiment quand le Black Metal est clinquant, quand il met tous les atouts en avant pour cacher une foule de défauts (dont parfois un manque flagrant d’inspiration). Personnellement, je l’apprécie davantage quand il grince, quand il est un peu difforme, étouffé par un son imparfait, comme si l’ensemble était enregistré sur un vieux Phillips 221R090, avec les grésillements qui vont bien, ces voix qui donnent l’impression d’être par moments très en retrait quand elles prenaient le dessus quelques minutes plus tôt. Là, AARA me rappelle l’époque où je découvrais le genre avec DARKTHRONE et des cassettes maintes fois repiquées qui perdaient de leurs qualités sonores. Pour moi, c’est ça l’essence du Black, c’est comme ça que je l’aime.

Et donc "Triade II : Hemera" est gentiment bordélique à ce niveau-là, ce qui n’a de cesse de lui rajouter du charme à chaque nouvelle écoute. Le chant de Fluss en pâtit quelque peu, mais en même temps, la jeune femme se lance dans quelques expérimentations en voix claire ("Sonne Der Nacht") pour le moins étranges, où son chant se fait quasi chamanique, doublé par ses cris aigus, qui se marient à merveille aux ambiances imaginées par Berg. Ce dernier garde le cap par rapport à l’opus précédent, il ne change pas vraiment la formule, il s’éclate en tremolo picking jusqu’à se lâcher dans des moments plus Heavy Metal dans l’esprit où semble transparaitre une influence IRON MAIDEN pas dégueulasse du tout.

Toujours secondé par J. à la batterie (le duo Berg/Fluss est devenu trio sur "Triade I"), Berg est l’artisan du son d’AARA, il est le garant de son évolution. Si la première écoute n’impressionne pas des masses, donne l’impression que le groupe se repose sur ses acquis et ne se renouvelle pas, la seconde remet quant à elle les pendules à l’heure. Il faut se souvenir que la trilogie "Triade" est l’adaptation d’un roman et que la stylistique joue sur l’interprétation que la formation en fait. Et que si le texte s’intensifie, la musique fait de même. Elle devient ici volontairement radicale, sans pour autant être bas du front car AARA continue à glisser de nombreuses subtilités via des ralentissements, des cassures mélodiques qui permettent à J. de bricoler des patterns plus héroïques à la batterie, délaissant les blast beats par moments pour construire différemment.

Aussi la musique des Suisses est toujours en mouvement, elle ondule tel un serpent tandis que Melmoth vit ses mésaventures, racontées de façon très insidieuses par Fluss qui ne démérite pas. Le récit plonge dans une fantasmagorie morbide que AARA retranscrit avec beaucoup d’intelligence, en évitant d’être rectiligne. Les morceaux sont comme un torrent sinueux et imprévisible : ils ne sont pas que tumultueux, ils cavalent, s’adoucissent quand le cours se fait moins pentu, pour mieux cascader par la suite. Les ambiances ne sont pas sacrifiées pour autant, elles sont toujours présentes, elles viennent sculpter les silhouettes des morceaux, y apporter cette finesse qui se dévoile à mesure que se succèdent les écoutes.

En six titres relativement longs, AARA expriment sa vision de l’œuvre de Charles Robert Maturin et se l’approprie totalement. Les Suisses sont en train de créer la bande-son cauchemardesque pour ceux qui apprécient de lire avec un fond sonore. Un peu comme "Nightfall In Middle Earth" de BLIND GUARDIAN si vous voulez, dans un genre toutefois bien différent. Certains pourront de fait trouver que AARA trahit l’esprit primaire du Black Metal en faisant cela, qu’il n’y a pas d’intérêt à faire cela, comme si le Black devenait un produit hollywoodien où plus rien ou presque ne provient d’un scénario original.

Plus j’enchaîne les écoutes et plus je suis irrémédiablement séduit par ce disque qui se veut le digne successeur d’un premier volet déjà fort intéressant. Il reste à présent à espérer que les Helvètes vont réussir leur final, tant ils ont su tenir leur propos sur les deux premiers chapitres d’une œuvre qui pourrait faire date dans l’histoire du Black Metal Suisse. Loin de se fissurer à enchaîner aussi vite les productions, AARA semble au contraire en tirer une force, dans laquelle il puise avec intelligence pour dépeindre des fresques en noir très réussies. Triade II n’est peut-être pas parfait, mais il s’en rapproche doucement, cruellement. Décidément, il ne faut pas sous-estimer les Suisses. Ils sont peut-être neutres, mais ils ont leur lot d’armes de destruction massive.

A lire aussi en BLACK MÉLODIQUE par DARK BEAGLE :


FERNDAL
Ferndal (2017)
Dédicace spéciale pour MEFISTO : vive le Black !




AARA
Triade I: Eos (2021)
Le rire de Melmoth résonne dans ma tête


Marquez et partagez









 
   DARK BEAGLE

 
  N/A



- Fluss (chant)
- Berg (guitare, basse)
- J. (batterie)


1. Phantasmagorie
2. Adonaia's Elegien
3. Sonne Der Nacht
4. Das Dunkel Der Welt
5. Strepitus Mundi
6. Mitgift



             



1999 - 2024 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod