Comme je l’avais pressenti au moment de l’EP qui annonçait le LP (quelle phrase magnifique), hélas, NEWSTED n’a pas grand-chose à dire.

Mais il a des envies.

Envie de ressembler un peu à MOTÖRHEAD, de se parfumer avec de vieux relents de BLACK SABBATH et envie de faire (aussi) du Thrash bien US qui pourrait plaire un tant soit peu aux fans de METALLICA.

Mais avoir des envies ne suffit pas.

NEWSTED (et ses potes) manque de riffs tranchants. Faute d’inspiration, le groupe fait tourner les compos en ligne droite et on s’emmerde passablement en onze exemplaires. "Heavy Metal Music" est aussi banal que son titre, l’album s’écoute en faisant autre chose, il fait illusion dans la bagnole avec les vitres ouvertes. Il n’y a pas si longtemps, je vous aurais fait tout un paragraphe haineux sur le « Metal d’ascenseur » mais je suis fatigué de répéter les mêmes choses.

Certains diront : « oui ça s’écoute vite fait, comme ça, mais ça fait pas de mal pour autant ». Après tout, où est le mal à cela ? Permettez-moi de vous dire que je vomis sur cette vision de notre musique, qui par définition – fondamentalement même – se doit de faire mal, de violenter. Notre musique est un cri de douleur, un majeur dressé ou que sais-je encore. Cette « formatisation » (très américaine en somme) me donne donc envie de vomir, puis juste après de déprimer un peu. Si, si je vous jure.

J’en reviens à NEWSTED. C’est dommage, car ce positionnement « MOTÖRHEAD / BLACK SABBATH / METALLICA » est juteux sur le papier, il a de la cuisse. Le projet sur le papier donne envie, mais pour reboucler ma boucle du début, je vous disais donc que l’envie ne suffit pas etc. Il a manqué donc de l’inspiration à l’ami Jason. Vouloir n’est pas pouvoir. Son album place le chroniqueur qui voudrait dépasser les cinq lignes dans une position inconfortable, sans lui permettre non plus de vider son sac pour laisser la place à une haine implacable. Car non, NEWSTED n’est pas non plus assez mauvais pour dire des horreurs. D’ailleurs, je vous parie qu’au moins un lecteur tentera bien de nous vendre "Kindevilusion" (le meilleur titre de l’album), son riff Heavy où il fait bon vivre et son break baigné de soleil. Je préciserais donc que le meilleur titre de "Heavy Metal Music" est juste correct. La messe est dite.

Ce sera du 2/5.

Comme il me manque quelques lignes pour avoir l’honneur de publier ce papier ici même, je souhaiterais conclure sur un point assez peu abordé dans nos contrées et qui détermine souvent les grands groupes : l’équilibre.

...

L’équilibre est quelque chose de délicat, de difficile, de précaire. Il faut des personnalités concordantes dans un groupe, qui se neutralisent pour que tout le monde ait sa place, apporte sa contribution et tutti quanti. La quadrature du cercle au temps du METALLICA de jadis était à ce titre un modèle du genre : James jouait le rôle du leader-riffeur génial, Cliff celui du bassiste bosseur et talentueux, Lars de la grosse brute-grande gueule et le petit Kirk le virtuose discret. Ce petit monde-là était fait pour cohabiter (pas étonnant que Dave Mustaine ait du rapidement laisser sa place).

À la mort de Cliff, cet équilibre a été bouleversé. Jason a colmaté ce qui pouvait l’être, sans jamais vraiment trouver sa place. Laissant ainsi James devenir « naturellement » le saint-patron, mais esseulé. Si Jason a joué ce rôle de « petit frère » par procuration (d’exécuteur zélé), le rôle de bassiste au sein de METALLICA à moitié tenu, puis le succès, le fric etc. il n’en fallait pas moins pour rompre cet équilibre. Artistiquement et humainement, le groupe est mort en 1987. Avec Jason à son bord, le navire METALLICA n’a fait que dériver doucement vers une médiocrité de plus en plus visible. En ce sens, on ne peut même pas en vouloir à Trujillo : à l’impossible, nul n’est tenu.

Bref, il était « écrit » que Jason – tout seul – n’arriverait pas à s’extraire de l’ambiance poisseuse et mortifère qu’il a connu pendant trop longtemps. C’est l’histoire du fruit pourri qui contamine le reste de la corbeille. Resté sans doute trop longtemps « tâcheron » de luxe au sein du plus grand groupe de Metal pourrissant, NEWSTED ne pouvait pas être autre chose que cela. Un album sans âme. Auquel il manque un chanteur, un batteur et un guitariste.

Il manque un groupe tout simplement.


Note : 2/5.


Morceau préféré : "Kundevilusion".