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2017 Sacred Son
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2020 Levania

SACRED SON - Levania (2020)
Par T-RAY le 11 Juillet 2020          Consultée 1253 fois

On connaissait déjà le concept des albums d'Ambient mis en boîte par défaut par des artistes de Black Metal, faute d'avoir pu se procurer les instruments nécessaires pour enregistrer. Ainsi en va-t-il de "Hliðskjálf" et de "Dauði Baldrs", les deux opus composés par Varg Vikernes au synthé lorsqu'il était en taule, durant la deuxième moitié des années 90. Des disques qui, malgré leur médiocrité caractérisée (je partage l'avis de Possopo à leur sujet) pour un musicien qui avait pourtant déjà brillamment tâté du genre sur "Hvis Lyset Tar Oss" en donnant naissance à l'énigmatique et superbe "Tomhet", avaient pour eux une certaine aura.

Un voile de mystère et un soupçon de soufre pour les fans de Black Metal à une époque où, faute d'un Internet tout puissant, les informations sur la détention du Count Grishnackh étaient rares et pas si simples à obtenir. Un mystère et un soufre qui profitaient naturellement à la scène Black toute entière, qui ne cherchait alors pas vraiment à se départir de l'image controversée qui lui collait à la peau depuis quelques années et que même les personnages qui en sont responsables - Varg en premier lieu - ont cherché à déboulonner depuis.

Derrière les murs de sa prison, Vikernes n'ayant pas pu jouer de musique avec guitare, basse et batterie, s'en était remis à un bon vieux synthétiseur pour donner naissance aux cinquième et sixième longue durée de BURZUM. Et même si l'on ne goûtait pas les sonorités qui en étaient sorties, force est de constater que le fantasme lié à la création de ces deux L.P. comptait pour beaucoup dans l'intérêt des fans du Norvégien (et d'une bonne part de fans de Black de manière générale) pour la nouvelle forme que revêtait l'art musical de Varg.

En 2020, en revanche, ce ne sont pas les affres de la réclusion criminelle qui ont empêché Dane Cross, tête pensante et seul véritable maître à bord de ce véritable mème qu'est devenu SACRED SON, de composer son troisième opus studio, mais bien le confinement tardif décrété par le gouvernement britannique pour tenter d'endiguer la propagation du SARS-CoV-2, le fameux coronavirus responsable de la pandémie de Covid-19 qui a contraint la moitié de l'humanité à limiter au maximum toute interaction sociale pendant au moins deux mois.

Or, 2020 n'est pas 1997, pas même 1999, et les chaînes d'information continue, le web ainsi que les omniprésents réseaux sociaux ont permis à des milliards de personnes d'étaler au grand jour la vacuité de leurs activités confinées. Entre multiples expérimentations culinaires photographiées à qui mieux mieux, top 10 des disques/films/livres soi-disant marquants dans les vies de chacun, et apéros partagés en visioconférence avec les potes, le tout sans véritable privation d'aucune sorte - preuve en est la prise de poids généralisée de nos concitoyens captifs de leurs propres logements - ce confinement n'avait rien de bien sulfureux.

Ce cher Dane Cross n'en fait pas mystère lui-même, la pochette du troisième album de SACRED SON, "Levania", le montrant coiffé d'une casquette à l'envers (ça c'est Black Metal !) en train de battre des cartes à jouer accoudé à un meuble sur lequel trônent jetons de poker, verres d'alcool vides, bouteille de Leffe de 75 cl (pas bien !) et bouteille de 37,5 cl d'Old Speckled Hen (bien !). Preuve que tout musicien de Metal Extrême qu'il soit, et surtout de Black, le bonhomme n'a pas fait les choses différemment de ses congénères durant son confinement. Mais on savait déjà le Britannique amateur de scènes du quotidien sur ses pochettes, alors...

Au troisième plan de la photo, tout de même, un clavier et des partitions apparaissent, comme pour rappeler que Cross n'est pas resté sans rien faire, musicalement parlant, durant son retrait forcé de la vie sociale. Un clavier et des partitions qui ne sont certainement pas celles sur lesquelles il a retranscrit les morceaux de "Levania" : il y a manifestement trop de notes dessus ! Trop pour ce troisième longue durée, en tout cas, puisque ce disque n'a qu'une seule composition et qu'il ne s'agit que d'une interminable pièce au croisement de l'Ambient et du Drone, monotone (forcément) mais sans intérêt aucun (c'est ballot).

Le pire dans l'histoire étant que ce projet Ambient trottait dans un coin de la tête du gaillard depuis longtemps maintenant. « Être en confinement m'a donné l'opportunité d'explorer l'idée d'écrire une pièce d'Ambient/Drone plus tôt que je ne l'avais prévu », écrivait-il d'ailleurs sur sa page Facebook le 1er mai dernier, jour de la sortie de l'œuvre. On a envie de lui dire qu'il aurait pu se retenir et mûrir la chose quelques années de plus car même si je goûte la répétitivité en musique lorsqu'elle est bien employée, celle de "Levania" est barbante passé les trois premières minutes d'écoute. Dur, dur, pour un morceau qui en dure cinquante supplémentaires…

Les différentes couches musicales que Dane Cross empile avec son synthé colportent, certes, une atmosphère mystique évidente qui aurait pu faire son effet si le morceau progressait réellement tout au long de sa durée, même par toutes petites touches, ce qu'il a largement le temps de faire, mais l'usage permanent des mêmes effets sonores compromet sérieusement la dynamique que le musicien cherchait à offrir à sa composition. Si bien que les transitions, extrêmement discrètes, entre les différentes parties du morceau, ne donnent pas l'impression de voyager loin comme ce genre de musique le promet, mais au contraire de tourner en rond. Le sac et le ressac de cette musique n'hypnotise pas, il endort. Et ennuie.

On en revient toujours au même point avec "Levania" et cela devient donc rapidement lassant. Il ne retient que les moins bons éléments de l'Ambient et du Drone, en l'occurrence la monotonie et la lenteur, sans générer d'émotion d'aucune sorte. Et plutôt que de noirceur et de mélancolie, voire de malaise, les sensations que génère l'écoute de l'album se rapprochent bien vite de celles que l'on peut ressentir en déambulant dans les allées d'un magasin "Nature & Découvertes" où en allant se faire masser au spa du coin… Pour le côté sombre, on repassera. Si l'œuvre reflète les sentiments de Dane Cross durant ses semaines de confinement, force est de constater que l'homme était plutôt éteint et que lesdits sentiments ne l'ont pas franchement chamboulé. Par conséquent, nul ne sortira transfiguré par l'écoute d'un tel disque.

À propos d'œuvre impliquant des personnages confinés, ou du moins réunis en un seul et même lieu, rajoutez donc "Onc" à "Levania" puis séparez le mot obtenu en deux noms distincts - l'un commun, l'autre propre - et vous obtiendrez le titre d'une pièce de théâtre renommée d'Anton Tchekhov, dans laquelle il est autrement plus intéressant et prenant de se plonger que dans cet album de Drone/Ambient insipide. En parlant de Tchekhov, tiens, celui-ci disait à propos de son fameux fusil qu'il fallait absolument que l'un des personnages s'en serve s'il apparaissait dans l'histoire, sinon le mentionner ne servait à rien. Une leçon que n'a pas retenu Dane Cross car le clavier qui apparaît sur la pochette de son album n'a manifestement pas autant servi qu'il l'aurait dû. Il y avait bien davantage à en tirer.

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- Dane Cross (claviers, programmation)


1. Levania



             



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