Le Goth Rock a le vent en poupe, qu’on se le dise. Entre le glacial "IX" de HOST paru l’année dernière qui avait enchanté mes esgourdes et le all-star band CEMETERY SKYLINE qui pointe le bout de son nez d’ici la fin de l’année, il est temps de coller un coup de projecteur sur cette formation nantaise, bien de chez nous. Trio composé de membres de REGARDE LES HOMMES TOMBER et de The VEIL, les Frenchies œuvrent dans un style fortement teinté de New/Cold Wave, quelque part entre JOY DIVISION et les SISTERS OF MERCY. Et vu le pedigree des loustics à la conception, cela peut paraître surprenant de premier abord.

Cet EP séminal démontre en tout cas tout le savoir-faire de ses géniteurs et ravira les amateurs du genre, plus en noirceur qu’en puissance, faisant la part belle aux mélodies et à la mélancolie de déambulations grisâtres au milieu d’un hiver urbain, plongé dans la nuit la plus hostile qui soit. Trois titres pour faire connaissance, c’est bien peu, mais cela permet néanmoins de se construire une idée de l’univers dans lequel souhaite se positionner SANG FROID.

TC et JJS, habituellement au chant et à la guitare du combo Black, accueillent Ben Notox aux claviers, ne nous mentons pas, de manière surprenante relativement discrets. Je n’aurais pas craché sur une présence plus accrue de sons un peu Électro pour tout vous avouer. Les mélodies sont essentiellement issues du contraste entre les lignes de basse soutenues et les guitares, bien sombres et ancrées dans l’époque des légendes évoquées ci-dessus. On y perçoit également des traces de DEAD CAN DANCE ou de DEPECHE MODE par touches plus ou moins marquées sur certaines pistes.

Si l’ensemble fonctionne du tonnerre, il peine en revanche à surprendre. Ne vous y trompez pas, c’est remarquablement construit et – qui plus est - auto-produit dans un registre plutôt sobre et efficace, mais il manque ce petit quelque-chose qui saurait faire basculer la musique du combo dans une autre dimension. Des harmonies un chouïa plus marquées peut-être ? Un chant qui s’aventure au-delà de ce qui est aujourd’hui coutume d’entendre dans le genre ? L’opener "Psalms Of The Great Void" montre à la fois tout le talent des zikos et aussi ses (relatives) limites. On est dedans sur certains passages, sans jamais véritable s’extraire des conditions dans lesquelles on appréhende l’EP.

Vous trouverez peu de Metal dans cet opus je préfère prévenir les fanatiques et puristes du genre. Et également peu de sons synthétiques, comme évoqué précédemment. Il faudra aller chercher le plaisir ailleurs, tant l’accent est plus porté sur les sentiments que la puissance. Relativement mono-rythme dans le but de créer une forme d’enchantement, SANG FROID ne montre que peu de nuances, à dessein. Soit on y rentre, soit on se fait chier. Mais je veux bien parier quelques biftons qu’un Beagle, pour ne pas le citer, y trouvera un intérêt certain.

Composé en pleine pandémie, l’atmosphère du disque s’en ressent clairement. On perçoit cette volonté d’échapper à un quotidien hautement déprimant. La bonne nouvelle pour les masochistes comme moi, c’est que le groupe ne s’est pas arrêté ici, et nous pondra deux ans plus tard un LP en bonne et due forme, mais ceci est une autre histoire.