SUNBURST aura mis le temps pour accoucher de son second effort studio ! Huit ans tout de même après le déjà très bon et prometteur "Fragments Of Creation", revoici donc le quartet grec (même line-up qu’en 2016 !) avec un "Manifesto" qui a franchement de quoi séduire ! On savait évidemment les types bien occupés avec leurs autres groupes respectifs à côté, l’excellent Gus Drax officiant notamment comme guitariste rythmique chez les Thrashers de SUICIDAL ANGELS – album "Profane Prayer" sorti en mars 2024 - et BLACK FATE, et le vocaliste Vasilis Georgiou officiant lui aussi chez BLACK FATE formation qui a notamment publié un album en 2020 : "Ithaca". Vous pourrez donc comprendre que les types ont un peu trainé pour pondre le successeur de "Fragments Of Creation". Mais pas que… quand on voit la gueule de ce "Manifesto", on se dit que les types de SUNBURST ont peut-être mis le temps mais n'ont certainement pas chômé tant le résultat en valait la chandelle. Le produit dépasse toutes nos attentes, tant ce nouvel album est classieux. Et tuons le suspense de suite, "Manifesto" marque une nette évolution musicale par rapport à son prédécesseur.

"Manifesto" puise toujours ses influences dans les profondeurs du Power Metal, soyez rassurés, mais SUNBURST opte pour une direction littéralement plus Progressive par rapport à "Fragments Of Creation", tant et si bien que des compositions comme "The Flood" ou "Perpetual Descent" pourront même par endroits faire penser à un groupe comme DREAM THEATER que ce soit au niveau du jeu de batterie de l’ami Kostas Milonas (excellent batteur qu'on se le dise !) sur "Perpetual Descent" qui n’est pas sans rappeler l’époque "Images & Words", ou au niveau des claviers de Bob Katsionis (STRAY GODS) venu prêter main forte sur "Manifesto" ; sur "The Flood" notamment auxquels viennent même s’ajouter quelques judicieuses orchestrations et qui apportent davantage d'envergure, de grandiloquence et donnent une dimension quasi-symphonique inédite. Ces orchestrations restent, cela dit et sur le disque, assez discrètes (présentes sur trois titres uniquement), elles ne prennent jamais le dessus sur le reste. Mais elles permettent d’élargir un tant soit peu la palette sonore et ajouter de la richesse et un côté épique aux compositions concernées ("The Flood", "Hollow Lies", "Nocturne"). On y retrouve même par endroits une certaine dimension cinématographique (sur "Nocturne" notamment). Vous rajoutez à cela quelques beaux arrangements ("Nocturne"), de belles variations ("The Flood", "Nocturne"), des atmosphères planantes ("Nocturne", "The Flood") et de la finesse dans les mélodies et vous comprendrez là que "Manifesto" possède une belle et fière allure, ainsi qu'une certaine élégance.

SUNBURST ne nous balance plus forcément de titres « killers », un brin chaotiques (à la NEVERMORE), de la trempe par exemple d’un "Out Of The World" véloce comme rarement et présent sur le premier opus. Non, les Grecs se sont quelque peu assagis, privilégient davantage la finesse, l'éclat ("Nocturne", "The Flood"), et prennent davantage le temps de développer leurs idées. En effet, les compositions assez complexes ont plutôt tendance à traîner en longueur (aux alentours des six minutes, presque huit minutes pour "The Flood") mais restent rythmiquement parlant affûtées. Une certaine intensité se fait également sentir tant le contenu des morceaux est riche mais toujours cohérent. Cela n’empêche pas en tout cas la formation hellénique d'envoyer du riff, de déployer encore une certaine agressivité comme sur cet épique "Hollow Lies" à la trame quelque peu dramatique. Morceau assez furieux mine de rien qui succède d’ailleurs à "The Flood", titre Power Prog’ Symphonique dans toute sa splendeur, comme pour mieux rassurer les fans de la première heure.
Car celles et ceux qui avaient aimé "Fragments Of Creation" aimeront aussi "Manifesto", il n’y a aucun doute là-dessus. En effet, Gus Drax reste tout de même un sacré tueur à la guitare et garde toute son appétence pour les riffs charnus, leads et soli assassins à la manière d’un Michael Romeo (SYMPHONY X) : "Manifesto", "Samaritan" ou encore ce "Hollow Lies" qui est le parfait exemple de tout le potentiel de Gus Drax ; des riffs véloces et agressifs, une vitesse d’exécution assez ahurissante, de jolis soli en complément des claviers de Bob Katsionis qui se fondent parfaitement dans le décor alors que Vasilis Georgiou sublime le tout avec ses vocalises. Un chant qui ressemble toujours autant à celui de Roy S. Khan (CONCEPTION).

