Il serait facile de résumer cette kro en dix mots : « Pas encore un groupe de Metal Gothique à voix féminine ? » Cependant, je ne le ferai pas, car CORONATUS a ses qualités. Ne serait-ce que la clarté de la musique et des voix des deux rossignols, qui, sans nous faire mouiller de plaisir, exhibent un bon divertissement. Oui, il y aura toujours un public pour ce genre de skeud et cette remarque n’a rien de désobligeant. Au contraire, on doit respecter et savoir apprécier ce qui fait bander les amants de cette musique à mi-chemin entre… allez, j’invente : entre l’opéra et le Power.

CORONATUS livre un opus plutôt long, surtout si on tombe sur la version spéciale boostée de deux titres, ce qui porte le total à 13. Pour les fans de Goth, c’est le paradis sur Terre, pour les autres, dont moi, ça tourne en rond quelque peu…

Le mélange des voix, alternant entre l’anglais et l’allemand, est ce qui marque de prime abord sur ce deuxième album en deux ans des Allemands de Stuttgart. Le duo blond et noir, genre de yin et yang en bas résille, est d’ailleurs mis en évidence sur la pochette. La soprano Carmen R. Schäfer, qui partageait le micro avec Viola Schuch sur "Lux Noctis" l’an dernier, se retrouve ici avec Ada Flechtner, dont les cordes claires et innocentes viennent la frapper dans les flancs.

Plusieurs passages sont pénibles à entendre ("Beauty In Black"), l’osmose est difficile. On croit parfois assister à un combat de coq entre les deux chanteuses tant leurs registres sont antinomiques. Mais elles s’en tirent quand même pas mal quand Flechtner se contente d’occuper les back vocals. C’est quand leur voix sont simultanément hautes que les ulcères se pointent… Le genre de douleur sourde qu’on ressent à l’écoute de l’imbuvable "Volles Leben", croisement entre du New Wave et du Hard Rock.

Je ne m’attarderai pas davantage sur les deux nymphettes, car les vraies (rares) richesses de cet album se dénichent chez les quatre musiciens qui les accompagnent. Leurs influences sont diversifiées et se ressentent dans chacun des titres, ce qui sauve l’opus du naufrage. Les prouesses du claviériste Fabian Merkt sont particulièrement agréables à écouter ("Exitus"), qu’elles se mutent en cornemuse, en accordéon, en orgue ou en piano (la sirupeuse balade "In Your Hands"). Quand à la guitare de Jo Lang, elle fait son boulot en fouettant l’ensemble quand il sombre dans l’ennui ("Flos Obscura"), mais ne casse rien.

CORONATUS sait surprendre, donnons-lui ça. Le début de "Der Vierte Reiter", le très épique refrain de "Strahlendster Erster", le pont speed de "Beauty In Black", l’entraînante "Cast My Spell", valent qu’on s’y attarde.

Mis à part ces petits bonheurs, le combo ne peut éviter les clichés thématiques oscillant entre "cœur brisé" et "âme dévastée". On nous envoie donc la purée radiophonique sur "Fallen", titre deux fois trop long au squelette EVANESCENCEncien, et sur "In Silence", mixture certes appréciable mais rabâchée pour la millième fois. Et que dire de "Am Kreuz", boîte vide sans aucune substance…

"Porta Obscura", vous l’aurez compris, se taille une place dans la grande famille du Metal Gothique sans peine. Or, elle n’en sera pas le patriarche parce que si elle procure un plaisir certain (ou un certain plaisir), la galette ne régale pas les papilles de façon unanime. C’est ce qui arrive quand on sort deux albums en deux ans : manque de recul, on stagne et on regrette.

Et c’est quoi ce listing bizarre ?! Six titres en anglais suivis de quatre en allemand ? Une meilleure balance des deux cultures aurait été souhaitable, la variété n’ayant jamais tué personne…

Morceaux qui pourront intéresser la majorité : "Exitus", "Cast My Spell" et "Strahlendster Erster".