KORGONTHURUS est un pur produit de la Finlande, du plus sauvage des pays du Norden : froid, enténébré et hostile. Si vous connaissez les belliqueux HORNA et que vous apprécié leur matière musicale, leur violence et leur haute intensité guitaristique, sachez que Corvus, son vocaliste inquiétant est aussi celui de KORGONTHURUS et que son patronyme de corvidés est totalement congruent avec sa manière de chanter.

Avec ce "Jumalhaaska", nos finlandais transforment l’essai d’un nouvel album tout aussi réussi que le précédent. Riche en épopées guerrières d’un Black Metal trve fuligineux, agressif et possédé, perforé jusqu’à l’os d’atmosphères vives à la fois infernales et glaciales. Car KORGONTHURUS ne s’emboite pas avec un Raw Black Metal, son Black est bien produit et surtout peuplé de riffs savamment orchestrés pour hypnotiser son auditoire et le laisser être guidé dans l’antre de titres longs, complexes et déterminés. Ne se vidant jamais de leur substance, les tracks de l’album escamotent chacun à leur tout un plan pour envahir l’espace de l’écoute et accaparer l’esprit sous les coups de semonce de mélodies poisseuses et viles et d’un mur de guitare ensevelissant.

En vingt ans d’activité cette formation a connu des hauts et des bas, non pas en termes de qualités des sorties mais davantage autour de la stabilité de son line-up. Les splits ont peuplé cette période de près de vingt ans d’activité. Finalement KORGONTHURUS est un phénix et sa renaissance instruit à chaque fois la sortie d’un album toujours de grande qualité. "Jumalhaaska" n’est donc que le quatrième mais celui-ci frappe fort. À l’image de ce voyage infernal de plus de seize minutes qu’est "Marraskehrä", totalement habité, dont l’esprit païen semble apparaître, dont les mélodies désenchantées percent une brume BURZUMienne qu’un NOKTURNAL MORTUM ne renierait pas. "Jumalhaaska" c’est donc cela : des titres puissants, des vocalises furieuses et des orchestrations fougueuses aux couleurs mélancoliques qui fleurent bon la toundra. "Autuas Kärsimys" schlingue la mort et la décomposition des corps et de la pensée. À l’image de cette pochette où nous pouvons mirer les cousins de Corvus en plein repas, ce titre clôture l’album par treize minutes épaissies d’une tristesse de plus en plus marquée au fur et à mesure que le titre avance. Ni la brutalité des rythmes, ni la vindicte de Corvus ne saisiront la main de ce titre qui doucement mais sûrement glisse sur une pente infinie dans une abîme insondable. Les violons sanglotants qui expirent dans les dernières secondes clouent le sort de ce majestueux retour de KORGONTHURUS.

Plus décidé que jamais à exorciser leurs démons, "Jumalhaaska" est un plaidoyer atrabilaire, une essence 100% pur Black Metal. L’album se décompose quasiment en deux parties. La première regrouperait les deux premiers titres et constitueraient un KORGONTHURUS très HORNAlien vitupérant et fier, là où les deux derniers titres s’affirmeraient bien plus volontiers atmosphériques et mélancoliformes. "Autuas Kärsimys", comme expliqué déjà un peu plus haut, condense une saillie DSBM dans l’âme et l’ADN. Ultime plaidoyer pour le désenchantement, ce titre retient le geste ultime et montre une nouvelle fois que KORGONTHURUS ne tourne pas en rond et en a sous les cartouchières. Un très beau disque, plus accessible que les précédents, du tout bon pour découvrir les facéties furieuses de ce groupe.

Note réelle : 3,5/5.