Remettons les pendules à l’heure, si vous le voulez bien. Car avec MARTRIDEN, ça va vite.

Le fossé entre "The Unsettling Dark" et "Encounter The Monolith" était assez déstabilisant. Après un E.P. salué avec respect, mes Américains adorés sortaient coup sur coup des albums complémentaires d’une qualité assez exceptionnelle. Le premier, bête de Black Death Mélodique et Atmosphérique inspirée et très distrayante, disséminait quelques accents progressifs ici et là et une fausse tendresse dans certaines ambiances. C’est avec la sortie de "Encounter The Monolith" qu’on a vu le véritable visage de MARTRIDEN, celui d’un combo extrême épris d’envies progressives, d’envies d’en découdre avec force et subtilité, d’envies de prouver au monde entier qu’il était possible de mélanger les styles sans se fourvoyer et surtout, en rameutant toutes les chapelles.

Ça rappelle quelques groupes ça, non ? Oui, BORKNAGAR sera toujours en tête de liste, vous avez raison. Et MARTRIDEN lui emprunte quelques pistes, sur des compos comme "The Grey".

"Cold And The Silence" étant un troisième album d’un groupe fort doué au début de carrière canon, on pouvait s’attendre à une œuvre mature représentant tout son potentiel. Cela même si les Américains sont encore orphelins de label, ce qui dans un sens est un exploit… ou un non-sens, au vu de leur talent. Si cet état de fait est un choix, c’est bien dommage, car MARTRIDEN ne reçoit pas l’attention qu’il devrait, en étant écarté des réseaux de marketing dirigés par les labels majeurs.

Alors ? A-t-on droit à un autre monolithe indélogeable ? Pas vraiment. Sauf que "Cold And The Silence" dissipe quelques écrans de smog qui planaient jusqu'alors sur l'œuvre de MARTRIDEN. La facture Prog s'étire et prend sa place légitime, bien que le Black Death savamment produit demeure une partie intégrante de la musique. Le chant clair de Shane Howard s'infiltre également beaucoup, l'ancien vocaliste s'étant tiré. Je regrette le temps où les Américains jouaient plus durement, mais je suis aussi capable d'apprécier leur recherche plus approfondie d'univers bigarrés. En ce sens, on poursuit sur la lancée amorcée sur "Encounter The Monolith", parfait compromis entre les deux identités dorénavant connues du groupe.

Bon, parlons de ces atmosphères tracées par le synthé et les mélodies guitaristiques, car c'est bien le pain et le beurre du quatuor: elles sont bien imagées par la pochette rêveuse. Le bleu évoque la grandeur, l'immensité, le noir le mystère progressif, le mauve, la mélancolie et le rose foncé la colère qui fait irruption de cet enchevêtrement d'idées passionnantes. Car MARTRIDEN, s'il me harponne moins avec cette sortie, réussit à créer une osmose assez consistante de toutes ses qualités et ses états d'âme. Les ambiances sont tantôt maritimes, tantôt stellaires, tantôt à fleur de peau, tantôt naturalistes, et constamment déchirées par des lames Black Death tranchantes, qui parfois semblent anecdotiques dans ce Prog curieux. Mais au final, ça fond comme du beurre dans la poêle.

Donc, on en revient toujours au même dilemme : note-t-on en fonction de ses goûts ou de notre analyse la plus objective possible ? Ben les deux, sinon on est foutu. Voilà pourquoi je ne peux octroyer moins que quatre étoiles à cet album, car c'est aussi bien joué que produit, c'est varié, assez complexe et accrocheur pour vous tenir en haleine durant de longues heures. J'aurai toujours une préférence pour le disque précédent, mais je dois avouer que cette cuvée 2015 propose sans doute plus de chair autour de l'os.

Qu'importe tout ce blabla, retenez que MARTRIDEN est un groupe majeur du Prog moderne, bien qu'il soit encore méconnu, c't'orphelin.

Podium : (or) "Consequence", (argent) "Cold And The Silence", (bronze) "The Grey".