"Les rois du horror-punk sont de retour", peut-on lire sur le dossier de presse qui accompagne ce nouvel et cinquième album des Allemands de THE OTHER. Première étape : potasser son petit Robert (Trujillo) illustré pour prendre la pleine mesure de cette assertion. Horror punk : "style de musique qui mélange les sonorités du punk-rock avec une imagerie sombre inspiré des films d'horreur"*. Soit. Nous sommes donc en présence, si l'on en croit cette définition, d'un petit groupe de geeks amateurs des films d'Ed Wood et de Christopher Lee, et qui adulent les Misfits et Danzig. L'évocation visuelle nous laisse imaginer une gentille bande de boutonneux aux cheveux gras, qui ont ressorti l'ampli de papa pour grattouiller la guitare entre le visionnage de deux films dont le titre contient nécessairement la mention "Of the dead".

Grosse erreur. Tout d'abord parce que les membres de THE OTHER ont tous la trentaine bien tassée et n'ont plus de problèmes d'acné, mais aussi, et ce ne sera pas là la première fois, parce que l'étiquette ne correspond pas du tout au produit. Certes, les Allemands aiment se grimer en zombies ou en mutants, et abusent des codes visuels inhérents aux séries B gores, mais le rapprochement s'arrêtera là. Car si, dans sa "jeunesse", la musique du groupe se rapprochait d'un punk à la manière des Misfits, "The Devils You Know" œuvre pour sa part dans un rock/metal polissé et parfaitement calibré. C'est bien simple, si certaines réminiscences punk se laissent entendre (le riff de "In The Shadows"), on pense bien plus souvent à VOLBEAT ou à POWERWOLF à l'écoute de cet album.

La première influence se manifeste principalement dans cette opposition entre riffs enragés et chant posé, doté d'un feeling rock immense. "Take You Down" et "Skeletons In The Closet" idéalement placés en début d'album pour marquer les esprits, auraient pu sans problème faire partie du répertoire du groupe Danois. Ces deux boulets de canon, ébouriffants d'inspiration et de maîtrise, mêlent par ailleurs parfaitement la facette la plus mordante d'un hard rock énergique et des influences pop (notamment les chœurs) parfaitement diffusées sur les refrains imparables. L'intérêt est limité dans la durée, mais sur le moment, THE OTHER subjugue par sa conviction et sa capacité à proposer des titres qui font mouche dès la première écoute.

C'est toujours cette voix, solennelle et grandiloquente, qui évoque cette fois POWERWOLF, comme sur ce "Nice Day For A Funeral" dont le refrain opératique rappelle l'univers de leurs compatriotes allemands. La mélodie, une pièce essentielle de cet album de THE OTHER qui frappe juste à de nombreuses reprises n'hésitant pas à flatter les bas instincts de l'auditeur, les riffs plaqués et les refrains très évidents faisant de cet album un opus très facile à appréhender et assimiler. Jouant régulièrement la carte de l'humour, le groupe n'hésite pourtant pas à tisser des toiles plus sombres et complexes, à l'image de "Puppet On A String", titre à tiroirs aux ambiances hard rock prononcées, ou "Hell Os A Place On Earth", dont les flamboyances heavy metal alternent avec des passages plombés, à la limite du Doom.

Varié, cet album de THE OTHER propose même en guise de conclusion une power-ballad interprétée en allemand ("Ewigkeit"), un exercice auquel le groupe se frotte sans s'y piquer. Au final, seule la durée trop longue de l'album, synonyme de la présence de quelques titres de remplissage, nuit à l'impact d'un opus dont l'accessibilité devrait, paradoxalement, rebuter les férus d'horror-punk. Une curiosité sympathique, dont l'intérêt au-delà d'une dizaine d'écoutes reste néanmoins à prouver.

* : d'après Wikipédia.