Avant de nous pondre un des albums de Black Sympho les plus fantasmagoriques de la courte histoire du genre ("The Nightmarish Comparisons", en 2006), BISHOP OF HEXEN n'avait pas vraiment eu la main heureuse, ou refusait de produire des albums en quantité industrielle comme les vedettes du «mouvement crado-sympho». Il a cependant pu sortir au grand jour "Archives Of An Enchanted Philosophy", neuf ans avant son chef-d'œuvre, afin de se faire les dents sur un os mâchouillé par des dizaines de formations toutes plus «ténébreuses» les unes que les autres.

Une intro bien poétique au clavier ouvre ce bal bigarré, suivi d'une des scènes de bataille à cheval les plus saisissantes qui ait été gravée sur une galette métallique. Alors là, on est en droit d'avoir de hautes attentes, style « gros album planant de Black guerrier », mais on peut aussi utiliser son expérience d'auditeur déçu à bon escient et ne pas grimper sur ses propres grands chevaux. Stratégie malheureusement essentielle avec ce premier effort des Israéliens.

Pourquoi adopter un air si « bof » ? Car la qualité de cet album est juste correcte. Pour faciliter la tâche aux amateurs qui ont un mal incroyable (avec raison) à différencier telle ou telle entité noire et sympho, "Archives Of An Enchanted Philosophy" a la facture d'un HECATE ENTHRONED et d'un OBTAINED ENSLAVEMENT. Balzamon rappelle l'époque pas si lointaine où presque tous les chantres de Black Sympho chantaient comme des corneilles pires que Dani Filth (faut le faire). Sa voix est parfois claire et trop souvent « absurdement non effrayante », surtout quand elle souffle un râle pestilentiel pseudo démoniaque. Ah oui, vous savez de quoi je parle !

Les guitares sont quasi inaudibles (quand elles le sont, on aurait mieux aimé ne pas les entendre !) dans ce dédale de clavecin et de synthé maniés de main de maître par Dimrost, qui s'est toujours accaparé le devant de la scène de BISHOP OF HEXEN, à l'instar de bien des claviéristes de ce type de musique lente et hypnotique. Les quelques samples classiques (hurlements, craquements, tonnerre, vent) viennent s'ajouter aux atmosphères cauchemardesques – mais pas épiques comme l'intro nous l'avait fait croire – dont il habille chacun des contes maléfiques de cet ouvrage peu connu.

Et quand je dis « conte », je ne déconne pas. Les nombreuses paroles tirées de légendes, véridiques ou non, sont narrées la majorité du temps sur des tempos archi lents, près de la prière. De sorte que si vous n'embarquez pas tout de go dans le monde insolite et poussiéreux des Israéliens, ce batteur et ce power-trip de clavier risquent de vous ennuyer ferme. A contrario, si ce type de manifestation fantomatique ne vous déplaît pas, que des bridges de deux-trois minutes, où les fûts sortis des boules à mites ont peine à appuyer la touche angélique de Dimrost, ne vous rebutent pas, alors foncez sur cet album. Il complètera bien votre collection 1997, comptant déjà d'autres gemmes obscures taillées par, notamment, TARTAROS, THY SERPENT et BLOODTHORN.

"Archives Of An Enchanted Philosophy" est donc un de ces albums qui s'écoute en boucle, sans qu'un titre en particulier ne perce sa muraille. Il était un bon indicateur de ce que le groupe était capable ; nous aurons la réponse neuf printemps plus tard, avec notamment un meilleur chanteur et une production monstre comparativement à cet album assez vulnérable. Écoutable, ça oui, mais pas vénérable.