Pour les gens qui ne connaîtraient Joe Satriani que de nom et de réputation, le meilleur moyen de découvrir cet artiste hors-normes reste sans doute l'achat de "Flying In A Blue Dream".
Ce troisième album studio est moins expérimental que ne pouvait l'être son prédécesseur "Surfing With The Alien", moins axé sur la technique pure, mais il propose une plus grande variété dans les styles musicaux abordés.

La principale spécificité de cet album réside dans le fait que pour la première (et unique) fois, Joe s'aventure au chant sur 6 titres; et même s'il n'est pas aussi bon chanteur que guitariste (ça semble bien difficile !), ces chansons apportent un plus à l'album, grâce à des paroles légères et plutôt sympas. On retiendra surtout dans ce domaine le très joyeux "The Phone Call", très rockabilly, le funky "Strange" ou le mélancolique "I Believe".

La boîte à rythmes a disparu, elle a cédé sa place à une vraie batterie, jouée principalement par Jeff Campitelli, ce qui donne aux compos un aspect plus humain, moins "pré-fabriqué". Il faut aussi remarquer la toute première apparition de Stuart Hamm sur un album studio de Satriani, même s'il ne joue que sur deux titres. (Campitelli et Hamm, deux musiciens qui resteront quasi-indissociables de la carrière de Joe, et que l'on retrouve encore sur le "Live In San Francisco" sorti 12 ans après "Flying...").

Du côté instrumental, Joe n'a jamais été aussi bon, il touche à tous les styles et nous délivre des chansons extraordinaires, véritables perles de son répertoire comme "The Mystical Potato Head Groove Thing" et son tapping à deux mains, les fantaisistes "Back To Shalla-Bal" et "Headless", le très western "The Feeling" (au banjo), "Ride" et son boogie à la ZZ Top, "A Day At The Beach" et son formidable double tapping"...

Difficile de faire plus diversifié, l'imagination et le talent de créateur de Joe sont à leur paroxysme, et sur les 18 titres de cet album, aucun n'est à jeter. Il faut dire que le maître a mis du temps à peaufiner son troisième opus puisque seize semaines ont été nécessaires à l'enregistrement de cet album magique. Résultat : peut-être les toutes meilleures chansons du Satch : le planant "Flying In A Blue Dream" que l'on écoute en fermant les yeux pour mieux s'envoler à travers les nuages, l'infiniment triste "The Forgotten Part. 2" où la guitare atteint des sommets d'émotion et de feeling, le fabuleux "Big Bad Moon" et ses solis cristallins et supersoniques entrecoupés par l'utilisation géniale de l'harmonica, et enfin, pour clore un disque exceptionnel, le magnifique "Into The Light" qui donne vraiment la sensation de traverser la lumière pure pour finalement atteindre le soleil, puis retomber dans le néant.

Tout ceci n'est pas une confirmation de toute la classe qu'il avait démontrée sur "Surfing With The Alien", mais bien une réelle progression, un pas de plus vers des sommets musicaux rarement (jamais ?) atteints en matière de guitare électrique.
Si Dieu existe, il joue de la guitare et a pour nom Joe Satriani !