Un album que j’ai écouté, réécouté, sans réussir à avoir d’avis tranché à son sujet. Est-il excellent ? Est-il simplement bon ? Question épineuse pour moi, mais pas pour vous, lecteurs qui avez vu la note. Je vous prie donc de bien vouloir jouer le jeu le temps de quelques arrachages de cheveux.

ARTHEMESIA, groupe finlandais, s’était déjà fendu d’un album très solide, "Devs Iratvs", en 2001. Huit ans séparent les deux offrandes de la formation nordique, qui a entre-temps subi de nombreux remaniements, le chanteur, Valtias restant seul maître à bord et unique rescapé de "Devs Iratvs".

De cette longue attente ressort une volonté palpable d’en mettre plein la vue, au moyen d’une pochette très réussie, d’un son impeccable et de titres à rallonge. Le groupe ose même une longue introduction atmosphérique composée majoritairement de silence, exercice risqué car appelant fatalement une première chanson irréprochable. Et c’est le cas. "Valkoinen Susi" (loup blanc, en finnois), est une chanson remarquable, qui n’a pas peur d’afficher elle aussi une longue introduction de plus de deux minutes trente. La machine de guerre d’ARTHEMESIA se déploie alors et ne déçoit pas, riche, puissante et variée. Une réussite.

Tiens, la seconde piste joue elle aussi à se faire désirer. Plus de trois minutes, cette fois. On se demande à quoi ARTHEMESIA peut bien jouer. Puis vient cette déferlante, ce riff hypnotique accompagné de cloches, qui sera répété tout au long du morceau. De la répétition, à présent ? Encore un exercice risqué ! Mais le groupe nargue une fois de plus son entourage et livre une chanson envoûtante au possible. Tant de maîtrise, c’en est presque agaçant.

Ah ! On se défile ! Je veux bien sûr parler d’"a.O.a." et de "The Noble Elements" qui optent cette fois pour une attaque directe. Je viens d’ailleurs de relire ma chronique du premier album, où je critiquais les lignes de chant un tantinet linéaire. Ici, force est de constater qu’il est varié et toujours réussi. Râles, chœurs guerriers, chuchotements, tout y est. Les chansons de "Devs Iratvs" manquaient parfois de volume, de longueur. Ici, ARTHEMESIA a considérablement enrichi sa recette, même si les mauvaises langues diront qu’avec tant de silences, ce n’est pas bien difficile. Et ils auront tort. En bref, si on aurait préféré attendre moins longtemps, certains groupes à la productivité frénétique feraient bien d’en prendre de la graine : une longue maturation peut être profitable.

Difficile de reprocher quoi que ce soit à la démarche d’ARTHEMESIA, si ce n’est peut-être son occultisme grand-guignolesque qui ne dérangera que les plus extrémistes des blackeux, lesquels profiteront de leur droit de parole pour dénoncer l’emploi massif de claviers. Encore une fois, ce ne serait que pure calomnie, tant l’équilibre entre claviers atmosphériques et guitares inspirées est appréciable. On sent un groupe sûr de lui, assez mûr pour réemployer sans rougir un style qui a fait ses preuves tout en lui adjoignant une touche personnelle. "Liber Omega", titre de clôture très dense, ouvre le champagne et invite un saxophoniste à la fête. Une véritable orgie sonore qui se termine dans ce qu’on imagine être une explosion atomique. Charmant.

Décidément, ARTHEMESIA s’est bien foutu de nous. Du silence, des répétitions de l’ésotérisme gentillet (un message inversé se trouve même dans l’album, saurez-vous le retrouver ?), mais surtout un album de grande classe. J’adhère et je sanctionne cette réussite.