Fatigué par le revers de la médaille du succès fulgurant d'avec son groupe, le chanteur s'offre un break après l'épuisante tournée de l'album « New Jersey »... La proximité des musiciens depuis leurs débuts en 1984 a laissé des traces, et c'est bien normal.

Fort d'une notoriété solide, Jon en profite pour se marier en catimini avec son amour de jeunesse à Las Vegas, et faire le tour des USA en moto. De ces expériences enrichissantes, celui-ci va en tirer des constats et faire un peu le point sur lui-même. D'autant qu'il va pouvoir mettre en lumière tous ces polaroids, ces instantanés qu'il a vécu depuis lors car il vient de décrocher la bande-son du deuxième volet de « Young Guns », un western sans grande saveur, mais une telle opportunité ne se refuse pas. Et comme le musicien natif du New Jersey est tout sauf un idiot, il emboîte le pas rapidement et compose tout seul comme un grand cette bande originale, musicalement aux antipodes de ce que son groupe peut proposer à l'époque, si ce n'est une certaine exigence de composition en commun. Il va s'en dire que la démarche est totalement différente ici, il s'agit d'un projet appelé à correspondre et convenir à l'ambiance d'un film, et autant vous dire que le cahier des charges est scrupuleusement respecté.

On savait l'homme travailleur, mais l'imagerie des cow-boys l'a toujours fasciné, avec en toile de fond le sens de l'honneur, le courage et tout le toutim... En « Storyteller » de talent, Mr Bongiovi y va de son inspiration pour le meilleur la plupart du temps... Une pléiade d'invités de choix y figurent, parmi eux ce fantastique guitariste sous-estimé qu'est Aldo Nova.

Il faut dire que l'odeur du sable sous les santiags est assez palpable, l'odeur de la poudre aussi. Tout y est, guimbarde, coups de feu, cordes, le bruit des éperons, l'ambiance des saloons le soir venu, en témoigne « You Really Got Me » en compagnie du génial Little Richards au piano et aux chœurs. Un rendu impeccable pour ce petit gars qui a traîné ses guêtres dans les clubs poisseux du New Jersey, ou les pré-destinés à l'usine venaient l'applaudir pour oublier leurs vies toutes tracées, où le rêve n'est que brièvement abordable...

Les ambiances western sont ainsi parfaitement retranscrites, et la Musique proposée est de bonne facture. « Billy Get Your Guns », qui ouvre l'album est un titre parfait pour débuter les hostilités. Les textes de Jon Bon Jovi ne seront jamais au niveau d'un Bruce Springsteen, son idole, qui sont d'une toute autre portée, mais force est de constater qu'il excelle dans l'art d'être un parfait représentant de son époque. Un artiste visionnaire qui n'est pas dénué de talent, loin s'en faut. A partir de là, évaluer un de ses albums est plus facile.

Ce "Young Guns 2" est plus que plaisant, très varié, et retranscrit à la perfection l'ambiance d'un film de genre.. « Dyin' Ain't Much Of A Livin » est ainsi particulièrement touchante, où l'on sent bien la mélancolie du Cow-Boy itinérant, idem pour « Santa Fe », où le chanteur s'offre sans conteste sa plus belle prestation vocale. Quelle puissance, quelle justesse, tout cela fait dresser les poils, avec en sus un invité de choix en la personne de Jeff Beck, guitariste incroyable qui sait toujours faire sonner sa guitare sans jamais être démonstratif, quel talent !
Le britannique brille naturellement sur ce disque tout en restant relativement discret lorsque les compositions l'exigent, et en ce sens n'est pas si éloigné d'un Richie Sambora, quand bien même leurs jeux respectifs sont bien différents. Que ce soit au sein d'ambiances calmes des « Justice In The Barrel » et « Blaze Of Glory », ou bien du plus énergique et très réussi « Never Say Die », le résultat est bluffant. Si en plus Elton John s'invite pour jouer un peu de piano de ci de là, que demander de plus au contribuable qui a acheté cet album ?

D'une démarche différente d'avec son groupe BON JOVI, le chanteur s'est offert un luxe, celui de s'émanciper en grandes pompes du Hard FM, de qualité néanmoins qu'il a crée avec ses compagnons de route, pour s'aventurer dans des contrées musicales qui, si elles ne sont pas nouvelles, sont ici complètement assumées.

S'agissant d'une bande originale de film, l'appréciation générale restera modérée mais globalement cet album est une franche réussite, d'un niveau moindre que les ténors du genre, mais chantée et totalement argumentée, D'où la mention bien.