Je suis en sueur en plein milieu de la fosse. La chaleur dans la salle est élevée et tout le monde dégouline tout en se donnant à fond pour bouger. Une masse de peluches de poney multicolores arbore le bord de la scène où joue PRINCEWHATEVERER. Jamais, mais vraiment jamais je n’ai vu un public aussi chaud et impliqué, les refrains repris en chœur m’assourdissent, on connaît par cœur les paroles des nouveaux morceaux sortis la semaine précédente, on pre-shot ces derniers en les chantant quasiment en entier avant le groupe et c’est juste fantastique. Le concert se déroule pendant un week-end de convention dédié à ces petits équidés que j’aime tant et les mots ne sauraient vraiment décrire à quel point ce genre de moments sont précieux pour moi et pour ceux qui y participent (on a essayé récemment pendant un live du webzine brony où je traîne, en une heure on a dû aborder que la moitié du quart de ce qui peut être dit). Tout ça pour dire que la musique de PRINCEWHATEVERER (et la musique brony en général) a une place toute spéciale dans mon cœur et clairement, cette chro sera totalement biaisée.

Clairement PW (je vais raccourcir pour le reste de la chro) est un pur produit de la scène musicale brony (oui, il y a une scène musicale dédiée aux petits poneys si les moult chros que j’ai fait sur cette scène n’étaient pas suffisantes pour le comprendre) : touche-à-tout, hyper productif et accordant une grande place aux histoires racontées par les musiques. Et on retrouve tout ça sur "Redefine". L’album est assez généreux avec sa durée dépassant l’heure et on y retrouve cet aspect bordel éclectique déjà présent dans les sorties précédentes. Ici on passe du Metalcore énervé au Pop Punk sans aucun complexe, on ajoute une bonne dose d’Électro ou des arrangements orchestraux quand l’envie se fait sentir et on est parti. Ça peut sembler épuisant dit comme ça et pourtant, l’heure de l’album passe à une vitesse folle pour une raison : la musique de PW est juste ultra fun et addictive.

Parce qu’il y a quelque chose d’incroyable avec PW c’est que derrière ses airs de musique adolescente ultra sucrée, il y a un talent énorme pour trouver les mélodies qui tuent, que ce soit pour un refrain mémorable ("Everypony Dies", "CODE PHANTOM", "Ghost In The Sun"), un bon vieux riff de qualité ("Friends In Maretime", "Holy War") ou même tout ce qui est arrangements aussi bien Sympho qu’Electro (mes préférés, et là on a de quoi faire avec "CODE PHANTOM", "DASH DASH RAINBOW", "Party’s Over" ou "Ghost In The Sun"), et c’est juste un plaisir immense à se laisser prendre par tout ça. Quand bien même on sauterait aussi du coq à l’âne en terme de ton (par exemple "Ghost In The Sun", très sérieuse et dramatique dans son propos est coincée entre un "Party’s Over" sautillant et un "Friends In Maretime" débordant d’énergie joyeuse), le tout tient la route par je ne sais quelle magie (de l’amitié ?) et ce sentiment de suivre un ado hyperactif partant dans tous les sens est au final une force je trouve. On ne sait jamais sur quoi on va tomber et la curiosité de savoir la suite nous maintient tout du long de la première écoute et c’est la qualité des morceaux qui nous fait revenir par la suite.

J’ai envie de donner un petit paragraphe en plus sur l’aspect histoires racontées qui, comme je l’ai dit, a son importance. Déjà, mon grief principal sur l’album vient de l’absence d’un morceau. PW a commencé une série de morceaux suivant la même histoire avec "Destabilize" sur l’album précédent (qui avait aussi sur le même album la deuxième partie avec "L_st In D_ta") et là sur cet album on a droit a "CODE PHANTOM" qui est… la quatrième partie, la troisième partie, "Enemy Undefined" était sortie en single et reste du coup en single seul dans son coin et n’est dispo que sur l’album compilation "Elemental". Du coup pour moi c’est frustrant. Mais sinon, l’aspect « narratif » de l’album est important car il explique aussi en partie l’aspect foutraque de la musique de PW. Étant de la musique brony, son univers est basé sur My Little Pony, et plus précisément la quatrième génération de poneys qui a débuté en 2010 et connu le succès secouant l’Internet pendant la décennie. Donc rien qu’en se basant là dessus on a quand même une série de neuf saisons, un film, deux OAV, plus d’une centaine de comics et deux séries spin-off qui servent de matière, et ça c’est sans compter aussi la cinquième génération en cours et tout ce qu’a créé la communauté de fans. Avec tout ça on a droit a plein de délires différents, "CODE PHANTOM" et "ALR3ADY D3AD" (la suite de "Destabilize" donc) par exemple sont basés sur un gag de "Friendship Is Witchcraft", une parodie de la série qui fait d’un personnage un robot destructeur quoique très mignon, mais traité au premier degré. "Everypony Dies" part dans le délire Cyberpunk explicité par la pochette et détaillé dans les panneaux de l’édition physique de l’album, "DASH DASH RAINBOW" est pensé comme étant l’hymne d’un personnage précis etc. Donc du coup, l’album tient là sa cohérence, non d’un point de vue musical, ça on l’a vu, mais en étant l’extension d’un même univers et de sa communauté avec lesquels les morceaux entrent en résonance. Et c'est aussi sans compter l'aspect communautaire du truc quand on voit le nombre de personnes venant poser leur voix en featuring.

L’expérience "Redefine" est la même que sur les autres albums de PW, un gros gloubi-boulga d’influences partant dans tous les sens maintenu par une écriture visant le fun et l’accroche efficace. Beaucoup vont s’arrêter à cette analyse et en soit ce n’est pas grave, au final ce qui compte le plus c’est la musique. Mais derrière il y a ce truc en plus, ce à quoi PW est rattaché, qui m’engage dedans encore plus. Pour conclure, je vais expliquer ça le plus simplement du monde avec une comparaison : j’écoute PW et comprends et apprécie son univers comme une personne connaissant l’œuvre de Tolkien sur le bout des doigts écouterait SUMMONING. Je pense qu’avec ça vous voyez ce que je veux dire.