Froissements de tissu. Souffle court d'un lascar dans l'oreille. Echo de matraques qui s'entrechoquent contre les murs étroits des ruelles obscures. Réverbérations des bruits de pas de course des flics, sifflet aux lèvres. Ce genre de soirée qui tourne mal. Ed' qui fait un pas de travers, le couteau glisse, et les gyrophares s'affolent. Le surnombre des forces de l'ordre force la fuite. Repli dans les passages et allées de la ville endormie qui finira bientôt par accourir aux fenêtres, affolée.

Le bave sortant de la gueule par fin filets, s'attachant sporadiquement contre le pull. Le souffle lourd que l'on tente de maitriser. Garder son calme. Surtout garder son calme. Les balles sifflent aux oreilles. Les foulées se font de plus en plus grandes, les mains jouent habilement avec les rebords et les coins de murs, laissant des bouts de peau au passage. On a vécu pire, demain tout ira mieux. Échapper est la première des priorités. Courir. S'enfuir. Ces enflures de flics ne nous auront pas. Quatre contre dix, on ne peut rien faire. Quel con ce Ed'. Alors on court, le pull au vent, la capuche sur le visage.

Alertes, nous sommes les rois de ces rues. C'est notre quartier, notre sang. Ces ruelles et impasses sont nos veines, nous les connaissons comme nos poches. Petites planques, impasses et raccourcis, nous maitrisons les lieux. Ne pas paniquer. Les reflets bleus et rouges continuent d'éclairer nos destinations, les sifflets des agents se font de plus en plus insistants. Une odeur de vieilles briques, de poussière et de rance emplit nos narines. Nos mains s'écorchent de plus en plus contre ces murs grumeleux, une trainée de sang finit par recouvrir nos paumes. Au dessus de nos têtes, des panneaux néon s'allument sur notre passage. "BREACH is the King !". "We believe in UNSANE". "CULT OF LUNA will show you the path to eternity".

Nos barbes commencent à perler. Nous en avons semé déjà un bon paquet. Il est temps de faire un détour par la piaule. Redescente dans la rue. Froissements de tissu. On remet la capuche sur le crâne. Les échos de nos battes contre les poteaux en fer se font pressants. Les tempes battent. Au détour d'une allée nous entonnons un chant. Arrivés sur le boulevard. Silence. "Permission To Engage" ? Nous revoilà sur le devant de la scène. Poussiéreux, puants, les mains serrées sur nos armes et notre enseigne sur le torse. Satan. The Almighty Baphomet. Le seul qui compte sur cette Terre. Sortez les chars à son enseigne. Plus de loi, plus de maître. La nuit nous appartiens, nous, amoureux du vice et chahuteurs du clair de lune.

La ville est à nous maintenant. Nous écrasons sans ménagement les limiers qui s'étaient perdus dans les venelles de notre royaume. Coups secs qui soulèvent ça et là la masse de poussière qui habite notre environnement. Ville en hibernation. Ville morte. Ville amorphe. Avariée. Corrompue par le vice. Des p'tits culs font le trottoirs. Emotions passées on se ferait bien un petit plaisir. Balle perdue. Rob' tombe à Terre. En l'espace de deux secondes ils ont signés leur arrêt de mort. En l'espace de deux minutes il n'en reste plus qu'un. Le tueur. Tête contre le trottoir, les narines dans la pisse d'une clochard, on lui apprend la vie, le bastonne à la batte et le jette dans le caniveau. Froid. Un chouette type ce Rob'. Les nanas chantent une chanson avec nous. Au revoir Rob'. Le jour se lève. Demain soir ne sera pas pareil. Mais tu peux compter sur nous pour continuer de faire notre boulot. Botter des culs. Consentants ou non. On a toujours la permission.


We curse you fucker, we curse you.