Cette manie et ce talent des Suédois pour l'imitation. Quitte à paraître un peu simplet et philosophie de comptoir, nos collègues nordiques sont sans doute d'encore meilleurs faussaires que les Chinois. C'est en tout cas clairement le cas pour la musique psychédélique, baignée dans le crépuscule des années 60 et l'émergence du Heavy Metal sous les doigts blessés de Tony Iommi.

BLUES PILLS, AVATARIUM et maintenant SPIRAL SKIES. Les groupes aux chanteuses magnétiques façon HAWKWIND ou JEFFERSON AIRPLANE semblent inspirer grandement les Suédois. On pourrait bien sûr également citer HEART, mais le psychédélisme suintant chez SPIRAL SKIES évoque assez directement Grace Slick, bien qu'Ann Wilson ne soit pas très loin ("The Prisoner"). Dans ce revival '70, rarement on a autant travaillé sur le jeu et les riffs de Tony Iommi. Et même si le groupe ne rechigne jamais à développer son approche, utilisant à bon escient respirations, harmonies de guitare, c'est au sein de BLACK SABBATH que se nourrit aussi SPIRAL SKIES.

Les groupes pour lesquels le poids de l'héritage semble être aussi imposant me posent toujours un problème par principe. Mais il faut avouer que la fusion avec le psychédélisme hypnotique de JEFFERSON AIRPLANE n'avait pas encore été tenté à ma connaissance. Le succès de la Soul contenue dans l'expression d'Elin Larsson avec BLUES PILLS a donc fait date, et le chant de Frida Eurenius joue énormément dans le côté hypnotique de "Blues For A Dying Planet" et en constitue sans aucun doute l'un des meilleurs attraits. Quel bonheur de ne pas avoir à se poser la question de savoir si la demoiselle a été ou non choisie pour son joli minois !

Mais le quartette derrière elle connaît bien ses gammes, et on ne perd jamais cette patine vintage si prisée actuellement, mais qui sera gage d'une certaine aptitude à traverser le temps. Les compositions sont plutôt recherchées dans l'ensemble, même si les premiers a priori ont plutôt tendance à nous laisser sur la défensive. Mais les choses démarrent sérieusement dès "The Wizard's Ball", théâtral, où les guitares se lovent comme des boas aux bras d'une beauté plantureuse et dénudée, à la fois hypersexuée et venimeuse, dans un shamanique nuage de vapeurs plus ou moins désinhibitrices. L'ambiance de ce disque n'est pas franchement poussiéreuse ni terreuse, elle est plutôt moite, les effluves d'odeurs mêlées de marijuana et de fleurs exotiques dans un concert d'incantations habitées de cette excellente émule de Grace.

Si ce côté JEFFERSON AIRPLANE peut paraître parfois envahissant, il est assez original appliqué à un Heavy Metal pas aussi SABBATH-ien qu'il paraît, malgré des œillades parfois poussées au géant anglais ("Dark Side Of The Cross", "Labyrinth Of The Mind"). SPIRAL SKIES propose une musique qui se ressent autant qu'elle s'écoute, "Blues For A Dying Planet" étant étrangement un album qui fait beaucoup de bien malgré ses thèmes plutôt torturés. Pas encore assez exceptionnel à mon goût, mais c'est incontestablement une belle surprise ; BLUES PILLS n'avait pas frappé aussi fort musicalement au départ selon moi, donc on peut s'attendre à ce que SPIRAL SKIES vienne le titiller assez rapidement.