C'est toujours intéressant d'écouter du Death de vétéran, toujours. Comparaisons, nostalgie, curiosité ironique, fanatisme, on se surprend toujours à respecter secrètement les vieux. Surtout quand ils assurent.

La musique de TRAUMA représente bien le titre de son 7e album : du Death typé Europe de l'Est, molosse et surproduit, qui ne peut mener que vers le chaos. Boum, merde, boum !!! Le genre de groupe qui part en tournée avec des voisins comme mes chouchous VADER ou VESANIA…. C'est pas de la tartiflette régime ça…

Sa provenance est donc facile à deviner, à moins de connaître que dalle en Metal polonais ; cette violente et froide acuité, cette manie d'occire sans laisser de traces, de frapper plus fort que tout le monde pour clamer son mal de vivre géopolitiquement légitimé. Ce gros son de dingo, cette batterie plus lourde que le Globe, cette voix gutturale, cette guitare nerveuse et polyvalente, toutes ces malversations envahissent l'espace pour inhiber tout sens de retenue. TRAUMA est un fier disciple du Death assassin, ce Death de « Natural Born Killer » qui déboulonne l'édifice le mieux structuré. Souffle atomique compris.

TRAUMA n'est pas né de la dernière truie (*), il sait exécuter, dans tous les sens du terme. Ses compos sont simplement construites : un gros coup de caisse, un riff aussi épais qu'un cuirassé et la machine s'empourpre vers les lignes ennemies avec ses bottes pleines de purin. Ses décharges sont colossales, ses tempos oppressants (même s'il aime bien s'ensevelir de Thrashs boueux lézardés de reverb' et de sprints plus rapidos lors des soli et des crises d'épilepsie du batteur), sa cicatrice studio parfaitement brodée. Bref, l'empreinte est profonde, ça châtie grave et les manettes sont huilées.

TRAUMA trouve même le moyen d'être original en imprégnant quelques lignes orientales dans son bourrinage. Notons celles de "Dying World" (très bonne plage au riff immanquable), "Destruction Of The Demented World" et de l'accrocheuse "The Truth Murder", basée sur cette classique et brûlante mélodie, qui cadre d'ailleurs très bien dans ce dédale d'acier. Les Polonais feraient-ils un clin d'œil à NILE par hasard ? Bah… Leurs compatriotes Death Technique de LOST SOUL (entre autres) ont bien chié une brique de cette teneur sur leur excellent dernier album, n'allons pas prophétiser des effusions d'amour ! Et que dire de BEHEMOTH ? Ils truffent leurs skeuds de ces accents étrangers ensoleillés ! Cette tendance est tellement répandue aujourd'hui que je viens à me demander quel sera le prochain combo à ne pas en disséminer ça et là…

Bon, ceci n'est pas un reproche adressé à TRAUMA, mais une parenthèse. Toutes les routes mènent à Rome est aussi vrai que tous les moyens sont bons pour le quatuor de péter les fusibles et de creuser la tombe de vos étriers, enclumes et marteaux. Certains sont assez perdus pour les catégoriser dans le Death Technique, alors imaginez… Pour ma part, TRAUMA est juste un ardent prédateur Deatheux qui est à flatter avec précaution. Surtout sur "Cortex Deformation", "War Machine" ou sur le refrain malsain de "Portrait Of The Lies".

Sec, impeccable, pesant, l'art de TRAUMA est reconnaissable. Accessibles mais somme toute assez portés sur les expérimentations contrôlées, les Polonais infligent une autre leçon de Metal au reste du monde. Quant à la place qu'occupera "Archetype Of Chaos" dans sa discographie, il semblerait que TRAUMA soit « condamné » à enregistrer des albums solides et imparfaits. Car n'allons pas se le cacher, celui-ci perd quelques plumes de titane vers la fin… On peine à reconnaître le pêchu du début, avec cet enchaînement de tubes jusqu'à "The Truth Murder".

Allez, un gros 3,5 arrondi vers le bas pour nos vétérans qu'on aime écouter !

(*) Bonne vieille farce d'un duo d'humoristes québécois : Les Grandes Gueules. Quand un des deux lance cette tirade pour dire à son complice qu'il n'est pas né d'hier, l'autre rétorque : tu veux dire que tu n'es pas né de la dernière pluie ? Le connard de répondre : « Parle pas de ma mère comme ça ! »