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2003 Crise De Lucidité

EROS NECROPSIQUE - Crises De Lucidite (2003)
Par POSSOPO le 10 Avril 2004          Consultée 5160 fois

Ce disque est sorti il y déjà quelques mois et, malgré le fait que j’ai écouté et réécouté son contenu de nombreuses fois, je suis longtemps resté bloqué devant la page blanche. Comment démarrer cette chronique, que dire? Il reste toujours l’ultime recours, celui qui consiste à écrire que l’on ne trouve rien à écrire, un peu à la manière d’une auto-analyse de névrosé mais la lumière est finalement venu d’un film que je viens de revoir pour la troisième fois, Les Misérables. Parmi toutes les versions cinématographiques de l’œuvre de Victor Hugo figure celle de Robert Hossein, spécialiste de la théâtralisation outrancière. Si Lino Ventura joue son rôle de forçat au grand cœur à la perfection, si Michel Bouquet campe un Javert superbe de rigidité, la critique de cette adaptation est facile car le réalisateur tombe dans l’excès. Le soleil ne se levait-il donc jamais sous le règne de Louis-Philippe, comme condamné à s’effacer devant des nuages noirs et pluvieux? Les citoyens du royaume ne nettoyaient-ils donc jamais les carreaux de leurs fenêtres par crainte des représailles du syndicat de la suie?
Rarement un film aura aussi bien porté son nom, tout y est noir, triste et guenilleux.

Crises De Lucidité fait preuve de la même démesure. L’imagerie du groupe n’est pas en cause. Elle est tout à fait originale et ne mérite pas de trop virulentes critiques mais beaucoup pourront dire que cet aspect conceptuel masque une certaine faiblesse au niveau des compositions et que justement, la distorsion entre le soin apporté au visuel et au sonore est terriblement agaçante.

Car le long métrage de Robert Hossein utilise, certes, des ficelles au tirant énorme afin d’humidifier la rétine mais le résultat est convaincant. Au contraire, Crises De Lucidité connaît de nombreuses faiblesses rendant son écoute difficile (mais cela était peut-être voulu), fatigante (là encore, la question pourrait se poser) et pénible (le doute n’est à présent plus permis).

Beaucoup s’attacheraient à se moquer de l’inanité de paroles à la poésie nébuleuse. Je prendrai le parti de considérer qu’EROS NECROPSIQUE se veut plus troubadour que simple conteur et tenterai d’analyser sa musique en faisant abstraction de textes à l’opacité déroutante. Mon souci majeur est que les huit compositions de cet opus possèdent toutes une ossature similaire qui fait fi des plus simples techniques d’écriture pourtant éprouvées par nombre d’artistes. Un thème parfois inventif, défile pendant de longues minutes, tisse un voile grisâtre, instaure une atmosphère maussade et lancinante dont les rares tentatives de ponts et autres cassures, censés éveiller l’ouie, ne parviennent à s’extraire. L’impression finale est celle d’un fond musical manquant de relief et dont la langueur devient vite exaspérante, comme si cette toile n’était présente qu’en support de mots censés pimenter l’ensemble. Et voilà malheureusement qu’on en revient au problème des paroles que je me devais d’éviter.

Les idées existent mais elles se noient dans ce concept peut-être trop fort ou manquant de flexibilité. La mélodie aqueuse de la voix ne prend jamais son envol, la superbe introduction symphonique de reflets d’univers ne connaît aucune ramification et ces trop brèves étincelles se laissent étouffer par un organe féminin à l’omniprésence dérangeante et cette plainte masculine omnipotente.

Que Crises De Lucidité soit morose, taciturne, nauséeux, voire monotone et fatigant, soit, mais l’ouvrage est également pesant et laborieux au point d’en devenir inécoutable, un comble, et d’où se détache une terrible impression de ratage.

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