J’aurais bien parié une bourse garnie d’écus sur WIZARDS, avec l’espoir optimiste d’engranger, sous peu, dix fois ma mise. La certitude de m’enrichir sur le dos des brésiliens avait commencé à me titiller après la sortie de "The Kingdom", quand WIZARDS se déhanchait sur le dancefloor du catalogue de Roadrunner Brésil et commençait à se faire un brin (épais) de notoriété au pays de la samba. Depuis, les choses ont changé. Beaucoup et finalement assez mal : "The Kingdom II" est sorti dans un anonymat de lettre diffamante et son successeur, dont il est ici question, est gracieusement offert en téléchargement, WIZARDS espérant que les conquis lui témoignent leur reconnaissance par une gentille donation paypalisée.

Chroniquer un album qui ne coûte pas un rond (on n’est pas tenu de rétribuer) confère un avantage inestimable : vous pouvez encenser comme il vous plait, personne n’ira vous percer de reproches quant à quelque menue monnaie éventée. Seulement, à l’endroit où la crédibilité du chroniqueur est précieusement conservée, un coup fatal pourra être porté par la poignée de lecteurs qui lui gardent une confiance intacte. Derrière la préciosité de cette phrase, vous aurez compris que se cachent quelques reproches. Mettons de côté la chronique débonnairement lâchée et attardons-nous sur une analyse plus juste : gratuit ou pas, "The Black Knight" ne tient pas toujours la route.

Vous connaissez ce genre d’albums, pour lesquels il faut forcer une écoute attentive pour en retenir quelque chose ? "The Black Knight", c’est un peu ça. Quand on se rend coupable d’une activité annexe, les mélodies semblent s’évaporer dans l’air avant d’avoir imprimé leur marque sur le cerveau tandis que lorsqu’on le parcourt avec une bonne dose d’assiduité, des plans allant du bon au très bon s’imposent efficacement.
Par exemple, le refrain fédérateur de "Shade Of A Ghost" (même si les chœurs en font parfois des caisses et malgré ces répétitions alourdissant le final), les lignes de chant montant en puissance et les orchestrations bien mises en valeur de "The Black Knight", les chœurs baroques à la DARK MOOR de "Yeshu’a Netsaret", l’ambiance théâtrale de "Inner Binding" (qui rappelle EVIL MASQUERADE, formation italienne appréciant de mettre en musique ses albums comme on met en scène une histoire) ou encore la ballade "Last, Oh Night", avec ses accents empruntés à QUEEN, le titre ne sombrant jamais dans la larmoyant, laissant à des passages plus solaires un peu d’espace. L’autre ballade, "P.S. I Miss You" manifeste une réussite nettement moindre, quant à elle. Le refrain y est agréable, mais le sucre dont elle est saupoudrée colle aux dents.

Sans retenir de titres résolument faiblards, l’enthousiasme suscité par "The Black Knight" demeure vacillant, la faute, je crois, à des passages qui sentent le renfermé tant les mélodies sont inspirées de compositions bâties avant elles. L’intro de "The Black Knight", quoique ce titre se montre prenant, est une juste illustration de la manière dont WIZARDS échoue à se forger une réelle identité. Alors que le groupe mené par le joli timbre de Christian Passos me poussait la sensation d’avoir toutes les cartes en main pour exploser et imposer sa marque, il montre en 2010 davantage de propensions à suivre des précurseurs notoires (ANGRA, DARK MOOR, notamment) plutôt qu’à frapper son album du sceau de l’originalité.

Deux constats à tirer, donc, deux angles d’attaque pour évoquer ce nouvel album des Brésiliens. L’un, plus global, qui met le doigt sur des lacunes d’ensemble, tirant certains titres vers une complaisance néfaste aux écoutes, l’autre, à l’avantage de WIZARDS, fait la lumière sur des passages intéressants, assez nombreux pour qu’on veuille bien s’attarder à les mentionner.
"The Black Knight" demeure un bon album, assez fidèle au travail passé de WIZARDS. Malgré une expérience conséquente et une adversité difficile à contrer, la formation conserve sa foi intacte et cela se ressent.

Note : 2,5 / 5