Et si le Metal Prog s'acoquinait avec le Metalcore ? Et si une musique complexe pouvait charmer toutes les fibres de notre être tout en demeurant violente ? Et si on écoutait un peu de THE HUMAN ABSTRACT pour faire changement ?

Pour ceux qui connaissent le combo américain, "Digital Veil" marque le retour du guitariste d'origine du groupe, A.J. Minette. Non, vous ne rêvez pas, mais ne vous inquiétez pas, il branle son manche comme un matou et joue du piano comme un chef après avoir terminé ses études en musique classique lors des dernières années. Ce troisième skeud est aussi le tremplin d'un nouveau chanteur, le très versatile Travis Richter, dont les cordes vocales couvrent une palette assez impressionnante merci. L'idéal pour un Metal Prog de cette teneur, oscillant entre passages musclés et célestes, touchants et agressants. THE HUMAN ABSTRACT, à cause de cela, pourrait bien figurer sur une affiche de festival Death mélo et assurément Metalcore, car malgré son côté « émotionnel » assez développé (comme la majorité des groupes Core), il est un petit vicieux au penchant pour la technique et les mélodies syncopées archi développé.

Oui, THE HUMAN ABSTRACT est la formation à inviter pour prendre du riff incisif dans les dents et des masturbations techniques à la limite du trip d'acide spatial, mais c'est aussi une tendresse et un calme dans la tempête. Et ceci sans aucun doute grâce à l'apport de Dean Herrera et A.J. Minette (putain, ce nom !), dont les aérations, tant à la guitare sèche qu'au piano, s'accouplent à merveille avec la voix claire (la plus réussie) de Richter. "Elegiac" – curieuse intro, ayant pu officier aussi en tant que conclusion ! – en est le déclencheur avec ses mélodies lyriques et puissantes "Antebellum" en est le paroxysme et "Horizon To Zenith" la confirmation, avec leurs notes mélancoliques s'extirpant d'un épais brouillard, comme des gouttes de sang tachant une ouate. Une bien jolie tourmente pigeant des images dans des puits aussi abyssaux que le Doom mielleux peut en creuser.

Toutes les pépites dans le tamis sont brillantes. Juste assez expérimentales pour ne pas saouler ("Digital Veil", "Faust" et "Holographic Sight", qui est limite et me fait penser à ce que THE RINGS OF SATURN a chié l'an dernier), suffisamment groovy pour vous clouer à votre sofa et surtout, surtout, énormément charmeuses avec la « douceur » de ses atmosphères « hors-Core » et purement progressives. THE HUMAN ABSTRACT transpire aussi le Postcore quand il nous émeut de ses aigus et de ses nostalgiques envolées ("Elegiac", "Complex Terms", "Horizon To Zenith", "Patterns"), balançant parfaitement cet album.

Cet équilibre, jumelés à la qualité des compos, au courage de ces cinq types de se vider les tripes sur disque, font de "Digital Veil" un incontournable de ce début d'année, un must pour les fans de Prog autant que les inconditionnels de Death mélo et de Metalcore sans les grumeaux. L'art de donner mal à la tronche de la main gauche en tendant illico des cachets de la main droite.

Aucun point toutefois pour cette pochette affreuse censée nous projeter dans un monde virtuel. Dépêchez-vous de la chasser de votre esprit pour laisser toute la place à ce fantastique mélange d'influences. La modernité a encore frappé, mes amis, et avec classe s'il-vous-plaît !

Note : 4/5 pointant vers le haut...