« J'élève un chant de mort sur ce qui va périr et face à nos régents de balle, face à nos imposteurs mitrés et face à nos savants, dont la plupart n'atteignent pas l'âge d'homme, moi, solitaire et méconnu, prophète de ma génération, muré dans le silence au lieu d'être brûlé, je les prononce, les paroles ineffables et que demain les jeunes gens répéteront en chœur (...). » (1)

* * *

Putain...
Merde !!!
Que dire d'autre ?
Car si vous cherchez un disque beau et sacrément noir, un Black Metal fascinant et horrifique, un album où Folie et Mal-être sont l'inspiration et l'expiration de leurs géniteurs, une Œuvre d'Art Noir enfin qui vous bouleversera et vous paraîtra autant humaine dans son expression qu'inhumaine dans son élaboration et bien, chers lecteurs et auditeurs... Death – Pierce Me de SILENCER est le joyau que vous cherchiez.

Rien que pour lui - à l'instar d' Einblick in Den Qualenfall de VERDUNKELN, Monotheist de CELTIC FROST, The Corpse of Rebirth d'A FOREST OF STARS, ou encore Two Hunters de WOLVES IN THE THRONE ROOM et Dödens Evangelium d'ONDSKAPT et quelques autres ! - le Black Metal se doit d'être vécu et investigué...

Death - Pierce Me de SILENCER est un disque de Black Metal un peu mythique. Ce groupe de Suédois fondé en 1995 a en effet rapidement splitté, une fois qu'il ait enregistré cet unique album et que son vocaliste, Nattramn, se soit fait interné pour quelques années en hôpital psychiatrique : quand vous entendrez comment il s'égosille dans Death - Pierce Me, vous aurez compris pourquoi ! Une grande partie de l'attrait du public Black Metal vient de cette « curiosité », les cris et leurs raisons. Une autre concerne la musique. Le Black Metal de SILENCER est à la hauteur des plus grands. Il rappelle ainsi un peu le BLUT AUS NORD des premières années des 2000, dans ses ambiances et ses lignes de guitare ritualistes. Death – Pierce Me fait la part belle aux ambiances dérangeantes, avec des riffs entêtants, hypnotiques, morbides... En somme, c'est un sacré bijou d'Art Noir que nous tenons là avec ce missile exemplaire sorti en 2001 chez Prophecy Productions.

Six longues pistes pour quarante-neuf minutes d'un Black Metal torturé, emmené dans une danse macabre par un vocaliste hors pair, l'un des meilleurs du genre - voilà ce que soumet à vos neurones Death – Pierce Me, expérience mystique et auditive en soi. Qu'il soit composé par Casado, ancien guitariste de SHINING, aidé à la batterie par Steve Wolz de BETHLEHEM qui assure à fond, explique déjà bien des choses. Le Black Metal torturé est une des marques de fabrique du combo suédois et de toute cette scène locale également, où traînent aussi les gars d'ONDSKAPT. La folie et son horreur transpirent de ce disque adûlé par les fans. C'est vrai que Death – Pierce Me est sacrément tordu, le rendant d'entrée difficile d'accès et à supporter. L'instable Nattramn, qui hurle avec hystérie son Enfer intérieur, module sa voix tel Mortuus (MARDUK) et gémit et dégueule et tousse, habitant physiquement de son être cette Œuvre incroyable comme ARTAUD habitait ses écrits. Si Leere/Casado a écrit avec magie Death – Pierce Me, Nattramn en a pris possession corps et âme et s'en est habillé : un fou jouant au fou pour les fous...

Death – Pierce Me dévoile trois aspects forts du Black Metal et cela même si la batterie est véloce une grande partie du temps : une grande mélancolie - une oppression intense - et une folie qui se niche dans les moindres recoins de votre matière grise. Et encore, je me rends compte comme il est vraiment dur de tout décrire de ce monstre musical. Il est intense, furieux, possédé, tendu, violent, noir, hypnotique, suffocant et inhumain. Il y a vraiment quelque chose d'inhumain, de carrément diabolique et infernal dans ce chef-d'œuvre. A bien y réfléchir, Death – Pierce Me fait peur et impressionne...
Je crois avoir tout dit. La citation en début de chronique doit également vous aider; si vous êtes ouvert à l'humain et à ce qui ne l'est pas ou plus; si tel l'un des personnages de Clive BARKER dans The Secret Show, vous lisez les signes et entre les lignes; si encore une toile de Paul STOREY peut vous envahir... Si encore les notions de folie et d'enfer et torture et diabolisme vous sont familières... Si... Si une part de votre Humanité n'est déjà plus humaine, alors aurez-vous alors, une chance de saisir cette expérience décrite avec génie par ces hommes silencieux de Suède...

Death – Pierce Me ne pouvait que marquer l'histoire du Black Metal et du metal extrême (http://www.myspace.com/silencerswe). Ce disque est une expérience rarissime, que tous ne pourront écouter et qui laisse une impression dérangeante, les boyaux se lovant tels des vipères... Vraiment impressionnant, totalement ensorcelant, Death – Pierce Me mérite amplement la note maximale. Gigantesque. Intemporel. Inoubliable.


(1) Albert CARACO, Bréviaire du Chaos, page 18, éditions l'Âge d'Homme, 1999.

PS : cette chronique est une demande d'un lecteur. Que Satan soit avec lui.