Après un premier album remarquable, ENSHINE nous revient avec un nouvel opus en cet an de grâce 2015. Et comme la recette précédemment appliquée a eu l'air de fonctionner, pourquoi se priver de la resservir une seconde fois ? Pourquoi ? Eh bien, j'ai quelques raisons de penser que ce ne fut pas un choix des plus judicieux. "Origin" était splendide, une véritable révélation, mais "Singularity" ne semble n'en être qu'un reflet plutôt terne, desservi par une inspiration qui fleure le réchauffé. Le réchauffé haut de gamme, certes, mais le réchauffé quand même.

L'on retrouve donc bien entendu les nappes de synthétiseur aériennes et les mélodies Doom/Death typiques du groupe, toujours composées dans une optique d'évocation de l'espace. C'est donc un peu rêveur qu'il faut aborder ce disque, l'esprit vagabondant entre les astres et les étoiles filantes. L'on est, une fois de plus, bien servi en matière d'ambiances spatiales, avec toujours une certaine mélancolie dans les riffs : le style du groupe n'a pas changé d'un iota.

S'il faut remettre quelque chose en question, il s'agit plutôt de la qualité des compositions du point de vue de la créativité dont elles sont le fruit. Les titres sont ici moins inventifs que sur "Origin", et cela se ressent fortement sur toute la longueur de l'album. "Singularity" est un peu plat, comme une bouteille d'eau pétillante que l'on aurait laissée ouverte trop longtemps avant de la consommer. Ça commençait pourtant bien, avec un "Dual Existence" efficace qui conservait un peu de ce vague à l'âme si prenant sur "Origin". Mais la suite est moins convaincante ; l'on sent bien qu'ENSHINE a tenté de recréer cette même atmosphère ici, mais le résultat est moins poignant, plus conventionnel. Également trop planant, peut-être ?

Ce relatif manque d'intensité se fait sentir dès le début du deuxième tiers de l'album, à partir d'"In Our Mind" ; "Echoes" fait remonter un peu la pression, mais ce n'est pas suffisant pour que "Singularity" puisse être considéré comme plus que simplement un album correct. La puissance de la musique d'ENSHINE s'est amoindrie ; tantôt elle évoquait volontiers les débuts de SWALLOW THE SUN pour le côté écrasant des riffs, mais elle n'a plus ici l'intensité dramatique d'auparavant. Il y a de bons éléments, comme les trois premiers titres, mais il manque quelque chose. Et la réponse pourrait être, entre autre, qu'il n'y a plus de piano. "Origin" lui faisait la part belle dans ses arrangements, mais cet instrument a quasiment entièrement disparu des compositions du groupe sur "Singularity". Cela peut paraître certes peu, mais cela participe indubitablement au manque de magie du disque.

En définitive, "Singularity" a comme plus grosse faiblesse de sortir après un premier opus de qualité vraiment exceptionnelle, trop exceptionnelle pour être facilement égalée ou dépassée. Son contenu est plaisant à écouter, mais il est loin d'être transcendant. Un peu trop mou et pas assez inspiré, il lui manque l'étincelle de génie de son prédécesseur. Cela reste tout de même un moment agréable à passer, mais il ne fera certainement pas date dans l'histoire du Metal.