Un peu plus de noirceur dans ce monde déjà bien ténébreux. Tel semble être le crédo des New Jersiais de REPLICANT, qui du haut de leur juvénile huitaine années d’ancienneté, semblent bien décidés à enfoncer les portes déjà délabrées et grinçantes du Death Technico-avant-gardiste. Et je dois bien avouer que cet album fout un petit coup de pied au cul au Metalleux que je suis, complaisamment affalé dans ma routine d’atmosphères tantôt grotesquement absurdes, tantôt dans la démonstration outrancière de branlette de manche, mais jamais réellement inquiétantes…

Et en commençant par étudier l’artwork dans l’exacte veine du précédent effort de 2021 ("Malignant Reality"), tandis que les premières notes d’"Acid Mirror" sourdent dans mes oreilles, je commence à comprendre à quelle sauce je vais être bouffé. Il faut dire qu’en s’inspirant sans s’en cacher des magnats GORGUTS et DEMILICH, la messe (noire) est dite. Le riffing est pachydermique tant dans sa brutalité intrinsèque que dans la lourdeur et l’inertie qu’il induit, le chant du duo Gonçalves/Keren jongle entre gutturalité et écorchage des cordes vocales, et seuls les passages atmosphériques, presque dépressifs, permettent de reprendre son souffle – un souffle court, tant la tension est omniprésente.

Pourtant, en termes de construction, il n’y a rien de révolutionnaire à l’horizon : les codes old school des deux mastodontes précédemment cités sont repris sans fléchissement ou altération (avec un arrangement sauce 2024 tout de même, exit donc le son caverneux du fin fond de la même cave sinistre et humide où toutes ces lugubres productions sont enregistrées)... Et c’est peut-être bien ce respect à la lettre des traditions qui engage l’abandon à corps perdu dans une écoute servile, en proie à l’écrasement tant par l’ambiance que par les coups de plectre et de baguette sur les instruments. À ce jeu, et pour tenter de retrouver mes repères de Death Tech, un chouïa chamboulés par cette déferlante de violence rampante et insidieuse, "Reciprocal Abandonment" règne en maître, avec des blasts terrifiants d’Applegate et un accroissement du sentiment de malaise qu’essaye (et réussit) à instiller REPLICANT, flirtant avec les frontières du Black. Storm, si tu m’écoutes…

Le Black vous angoisse trop ? Qu’à cela ne tienne, partons sur "Nekrotunnel" (avec un "K", parce qu’avec un "K", ça fait plus peur) et son
Post-Hardcore duquel je suis par essence moins client, mais dont la polyvalence de composition du quartet m’enjoint à ployer genou au sol en gage de respect.

Aux antipodes l’une de l’autre, nous avons l’interlude instrumental "SCN9A"(*) dont la nécessité de la présence est questionnable, à opposer à "Planet Of Skin" et ses longues neuf minutes d’intrication dont seuls les plus aguerris et friands de toutes sortes de putrescence et perversion sauront en apprécier la substance et la longueur, tout comme celle de cette phrase.

"Infinite Mortality", sous ses airs de crachat de fiel dans un climat perpétuellement malsain, est une galette à la fois mature et élaborée, jouant habilement de synonymes dans ce que le groupe sait faire de mieux pour captiver son auditoire, en tant que digne porteur de la flamme de l’Avant-Garde Death aux côtés d’ULCERATE, et sans rougir(**). Enfin, sans blêmir, vu l’ambiance.

Morceaux préférés : "Reciprocal Abandonment", "Shrine To The Incomprehensible", "Acid Mirror", mais tout est dans un mouchoir de poche, même ceux qui se retrouvent au pied du podium.

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(*)Ce n’est pas un captcha pour valider votre commentaire sous cette chronique, mais le gène qui code les instructions de la transmission de la douleur dans les cellules nerveuses.

(**)Et pourtant, la lutte est rude avec "Cutting The Throat Of God" sorti seulement deux mois après !