Après le coup de force "Trilogy", difficile d'être à la hauteur et de ne pas tomber dans la redite. Le premier album de CARPENTER BRUT est un chef-d'œuvre du genre, lorgnant autant du côté de la bande-son d'un "film Reagan" des 80s que du côté d'une Synthwave qui est capable de sortir du tout cinématographique. "Leather Teeth" assume pourtant cette dernière tendance. Sa pochette est un joli clin d'œil aux slashers, avec son accroche putassière, son méchant sexy et la mention de CARPENTER BRUT comme créateur de la bande-son de ce film inexistant. Une nouvelle fois, on retrouve l'amour de Franck pour John CARPENTER. Cinématographique, "Leather Teeth" l'est, même s'il souffre de redites et de la comparaison avec son illustre prédécesseur.

Le parti-pris cinématographique est mis en avant dans les titres à chanteur, qui confèrent à "Leather Teeth" des allures d'authentique bande-son efficace aux tubes parfois entrainants. Difficile de ne pas mentionner "Beware the Beast", qui pourrait coller à la diffusion des crédits de ce slasher bien kitsch. Mais le refrain percutant revient trop souvent pour que le titre ne fatigue et que l'ensemble soit poussif. Poussif pourra paraître sévère, mais certaines orientations de ce CARPENTER BRUT laissent à désirer, et on sort de l'expérience interloqué. "Cheerleader Effect" par exemple, promettait beaucoup, avec la participation du culte Kristoffer Rygg (ULVER), mais le titre s'avère décevant, forcé, encore une fois poussif. Certains morceaux sont définitivement passables et sans vie, loin de ce que CARPENTER BRUT avait pu nous proposer dans l'impeccable "Trilogy". Ainsi, "Monday Hunt" fait pâle figure, surtout après "Sunday Lunch", plus audacieux, avec sa guitare résolument Hard FM. Enfin, "End Titles" souffle le chaud et le froid. Tantôt superbe avec une basse bien mise en avant, tantôt pénible, avec sa longue intro peu marquante, elle ne parvient pas à conclure "Leather Teeth" de manière percutante.

L'album est néanmoins rattrapé par quelques tueries intersidérales. L'entrée éponyme possède le mordant caractéristique de la Synthwave de CARPENTER BRUT. Puissante, efficace, Metal dans son approche du riff, fût-il Synthwave, elle nous permet d'entamer l'album avec espoir. La palme revient néanmoins à "Inferno Galore", au groove démoniaque et aux mélodies parfaites. On y trouve l'aspect sombre de "Trilogy" mais aussi le développement d'ambiances plus douces expérimentées dans "Leather Teeth". C'est ce genre de titre qui a fait de CARPENTER BRUT un ténor de la scène, et il enterre les morceaux plus soporifiques de l'album, comme "Monday Hunt".

"Leather Teeth" est une tentative de sortir du 100% violence, de la musique sombre et noire, Franck Hueso l'a exprimé lui-même dans plusieurs interviews. Il s'agissait de ne pas tomber dans la caricature et d'explorer d'autres perspectives. L'album est davantage inspiré par l'esthétique Glam (l'artwork) et ne verse pas dans la noirceur, c'est certain. Reste que l'ensemble souffre de titres trop faiblards, soit peu poussés, soit simplement ennuyants. On se raccroche à deux-trois morceaux excellents, et on baille un peu fort devant ce film imaginaire qui manque ironiquement de mordant. Applaudissons la volonté du sieur de sortir des sentiers battus, mais soyons fermes sur le semi-échec qui restera fort heureusement unique, puisque la suite du parcours regrimpera vers les sommets.