Il faut vous confesser d’emblée mon petit pêché mignon pour parfaitement saisir l’origine de cette chronique : j’éprouve un gros faible pour le Metallic Hardcore, plus encore lorsqu’il provient de la perfide Albion, référence mondiale en termes de qualité dans le Game. Le dynamisme de la scène locale, allié à une tendance à faire évoluer ce style sans pour autant le dénaturer, me parle tout particulièrement. Il semblerait de surcroît qu’il existe une véritable solidarité entre les groupes, s’entraidant mutuellement au lieu de se tirer artificiellement la bourre, la place étant bien assez grande pour tout le monde.

Ainsi, MALEVOLENCE, mes chouchous depuis l’excellent "Malicious Intent" que je vous recommande au passage au cas où vous seriez passés à côté, nous recommande chaudement leurs voisins de GUILT TRIP, Mancuniens de leur état, qu’ils embarquent avec SYLOSIS et eux dans leur prochaine tournée européenne après les avoir chaleureusement accueillis au sein de leur label MLVLTD MUSIC, et orienté durant le processus de production de ce "Severance". Sympas les potes !

Au menu de ce second LP, donc, un Crossover/Metalcore Groovy de plus bel effet, maniant riffs Thrashy et énergie Hardcore dans un bel équilibre. Composé de Jay Valentine au chant, de la paire Jack Maden/Nick Clark à la gratte, de Bradley Hall à la basse et de Liam McCarry aux fûts, la formation délivre une nouvelle partition sans faille, quatre ans après un "River Of Lies" déjà fort intéressant, mais plus brut dans l’approche. Le gros son est en effet ici de sortie, porté par une production aux petits oignons : riffing sec et tranchant contraste avec une section rythmique massive et puissante. Vraiment du tout bon et des fondations en béton sur lesquelles appuyer leurs compositions.

Les Anglais œuvrent donc dans un style à forte dimension calorifuge. De celui qui vous incite à violenter quelque peu vos abat-jours ainsi que le fauteuil de famille, hérité de la grande tante Colette. Des vocaux très majoritairement clamés en mode Hhardcore avec l’intensité qui va bien viennent se "poser" sur ce tapis avec agressivité et envie d’en découdre. Point de référence en revanche à Belzebuth pour le coup, mais plutôt une belle litanie de jurons. Pour tout vous dire, j’ai commencé à compter les "fuck" pour abandonner à mi-parcours, gagné par la lassitude (les mamans prennent notamment assez cher, je préfère vous prévenir).

Les guitares sont très bien calées et rappellent clairement le duo Hall/Baines des grands frères de MALEVOLENCE, voire la team Guy-Pierre/Tom (GET THE SHOT) pour sa capacité à remplir l’espace. À savoir, là où les combos se restreignent généralement à claquer des successions d’accords saccadés, les musiciens vont ici bien plus loin, se renvoyant la balle sur les différentes parties, incorporant des petits leads vicelards pour mieux retourner le bulbe rachidien des baroudeurs qui se laisseront tenter. En revanche, les gars… L’abus d’harmoniques est dangereux pour la santé… À force d’en coller partout, l’effet finit par perdre de son charme. Même Robb Flynn (MACHINE HEAD) n’en glisse plus autant depuis longtemps. Ce petit maniérisme aura tendance à agacer légèrement au fil du disque.

Dommage, car "Severance" possède une qualité assez rare dans ce sous-genre : la variété. Trop souvent monolithiques, les formations ont tendance à poser leur parpaing au milieu de l’allée du jardin, sans papier cadeau ni service après-vente. En résulte pour les non-initiés un sentiment d’impénétrabilité, de trop forte densité, suscitant ennui puis accablement. GUILT TRIP n’est pas fait de ce bois-là, et possède la délicatesse de chamarrer sa violence, lui instillant une petite piste instrumentale éthérée ici ("Reaching Paradise"), là une basse qui claque (le title-track), des guests à foison (les Frenchies de LANDMVRKS sur "Sweet Dreams", MALEVOLENCE qui vient canarder avec les copains sur "The Gates" ou encore LOWER THAN ATLANTIS sur un "Sanctified" bancal au demeurant), voire encore une conclusion surprenante avec un titre quasiment Folk pour tenter d’emporter les débats ("Dusk"). En revanche, les incursions en chant clair, si elles partent de la même bonne intention, tombent souvent à plat, n’apportant pas grand-chose à l’affaire ("Broken Wings", "Severance", ou toujours "Sanctified" et ses voix miteuses à la Jon Davis (KORN) qui n’ont rien à foutre là), à l’exception des jolies "Dusk" et "Hell Will Replace The Rain", épaisses comme le brouillard du Nord de l'île.

Bref, les Britanniques signent ici un opus intéressant, énergique, très bien exécuté et produit, à défaut d’être parfaitement abouti. S’ils parviennent à gérer et maîtriser leurs expérimentations, ils pourraient bien suivre le chemin de leurs congénères, tant ils maîtrisent admirablement la base de ce qui fait le charme de cette musique.