Dans la lignée directe de "The Hybrid Suns", et suivant un calendrier rythmé par une cadence folle comme si le COVID n'avait jamais existé (six albums en seulement neuf ans, et sans s'encombrer d’EP ou de splits superflus), voici que les Bordelais d’EXOCRINE récidivent avec une nouvelle galette qui fera enfin leur… légende ? Avec un artwork comme à leur habitude d’une qualité irréprochable et très aguicheur, tous les espoirs sont permis sur le papier.

Souvent dans l'ombre des noms écrits en gros caractères sur les affiches, et étant de ce fait comparé inéluctablement aux références francophones de la scène (les sempiternels GOROD et autres BEYOND CREATION), EXOCRINE s’émancipe ici en profitant des fondations bâties par l’opus de deux ans son cadet en vue d’orienter son Death sur des aspects davantage Techs que Progs. La constance d'un tempo à des vitesses tachycardiques, passant régulièrement la barre des 300 BPM (pour s’établir ponctuellement à 400, histoire de… histoire de quoi d'ailleurs ?) sur des phases d'attaque de licks ou de blasts très fugaces et pointues s'associent plus instinctivement à du ARCHSPIRE, ABORTED ou encore CRYPTOPSY (soyons flatteurs).

J'interromps le soporifique namedropping pour synthétiser afin de n’embrouiller personne : "Legend" est frontal, et pour éviter de foncer tête baissée de bout en bout, il va tenter d’incorporer quelques éléments exogènes (de la trompette sur "Legend" à titre d’exemple) en vue de tenter de casser son aspect monolithique et de se donner à la fois de la substance et de la nuance, sans pour autant trahir son fonds de commerce. En effet, une déferlante de riffs dispensés par Nicolas La Rosa va nous bercer tout du long des quarante minutes de la galette, même si ce sera Théo Gendron qui volera la vedette aux autres membres grâce à la technicité de son kit, et de sa finesse dans des fills extrêmement bien sentis, raison vraisemblable de sa mise en avant excessive.

Bien qu’il s’agisse sans conteste de l’album le plus mature du quatuor en termes de composition et d’écriture, l’écart type entre les très bons titres ("Eidolon" ou "Legend", finalement les plus hétéroclites) et les moins bien sentis ("Life", "Dragon") vient contrebalancer le côté massif de l’ensemble. Des tentatives d’absorption de l’essence d’inspirations telles qu’un "Bleed The Future" d’ARCHSPIRE sur "The Altar Of War" ou des sonorités GOJIRiennes sur "Legend" n’est pas réalisé suffisamment subtilement pour singulariser l’inventivité du combo.

Cependant, le problème majeur de cette galette, qui est hélas récurrent sur les productions des Bordelais, est la production bien trop compressée, ne permettant pas de mettre suffisamment en avant le travail et les qualités intrinsèques de l’album. En se voulant être hypermassif, le son devient brouillon et trop lisse dans sa violence, jusqu’à la banaliser, et n’insiste pas suffisamment sur les moments clés qui viendraient échauffer nos nuques aux moments opportuns. Ainsi, le couperet tombe, laissant sur le carreau la basse de Jordy Besse (même si place nette est faite pour son growl corpulent), et surtout les soli de Sylvain Octor-Perez, pas toujours inspirés et parfois emprunts à la facilité.

Dans l'absolu, cet album mérite mieux qu’un peigne-cul et enculeur-de-mouches-troisième décan comme moi pour le chroniquer, mais force est de constater des signes qui ne trompent pas à l’heure du dressage de ce résultat en demi-teinte. En effet, passé "Warlock", les titres restants, moins touffus, m’ont valu une déconcentration récurrente au gré des écoutes, farçi du reste… Et ce n’est pas le ré-enregistrement de "Cryogenisation", annonçant une re-realease d’"Ascencion" qui ne saura captiver jusqu’au bout.

Loin d’être mauvais, mais loin d’être mémorable, j’attends donc avec impatience que l’essai finisse par se transformer avec éclat pour EXOCRINE. Ce qui arrivera sans l’ombre d’un doute.

Morceaux préférés : "Eidolon", "The Altar Of War", "Warlock".