Bien évidemment, les passages plus atmosphériques, plus aériens des nouveaux titres favorisent grandement le chant tout en douceur et nuancé de Vasilis (le mettent de surcroit parfaitement en valeur) tant et si bien que CONCEPTION n’est jamais très loin vocalement et… musicalement comme sur cette ambiance sur "From the Cradle To The Grave", la batterie évoquera sans conteste les Norvégiens (album "Flow"), ou sur "Perpetual Descent" où l’on croirait même entendre les riffs Prog’ en saccades de l’ami Tore Østby. Autant dire, que c’est un véritable plaisir que d’entendre et de savourer ces huit nouvelles compositions de SUNBURST. Gus Drax en profite d’ailleurs pour étaler ici tout son talent en étoffant encore un peu plus son registre avec donc, non seulement quelques riffs plus Prog' mais aussi des passages guitaristiques de toute beauté. Davantage aériens, dotés aussi d'une certaine finesse, incontestablement mélodiques, ces passages ne souffrent d'ailleurs d'aucune démonstration inutile (pas de branlette de manche si vous voyez ce que je veux dire). Allez donc écouter ces guitares planantes et magnifiquement mélodiques sur "The Flood", aériennes sur "Manifesto" (beauté absolue aux alentours des 4:06 min !) accompagnées des notes de piano de Bob Katsionis (effet garanti !), ou bien encore ses soli à la T. Tolkki (STRATOVARIUS) sur "Nocturne". Gus Drax délivre là des passages guitaristiques de haute volée.

Étonnamment, et ça sera le bémol principal concernant "Manifesto", on a la sensation finale que malgré la qualité des compositions, aussi élaborées soient-elles, ces dernières ont malheureusement tendance à sonner de manière uniforme. Elles ont tendance en effet à se situer toujours un peu sur les mêmes tonalités tant et si bien qu’il transparait un léger sentiment de linéarité lorsque le disque se termine. Malgré l’ossature des titres, souvent complexe (mais sans réelle innovation), les breaks présents et les variations, nous n’avons, au final, pas toujours les éléments ou les repères pour distinguer clairement une composition l’une de l’autre à l’exception tout de même de "The Flood" voire de "Nocturne" lesquelles marquent quand même les esprits avec leurs quelques orchestrations symphoniques un peu plus prononcées. Il n’en reste pas moins que "Manifesto" reste un très bon disque de Metal Progressif (Power Progressif) puissant et parfaitement équilibré avec son lot de très bons (beaux) moments. Musicalement c'est très fort que ce soit à la batterie, à la guitare (un des points forts du disque, quelle virtuosité vraiment !) ou au chant avec un Vasilis Georgiou qui colle parfaitement aux compositions et confirme tout le bien qu'on pensait de lui. On regrettera juste le fait que la basse de Nick Grey soit en retrait sur "Manifesto". Dommage ! Un disque qui mérite néanmoins et en tout cas votre entière attention. Vivement la suite, mais pas dans huit ans svp !

Morceaux préférés : "The Flood", "Hollow Lies", "Manifesto", "Nocturne".