Après avoir roulé pas mal sa bosse depuis sa création en 1996 à Ankara, capitale turque, THE SARCOPHAGUS sortait en novembre 2009 son premier album. La Turquie n'étant pas vraiment la nation où le Metal est le style de musique le plus prolifique, le groupe faisait jaser de lui en ne sortant que des démos ou des EP. De quoi penser que lorsqu'enfin, le groupe se déciderait à gravir les échelons de la hiérarchie discographique, les fans se rueraient sur le tant attendu et béni album de ce quatuor Black pestilentiel. Et force est d'admettre que les amateurs n'auront pas été patients pour rien, car la production de "Towards The Eternal Chaos" est à la hauteur de son interprétation.

Disons premièrement que THE SARCOPHAGUS a eu la brillante idée, pour chasser les 13 ans qui séparent sa naissance de son « vrai accouchement », d'engager un frontman vedette de l'underground pour mousser ses chances de « popularité » et surtout, améliorer sa qualité. Il s'agit de Niklas "Kvarforth" Olsson, leader incontesté d'un de mes groupes préférés (autant l'avouer impudiquement), SHINING. Ses râles, grognements et hurlements suicidaires, ses compositions poignantes et transcendantes seront toujours gravées dans mon humble cerveau et cœur métallique jusqu'à ce que mort s'ensuive.

Donc, imaginons maintenant Kvaforth sans ses marionnettes dégourdies lui servant à exposer la détresse de l'âme humaine dans toute sa noirceur… Que fait-il ? Il vomit comme d'habitude les paroles, qui deviennent des lames contaminées dans ce sarcophage monstrueux où la double et les guitares un peu en retrait forment les battements de cœur d'un univers qui s'effrite sous les vociférations du maître de piste. Mais ne soyez pas inquiet, l'ombre de SHINING ou de DEN SAAKALDTE ne plombe pas sur THE SARCOPHAGUS, combo à part entière fier finalement d'éructer sa joie de vivre… pour mieux prôner l'annihilation de la race humaine.

Des couleurs dans cette grisaille ? Un peu de clavier vient parfois rehausser la démoniaque ascension des plages sanglantes de ce "Towards The Eternal Chaos". Un royaume de la peur, où le souffre est oxygène et où les trémolos se confondent avec la respiration d'êtres et créatures non recommandables. Citons seulement les dragons anatoliens ou ces bons vieux démons, qui viennent se vautrer dans un théâtre érigé à l'aide d'os et de misanthropie, de rapidité et de pouvoirs occultes. Ça tourne rondement dans ce tombeau où les morts fouettent les vivants, l'efficacité d'un "The Legend Sleeps Behind The Mountains", "Anatolian Dragons" ou d'un "Nothingness, Emptiness, Chaos" ne ment pas. THE SARCOPHAGUS a sa place dans l'arène avec les autres monstres de son espèce sans rougir.

Et il y a d'autres curiosités que Kvaforth sur l'opus, les Turcs sont d'élégants frotteurs au rythme effréné et permettront peut-être à leur contrée d'avoir enfin une petite lueur de projecteur… Ah si, y a un paquet de groupes provenant de ce charmant coin de pays, mais combien sont reconnus ? Combien ont su user de stratagèmes et d'une telle fureur pour sortir de l'ombre, tous fers dehors ?

Avec cet album, THE SARCOPHAGUS prouve non seulement que la patience est la mère de toutes les vertus, mais qu'on peut encore produire du Black de qualité aux inconditionnels légèrement blasés. Avec son caractère imbibé de vieil alcool, de par la saturation minimale de ses instruments, son superbe chanteur et son talent pour les mélodies perdues dans une encombrante ambiance mortelle du début à la fin, il ne vole pas sa place parmi les « bons » groupes modernes lorgnant vers le Black classique.

3,5/5.