La particularité du groupe DOLORIAN est de proposer un Black Metal au son non saturé privilégiant quelques notes souvent claires (entendez par là sans distorsion des guitares). Voix de circonstance et bien dans le ton mais avec un tempo de plus en plus lent: chuchotements, textes déclamés distinctement. Pratiquement, nous restons dans la musique d’ambiance. Je serais d’ailleurs curieux de savoir ce que cela pourrait donner en concert. Mais bon, c’est peut-être pas le but non plus.

Cet album pourrait constituer la vision d’un paysage où seule la solitude dérive parmi des ambiances austères. Y'a qu’à parcourir le livret pour découvrir des photos très artistiques, jouant sur les couleurs et l’abstrait. Est-ce du sang, de l’eau qui bout, un lac pollué, avec aussi des clichés de forêts et couchers de soleil ? Scrutez la pochette : voyez-vous des plumes de pan qui entourent l’intérieur d’un crâne vide vu de haut ? C’est toutefois la vision que j’en ai, mais bon … Hé bien, la musique reste dans cette mouvance floue aussi. Certes, nous conviendrons tous qu’il s’agit bien de Black Metal avec fonds sonores classiques (écoulement d’eau, chaînes qui traînent sur le sol ainsi qu’un bon coup de blizzard de derrière les fagots !). Nous sommes proches du recueillement… à partir du moment où nous acceptons de rentrer dans cet univers. Parce que dans le cas contraire, "Voidwards" est beaucoup trop long et linéaire, pratiquement plat. Au contraire de son prédécesseur, "Dolorian", deuxième opus du groupe, qui savait insuffler cette fameuse atmosphère au teint glacial tout en finesse (arpèges principalement) sans pour autant s’éterniser et tourner en rond comme sur celui-ci.

Comme vous le constatez, "Voidwards" a au moins le mérite d’expérimenter le genre Black en repoussant les frontières à l’opposé de ce qui se fait d’habitude (exemple : toujours plus vite, toujours plus complexe ou au contraire tourner sur trois notes saturées).

De plus, DOLORIAN a voulu aussi intégrer une voix Death sur "Epoch of cyclosure", qui en fait un morceau proche du genre Funeral Doom. Ma foi, ça rentre parfaitement dans le concept de l'album. Cependant, si la recherche est d’étaler son humeur froide, glauque et à la limite de la dépression (ou de l'évasion, c'est selon), il n’en va pas de même pour l’inspiration.

Pour vous donner une idée de cet album, je dirais que l’écouter le soir sur le chemin du retour à la maison en roulant calmement vous apaisera ou, à tout le moins, vous fera décompresser d’une journée éreintante.

Alors, oui, je suis déçu de ce "Voidwards". Même si la démarche des musiciens me paraît sincère, seulement voilà, nous sommes les auditeurs et nous ressentons les choses. Malheureusement, ce n’est pas cet album de DOLORIAN que je vous proposerai pour partir à la découverte du groupe. Mais plutôt "Dolorian" si vous avez envie d’écouter du Black made in Grand Nord au relent d'arpèges diverses et de plages atmosphériques hypnotiques. Ou encore le premier CD intitulé "When all the laughter has gone" beaucoup plus Black dans les vocalises tout en restant du Black ambient mais avec un tel degré de froideur dans leurs compositions que j’en grelotte rien que d’y penser ! Ces deux albums, bien que du même groupe, sont suffisamment différents et c’est en ça que l’évolution de DOLORIAN est intéressante.

Je reste néanmoins attentif à l’évolution du style dolorianesque qui, il faut bien le reconnaître, leur est propre et, à cet égard, les distingue de la masse.