Ah, le Sud… Pas celui de Nino Ferrer, hein, celui quart sud-est des Etats-Unis, le vrai pays ricain, délimité par le Missouri et le Mississipi à partir de St-Louis, grosso modo. Pardonnez-moi pour cette petite leçon de géographie, mais elle décrit globalement ce que vous retrouverez en écoutant ce premier effort de The CADILLAC THREE, "TC3" comme on dit en abrégé. On se retrouve en effet dans du Southern Rock pur et dur, cher à des groupes contemporains comme BLACKBERRY SMOKE ou WHISKEY MYERS, ou plus anciennement à The BLACK CROWES ou LYNYRD SKYNYRD.

Le groupe s’est formé en 2011 à Nashville autour du trio Jaren Johnston, Kelby Ray, et Neil Mason, une bande de potes du Tennessee, donc, pour ceux qui suivent. En parallèle de son rôle au sein de TC3, Johnson a commencé par écrire des hits pour les plus grands noms de la scène Country US, tels que Keith urban, Tim McGRAW, ou Jake OWEN, et s’est même offert le luxe d’une collaboration avec Steven Tyler d’AEROSMITH, pour revenir à des références plus métalliques. Se faisant ainsi une belle réputation de songwriting, le groupe signe alors chez Big Machine Records et sort son premier album, le bien-nommé "Tennessee Mojo" en 2013.

L’album est en effet un condensé, pour le meilleur, de ce que l’on peut attendre d’un groupe de Southern, style que TC3 délaissera peu à peu au fur et à mesure du temps, à mon grand regret, mais ceci est une autre histoire. Concernant leur essai séminal, on retrouve trois musiciens au top du feeling, qui suinte par tous les pores des quatorze titres proposés ici. Commençons par Neil, le batteur. C’est simple, il allie frappe lourde et se cale régulièrement tout au fond des temps, donnant, même aux titres les plus calmes, un côté heavy qui a lui seul justifie l’appartenance de TC3 à la communauté NIME. Kelby de son côté assure les chœurs, les parties de basse et de Lap Steel, dont il maîtrise toutes les subtilités. Pour avoir vu le bonhomme officier en live par deux reprises aux Étoiles à Paris, je peux vous assurer que c’est assez impressionnant. Enfin, Jaren, charismatique leader de cette joyeuse troupe, assure un chant on ne peut plus adapté à la musique proposée, juste nasillard ce qu’il faut, tout en assurant sévèrement à la guitare.

Malgré le format minimaliste imposé à tout trio, et du fait des multiples aptitudes du sieur Kelby, les titres sont très riches, et on ne s’ennuie pas une seule seconde, basculant de morceaux plus Rock à des titres plus typés Country, en passant par le Gospel. Le disque part à fond sur deux morceaux bien velus, "I’m Southern" et l’éponyme. On sent au phrasé et au placement de la voix que Jaren a grandi dans le mojo du Tennessee depuis son plus jeune âge. Tout sort à l’instinct sur ce titre, et les petites imperfections laissées ajoutent à ce sentiment.

Le très bon "Get Your Buzz On", relève la sauce encore et apporte un côté dansant plus qu’agréable, démontrant l’étendue de la palette couverte par le groupe. Il met en avant une guitare moins saturée, qui permet également d’apprécier les talents de Jaren et tout le groove de TC3. On retrouvera ce sens du rythme sur tout l’album, porté par une connexion innée entre les musiciens, enchaînant les passages chantés a capella avant que la section rythmique ne relance le titre, comme sur "Back It Up", qui comporte une intro Lap Steel/banjo du plus bel effet.

L’album n’est pas exempt de tout reproche cependant. Au niveau des paroles par exemple, on ne va pas se mentir, on est un peu dans le cliché : santiags, bars, cigarettes, whiskey, bières & co, mais ça fait partie de l’univers. Reproche-t-on aux groupes de Black de parler de Satan ? On aurait cependant aimé un peu plus de variété sur ce sujet, mais il faudra faire avec, et ce n’est nullement rédhibitoire.

Certains titres présentent également un intérêt moindre que les morceaux précédemment cités. C’est le cas ainsi de "Life" ou de "The Sticks". Pas désagréables, mais moins marquants et surtout beaucoup moins NIME-compatibles. On pourra même considérer qu’il existe un léger ventre mou aux 2/3 de l’album. Rien de mauvais, vraiment, mais en-deçà du début et de la fin de ce "Tennessee Mojo".

Car TC3 aura le mérite d’attacher un soin particulier à se retirer en beauté, et à ainsi laisser une impression plus que positive avec le bouquet final constitué du duo "White Lightning" / "The South". La première est une splendide balade donnant des airs de crépuscule à ce LP, tandis que la seconde assène la seule conclusion possible à ces (presque) cinquante minutes de kif : « this is where I was born, and this is where I will die ».

Si vous envisagez un jour de faire un Road-Trip à travers les US, voilà votre BO.

Note : 4,5/5 car cet album contient parmi les meilleurs titres du genre de ces dix dernières années selon moi. La note maximale n’était pas loin, mais quelques pistes objectivement moins réussies m’obligent à me montrer à la hauteur des standards de qualité du site en matière de cinq étoiles.