"Walking Tall" est un album qui fait fichtrement plaisir. Un plaisir à savourer comme il se doit puisque, après 15 ans de carrière et cinq tentatives plus ou moins fructueuses de s'imposer sur la scène Hard Rock allemande, SHYLOCK vient de proposer son premier album excellent de bout en bout, et que l'on ne trouve pas trop long, malgré une durée conséquente de 50 minutes, alors que le groupe peinait à éviter le remplissage sur ses précédentes livraisons. Un tour de force qui se doit d'être salué.

Est-ce le repos forcé auquel s'est contraint le groupe après la sortie du réussi "Rockbuster" ? Toujours est-il que le chanteur Matthias SCHENK et le guitariste Johannes AMRHEIN, têtes pensantes du combo semblent avoir trouvé une vigueur et une inspiration que l'on ne leur prêtait pas. Il faut dire que coincé entre BONFIRE, GOTTHARD et SHAKRA, le groupe n'avait que peu eu l'occasion de se montrer, avare en prestations live qui auraient pu lui permettre de gagner des galons. "Walking Tall", donc, apporte un vent frais sur le Hard Rock du groupe. Pour s'en convaincre, il suffit d'écouter le morceau-titre qui ouvre l'album, mid-tempo tubesque doté d'un refrain bluffant, ancré dans un Hard Rock traditionnel mais faisant preuve d'une modernité dans le phrasé ainsi que dans l'utilisation intelligente des chœurs. Avec sa voix légèrement éraillée très proche de celle de Claus LESSMAN (BONFIRE), Matthias SCHENK se porte garant de l'impact des mélodies et de l'efficacité du refrain. Tant et si bien que l'on voit bien SHYLOCK s'imposer, enfin, en digne successeur d'un BONFIRE dont la carrière décline dangereusement depuis la fin des années 2000.

A de nombreuses reprises, SHYLOCK vient frapper l'auditeur par son sens des mélodies qui font mouche, et propose une douzaine de titres variés et finement ciselés, qui lui permettent de faire un pas de géant sur la scène teutonne. "Rock DNA", énergique et enlevé, constitue sans doute ce que le genre nous a proposé de plus plaisant depuis bien longtemps. "I Can't Wait Now", qui rappelle les précédents albums du groupe, perd en fraîcheur ce qu'il gagne en impact, son "mur" de guitares rappelant les Suisses de SHAKRA. Et SHYLOCK de proposer de véritables pépites Hard Rock à de nombreuses reprises sur cet album, entre le Modern-Rock de "Bridges" et ses riffs plaqués, "What It Takes" qui rappelle à nouveau les Suisses précités, l'énergie brute de décoffrage de "Sad To Know" ou "Sliding Through Emotion" (quelle performance vocale!). Exempt de toute ballade, "Walking Tall" est un album qui ne prend le temps de souffler qu'en de rares occasions, mais séduit justement par sa capacité à convaincre et se faire varié sans faire pour autant de concessions. Seul le titre final, aux allures de fausse power ballade, se fait légèrement plus posé, et aurait pu être un single multi-platine si seulement il avait été interprété par BON JOVI.

Pour la première fois, SHYLOCK confirme le diction "Plus c'est long plus c'est bon" grâce à son sixième album qui, s'il ne changera en aucun cas son statut d'éternel espoir, aura des allures de belle récompense pour tous les amateurs qui suivent la carrière du groupe depuis de nombreuses années. Un album dantesque à mettre entre toutes les mains.