Certaines choses sont inexplicables dans la vie et d'autres sont souhaitables. Moi, par exemple, je souhaitais me réconcilier avec le Death Mélo après une désillusion totale imputable à un surplus de confiance en IN FLAMES ou DARK TRANQUILLITY, deux groupes faisant bander une large couronne de gens. Pas moi. Je restais mou comme de la guimauve. Alors je suis allé voir ailleurs, j'ai fait mon indépendant borné, jusqu'à ce que je rencontre MA perle de Death Mélo, j'ai nommé THE ARCANE ORDER, découvert grâce à leur deuxième méfait, "In The Wake Of Collisions". Illumination. Langue qui traîne au sol. Tronche qui crépite. Tout ça.

Caractéristiques du pétard : Danoise, belle comme un cœur, grande, plantureuse, séduisante, cliché sur deux pattes, donc. Mais pas stéréotypée tant que ça ; elle ne se laisse pas allonger facilement, la tigresse nordique : elle griffe, mord et détonne à chaque fois qu'on ose remettre ses qualités et son intelligence en question ! Chose à ne pas faire avec ce jeune groupe appelé déjà à devenir culte. C'est rare que je dis ça, je déteste ce terme massacré qu'est « culte », mais THE ARCANE ORDER a un pouvoir extraordinaire et fait mouche à tous les coups. Je ne connais pas de formations aussi efficaces en Death Mélo, aucune nouvelle entité ne faisant autant l'unanimité dans ce style au sein de la presse métallique. La planète est sur le cul et aux pieds de ces prodiges. Et cela après deux albums, pas six, deux.

Pas étonnant quand on est témoin d'une production aussi balaise. Les Danois jouent un Death Mélo boursoufflé : batterie galopante aux descentes constantes, riffs machiavéliques aussi tueurs qu'une décharge de 300 volts, cognements de basse défonce-tympan, le tout agrémenté d'un chant mordant, fort plaisant et bien dosé. La surenchère est inutile avec un tel arsenal musical, pas besoin de pousser la note trop haut, Kasper Thomsen n'a qu'à laisser ses potes massacrer les amplificateurs ! Merde que ça déménage ce groupe, c'est dingue. Tel que l'indique le titre de ce premier album, le quatuor (pouvant compter sur l'habile Kim Olesen pour assurer le synthé en studio), est une machinerie de l'oubli : avec ces neuf plages, plus une courte intro, vous oublierez même que vous avez des emmerdes d'argent ou de dédoublement de personnalité et que 2012 approche. Je parle du film là, pas de la supposée fin du monde, blablabla, conneries…

THE ARCANE ORDER est lourd mais pas lourdaud. En ogre impitoyable qu'il est, il dévore les charges les plus cinglantes des pointures Death speedées comme ARCH ENEMY ou sympathiques comme MERCENARY. THE ARCANE ORDER est un condensé génétiquement modifié des légendes de la gratte démolisseuse. Ses membres sont ouverts d'esprit et subliment leurs nombreuses influences, qu'elles soient Doom ou Thrash. Cela explique leur goût pour la mélodie belliqueuse aux couleurs chamarrées de titre en titre. THE ARCANE ORDER c'est le « grand cru rêvé » de la récolte : le nectar embouteillé en petite quantité et vendu trois fois le prix pour sa qualité supérieure comparativement au reste de la cuvée (i.e. ses plus proches poursuivants en Death Mélo). Sauf que son prix est le même que les autres laidrons qui ne s'approcheront jamais à un mètre.

Je suis rarement aussi enthousiaste envers une formation, étant d'habitude juste avec les groupes qui bûchent fort et sévère avec ceux qui méritent des baffes. Mais là, je ne suis d'aucune utilité dans le rayon « pesons le pour et le contre », car THE ARCANE ORDER me déchiquète la silhouette sans défaut. Je hais me sentir obligé d'être impressionné ; pourtant, je n'ai d'autre choix de dire que "The Machinery Of Oblivion" et son grand frère, "In The Wake Of Collisions", sont des bombes à neutrons que j'adore recevoir dans la nuque. Tous les morceaux anéantissent en un souffle atomique de 48 minutes.

Encore victimes de l'inconnu, les Danois sont une collision supérieure avec une volée de balles mortelles, des serviteurs assoiffés de sang d'une société imbibée de noirceur, respirant le poison de leur anathème, espérant brûler dans les flammes de la libération et enfin, fracasser leur bulle de folie avec ruse. Oui, mes chers amis, je viens de résumer le listing de cet album en une phrase hasardeuse ; promis, je ne le referai plus.

Par contre, vous, vous n'êtes pas près d'oublier ce que vous entendrez et prierez pour que THE ARCANE ORDER vive 100 ans. Promesse d'ivrogne.