Probablement qu'un nombre assez conséquent de metalleux les connaissent, ces périodes de désamour. Ces moments où l'on tourne infernalement en rond lorsqu'il est question de choisir un disque (par disque j'entends fichier mp3 compressé dans le cloud interspatial) à mettre (j'entends swiper, slider, cliquer) sur la platine (j'entends mon Android S9 un peu naze acheté en seconde main pour me donner bonne conscience). Ces périodes où l'on tourne le dos à la scène, où l'on se contente de l'ancien, que l'on ne trouve pas son coin de bonheur dans les nouvelles sorties, et que l'on commence à finalement éviter les grosses disto pour prendre l'air.

Que ces périodes arrivent en général au printemps ou en été ne me choquent plus vraiment, et c'est d'ailleurs souvent en les embrassant complètement (sans non plus me mettre à porter des chemises blanches) qu'un truc improbable me remet dans la boucle. Mais pour HOAXED, on va dire que c'est un peu un joker, comme le duo de Portland marche sur les marges du Metal, Doom Rock s'imaginant, aux yeux de son logo, plus Heavy qu'il ne l'est en réalité. Fermement SABBATH-ien ? On en doute pas ; on y trouvera ce groove lascif, ce riffing mélodique et cette basse rugueuse comme un clin d’œil aux origines. On pensera cependant assez vite que la voix de Kat Kleo et les harmonisations vocales héritent davantage d'une tradition Shoegaze (SLOWDIVE bonjour), voire Pop Rock. "Two Shadows" est un jeu de constraste permanent entre la lourdeur et la dynamique d'une batterie constamment créative, véritable point d'appui de tout le reste, et la douceur et la mélodicité du chant, des guitares et des légères touches de synthés. Le tout est unifié par une basse à la présence hypnotique addictive, ajoutant ce feeling nocturne qui habite n'importe quelle pépite de Rock Gothique. On en retient une forme de mélancolie en clair obscur, de lyrics aux leitmotivs Pop dans le sens le plus noble du terme ("High Seas", meilleur exemple de cette simplicité Pop).

Plus dur à définir, ce grain de séries B "direct to VHS" qui construit un arrière plan subtilement sombre. On serait alors tenté de classer HOAXED parmi des formations Occult Rock à chant féminin (JEX THOTH, JESS AND THE ANCIENT ONES), mais HOAXED n'en a ni la théâtralité, ni les influences psyché. Équivalent outre-atlantique de nos DOOL européen ? Allez peut-être, mais HOAXED baignerait dans les bacs de vinyls davantage entre le Rock de papys et le Post Punk, avec une approche aussi terre à terre qu'éthérée. Une bonne manière pour le label RELAPSE de trouver un pendant plus sucré à des BARONESS, WINDHAND ou KING WOMAN.

J'aurais pu dire 27 minutes c'est un peu léger pour un album, mais il est difficile de ne pas admettre que les Américaines ont une capacité de synthèse finalement assez rafraichissante. Je me retrouve rarement à faire l'éloge de la brièveté, je pense que cela dit quelque chose. Je décide donc aujourd'hui de considérer "Two Shadows" comme un EP, et de ne lui trouver que deux morceaux un peu en-dessous du lot, "Guilty Ones", qui n'amène jamais son magnifique refrain à un effet plus percutant, et ce "Where Good Won't Go" où la cinquième minute est dépassée, laborieusement il semblerait. Rien de choquant dans cette demi-heure sur lequel on reviendra encore et encore (pour ma part parfois quotidiennement), et largement compensé par les incroyables "For Love" ou "Forsaken". "Two Shadows" est le genre d'album qui vous remet sur les rails.