Ce n’est pas un secret, le posttrucbidule, c’est dans l’air du temps. Les styles entamés avec le mot post tournent à plein régime, je crois que personne n’a pu passer à côté du phénomène. Et si les piliers de la scène se comptent sur les doigts d’une main gauche amputée de trois doigts, je peux affirmer, qu’en 2005, la scène a vu l’émergence d’un nouveau poids lourd : ROSETTA. Le nom est peu bizarre et a plutôt tendance à me rappeler le saucisson lyonnais (oui bon bah ça va hein), mais il s’inspire directement du nom de la sonde spatiale. Cette explication me permettra alors naturellement d’embrayer sur la nature des textes : le voyage dans l’espace vu au travers d’un homme. Voyage agissant comme une échappatoire sur cet homme, tout comme sur le psychisme de l’auditeur, qui se retrouve projeté hors de son corps.

L’ombre planante d’ISIS se mêle à l’introspection de NEUROSIS. A l’instar de ces derniers, ils proposent un double album, dont le second volet est exclusivement composé de pistes ambiantes, à écouter seul ou en simultané avec le premier disque. Mais je reviendrai là-dessus un peu plus bas.
A nouveau, il faut admettre la comparaison, sauf que cette fois, il y a un MAIS. Un mais qui se définit par la régénération de leur son qui consolide fermement les influences, au lieu de les copier. Si les schémas des compositions sont connus, ils ont réussi à adapter les codes à leur style.

Balayé par le souffle d’une guitare saturée au possible, les quatre membres nous entraînent dans un périple aussi céleste que tellurique. La batterie, au jeu puissant et varié, se plie aux chutes vertigineuses, ne faisant que renforcer l’épaisseur d’un son résolument grésillant et massif. Les compositions s’emplissent, s’étirent jusqu’à finir leurs routes dans des explosions apocalyptiques qui ne manqueront pas de vous coller à votre siège (« Departure » ou l’incroyable « Europa »). La production, parfaitement adéquate, laisse tout l’espace nécessaire à chaque instrument de s’exprimer quand il le faut, évitant ainsi l’étranglement total. « Itinérant » est à ce titre, le paroxysme de cet album, mêlant piano, violon, et samples dans une douce symphonie cosmique sur une première partie, avant de se muer brutalement en un cri de désespoir profond et viscéral. Les américains ont su trouver le juste équilibre entre toute cette frange qui lorgne du côté des contrées aériennes, et celle plus lourde et abrasive qui préfère la note torturée aux excursions apaisées.
Assurément, ils ont su tirer la substantifique moelle du mouvement et en ont fait une pâte qu’ils ont modelée à leur image. Comme je l’ai dit plus haut, The Galilean Satellites est un double album. Le second volet est axé dans de l’ambient à l’ossature froide et pesante. En écoute seul, il vous fichera le cafard, mais combiné à l’autre disque, c’est une toute nouvelle relecture qui se dessine. Tout prend alors une dimension sonore supplémentaire, aboutissement de la dichotomie entre la lourdeur et la sensation d’une immatérialité presque irréelle.

Difficile de trouver ce qui ne colle pas dans ce disque. On peut admettre que ROSETTA garde des stigmates de ses influences, mais la force d’interprétation fait qu’on ne peut que s’incliner face au résultat. Une surprise évidente, puisqu’il s’agit ici de leur première galette. Et honnêtement, malgré les imperfections, ce premier essai est assurément un coup de maître.