SOULGRIND est un de mes groupes de Gothique préférés. Finlandais injustement méconnu car noyé dans une gélatine de groupes vedettes, il contribue à faire survivre un style taxé d'ennuyeux car trop insipide et mou de la rotule. Et avec ses neuf albums, dont celui-ci, il a prouvé qu'on pouvait jouer du Gothique sans se péter la honte du siècle, en jumelant voix féminine et masculine, grosses guitares death/black, synthé caméléon et accessibilité. Le parfait compromis entre la brutalité et les nappes vaporeuses du « Metal à fleurs ». Une recette qu'emploient plusieurs combos que j'affectionne, dont DIABULUS IN MUSICA est le dernier fleuron.

Ce qui rend aussi SOULGRIND intéressant est le genre de thèmes qu'il exploite. Pagan jusqu'au bout des ongles, sans être terreux, boisé ou occulte, il aborde un sujet que l'on associe d'habitude au Metal extrême ou folk, en y mettant une touche plus noire que la normale en Gothique. En résulte une profondeur peu commune dans ce genre, qui elle, débouche sur une palette bigarrée de sonorités et de rythmes. "The Origins Of The Paganblood" est l'une de ces galeries aux multiples facettes. Une sorte de galerie très « people », un peu underground et foutrement surprenante.

Il offre aux visiteurs une semi-balade à la limite d'être jouée en fin de soirée dans des bars rock miteux ("Autumn"), de longues pièces aux harmonies bizarres qui ne semblent pas coller ensemble, mais qui au final, nous font passer un bon moment ("The Tree Of Life" et son intro psyché, "Flesh Marionette"), des mixtures d'influences épiques et de pop aux mélodies et refrains assimilables en moins de deux secondes ("The Valley", "Northlander", "Paganblood", "Circle Of Pain & Glory"), ainsi que des curiosités intégrales ("When Those Nights Have Circled Over" et "The Watchful Eye & The Old Way", dont le refrain me laisse pantois et "Red River").

Au bout de plusieurs visites, il est évident qu'on ne tient pas là un album de Gothique conventionnel, bien que l'équilibre entre trucs plus faciles et musclés soit respecté. On a l'impression que SOULGRIND a manqué d'idées à un certain moment, mais ce qui frappe le plus est cette atmosphère psyché qui flotte constamment, comme si on était incapable d'être confortable entièrement en écoutant "The Origins Of The Paganblood". Les influences sont si nombreuses et les flèches synthétiques et « guitaristiques » volent tellement dans tous les sens que tous nos standards s'en trouvent percés et remis en question. Cela peut être positif pour certains, alors que pour d'autres, SOULGRIND ne représentera jamais qu'un combo en constante recherche de sens. Sur le dernier skeud du groupe, je me retrouvais dans la première catégorie, mais pour celui-ci, je suis mitigé.

Ce qui tue encore un brin SOULGRIND, et qui le suivra toujours sans doute comme une ombre, est cette voix écorchée de mâle en rut, qui vient créer une méchante opposition avec Whisper Lilith, une des plus jolies voix féminines du Metal. Le chant d'Azhemin est trop « raw » pour rien, la musique de SOULGRIND ne s'y prête pas vraiment. Et incidemment, Lilith est sous-utilisée à mon sens ; même si on l'entend sur 90% des plages, elle est mise en valeur principalement sur les refrains. C'est là mon plus grand regret, car la Finlandaise a le don de venir me chercher avec ses cordes des plus originales.

"The Origins Of The Paganblood" est loin de la perfection et ne plaira qu'aux plus endurcis, tous styles confondus. Car passé "The Valley", "Northlander" et "Paganblood", il vous faudra de l'ouverture d'esprit pour survivre à cet étrange hommage à la nature…