Deux ans après un premier opus "Obsessions", Samuel Arkan est de retour avec EPYSODE. Le guitariste de feu VIRUS IV a visiblement impressionné avec ce premier opus, à en juger par la liste d’invités de marque qu’il avait réussi à convertir à son projet (Rick Altzi, Kelly Sundown). EPYSODE ressemble à s’y méprendre à AYREON dans la démarche, avec un guitariste-compositeur qui gère la quasi-totalité des opérations, invitant les voix qu’il a en tête pour tel ou tel passage. Il est d’ailleurs amusant de constater que, comme le géant hollandais, Samuel avait fait appel aux détonantes Magali Luyten (sa compatriote et partenaire de VIRUS IV) et la rockeuse Liselotte Hegt dont la voix éraillée faisait merveille, pour "Obsessions".

VIRUS IV est loin derrière désormais, et c’est hélas avec une certaine amertume que nous n’assisterons pas à une nouvelle collaboration sur "Fantasmagoria", la belle Magali laissant sa place à de nouvelles têtes…
Oui le casting vocal de ce nouvel opus est complètement renouvelé, de même qu’une partie du line-up, Kristoffer Gildenlöw (ex-PAIN OF SALVATION) laissant son poste à un autre ponte du genre, à savoir ce cher Mike de SYMPHONY X. Le farfelu Christophe Godin ne sera pas non plus de la partie, et c’est Simone Mularoni qui se joint cette fois-ci à la troupe pour agrémenter les compositions de soli de guitare dont il a le secret.

Un line-up axé plus Power Prog en somme… Et ce "Fantasmagoria" est des plus Heavy. Samuel Arkan nous gratte d’épaisses rythmiques saccadées que le mixage de Jacob Hansen restitue parfaitement, même si je trouve qu’elles ont la fâcheuse tendance à enterrer la basse de Mike LePond, qui malgré son évident talent, n’a jamais eu ce besoin de se mettre en avant vis-à-vis de ses collègues. Avec le six-cordistes de DGM et EMPYRIOS, EPYSODE s’assure des parties lead tantôt supersoniques ("Morning Rose"), tantôt ultra-mélodiques ("Now And Forever") pour un album, il faut le dire, assez consistant (quatorze titres) et d’une densité quasi ininterrompue, que ce soit ce riffing grassouillet ou bien encore les arrangements de clavier de Julien Spreutels qui malgré son âge dispose d’un talent indéniable.

Si l’association musicale détonne (je n’ai même pas parlé de la présence de Léo Margarit, c’est dire), au niveau vocal EPYSODE devient séduisant pour le metalleux qui n’a pas encore pu poser les oreilles sur la musique du combo belge. Car avec Tom Englund et Henning Basse, Samuel Arkan a dégoté deux monstres vocaux aux capacités vocales et expressives no limit. Henning Basse se démarque particulièrement au cours de "Venom", où il dispose de 4:35 pour faire étalage de son talent. Il y interprète en outre l’un des refrains les plus catchy de "Fantasmagoria". Le jeune Matt Marinelli a ainsi fort à faire, surtout quand il doit jouter avec un Tom Englund toujours impérial, dont les lignes vocales ramènent instantanément à EVERGREY et son mélange de noirceur et d’émotion, même si ce côté un peu haletant peut fatiguer (reproche qu’on fait aussi parfois à Floor Jansen chez les filles). Si Liselotte et Magali ne font pas roxer cet opus, on peut compter sur Ida Haukland avec sa voix à facettes, aussi mélodique que potentiellement agressive idéale pour jouer une psychotique schizophrène, bien que la jeune Tezzi Persson ait intérêt également, plutôt cantonnée à un registre plus aigu et surtout plus délicat, sa voix parfaitement claire se faisant aisément une place dans le mix ("T.H.O.R.N.S").

Et l’album en lui-même ? Il est important d’y consacrer un paragraphe entier car une nouvelle fois, EPYSODE nous présente un concept album, où chaque vocaliste est personnifié et où les échanges vocaux sont multiples. Le pitch : l’histoire d’un serial killer, le tueur aux roses dont le mode opératoire dérangé peut rappeler ceux de "Seven" ou "Resurrection" avec une facette religieuse utilisée très différemment, recherché simultanément par un policier expert en sciences surnaturelles (une sorte de Fox Mulder si vous voulez), une journaliste en quête de vengeance alors qu’en parallèle, le fratrie dérangée Amy/Ione (la première étant possédée par un medium et entraînant son frère dépressif à faire un sale boulot...) trouve aide auprès d’un prêtre qui pense par la force de la foi, exorciser ses démons. Admirablement construit, le concept non seulement fait le lien avec le premier opus d’EPYSODE (le medium n’est autre que Valma, merci au passage à Samuel Arkan de l’avoir précisé dans le livret, vu que je n’ai pas encore pu écouter "Obsessions"), mais va créer toutes sortes de situations et d’interactions entre les personnages.

Encore une fois, la lecture des paroles sera capitale ici pour la compréhension et le ressenti global de l’opus, qui s’il ne s’appuie que sur ses caractéristiques musicales est juste un bon album de Metal Prog avec parfois de jolis coups d’éclat ("Venom", "Raven’s Curse", "Fantasmagoria") mais devient nettement plus immersif et addictif tant on veut connaître le dénouement ; vous savez, un peu ce qui se passe quand vous êtes pris dans un roman passionnant et que vous ne pouvez vous empêcher de lire encore et encore jusqu’à savoir ce qui va se passer. Voilà ce qu’est parvenu à proposer EPYSODE : un thriller Metal Prog de qualité, auréolé d’un 4/5 encourageant !