On avait un peu oublié que Mat SINNER avait publié un album sous son propre nom à l'aube des années 90. Après une demi-douzaine d'albums parus dans le courant des années 80 avec son groupe SINNER, le chanteur/guitariste teuton ressent le besoin de changer d'air et d'équipe. Ce seul et unique album de Mat SINNER en solo voit en effet l'artiste s'acoquiner avec de nouveaux camarades de jeu, parmi lesquels le guitariste Alex Beyrodt (PRIMAL FEAR, SILENT FORCE) ; ces mêmes camarades qui formeront la nouvelle mouture de SINNER pour les cinq années suivantes. Il va sans dire que cet album, peu médiatisé lors de sa sortie, aurait gagné en exposition à être publié sous le nom du groupe principal de l'artiste.

Mais, pour le plaisir de nos esgourdes friandes de Hard Rock made in Germany, AFM Records a la bonne idée de ressortir des placards de "Back To The Bullet", dans une version remasterisée par Achim Köhler (PRIMAL FEAR? BRAINSTORM), agrémentée d'un nouvel artwork et augmentée, la bonus-track "She's Got The Look" étant cette fois intégrée dans la version régulière de l'album. Ajoutez à cela deux clips un peu cheap ("Call My Name", tourné au bord de la mer, guitare acoustique et cheveux aux vents, et "Every Second Counts", beaucoup trop permanenté, façon VAN HALEN teutonique), pour une reédition vraiment convaincante d'un album plutôt bien fichu.

Le Hard Rock de Mat SINNER solo est à peine différent de celui des albums de SINNER, certes un peu plus couillu, mais néanmoins très accessible. L'artiste balance d'entrée sa cartouche la plus violente, "Back To The Bullet", qui rappelle le Axel Rudi Pell des débuts. Malgré la présence imposantes de chœurs, l'ensemble est très germanique dans l'âme : toutes guitares dehors, peu ou pas de fioritures, et des riffs aux allures de rouleau-compresseur. Les amateurs apprécieront. Autre qualité de l'album : le chant de Mat SINNER qui, s'il rappelle parfois Udo Dirkschneider (les cris introductifs du morceau-titre) apporte plutôt un côté burné mais néanmoins mélodique qui participe à l'impact de l'ensemble.

A la limite du Heavy Metal ("Tear Down The Wall", l'excellent "Crying In The Wires"), Mat SINNER se démarque de sa concurrence d'alors grâce à sa capacité à ne laisser aucun temps faible réduire l'impact de son album. Les morceaux sont typiques du Hard teutonique de l'époque, et n'apportent pas vraiment d'eau au moulin. Reste que le talent indéniable de Mat parvient à faire de "Back To The Bullet" un album vraiment réussi, porté par une grosse poignée de morceaux bien fichus : la ballade "Call My Name" et ses faux airs de "When The Children Cry" (WHITE LION), "In the Name of Rock'n'Roll" taillé pour la scène (et justement gâché par les bruits d'un faux public), ou "Down Undercover" et son sympathique riff façon BONFIRE.

Pas de quoi faire l'album du siècle, c'est certain. Mais il faut reconnaître un petit charme teinté de nostalgie à cette seule offrande solo de Mat SINNER, qui parvient à offrir une bonne rasade d'un Hard/Heavy inspiré et fédérateur. Parfaitement mis en valeur par le nouveau mixage, cette reédition mérite l'intérêt de tous les consommateurs de distorsion à l'allemande.