Dix ans ! Dix ans qu'on n'avait plus entendu (parler de) DISILLUSION. Ou presque. Après un premier album extraordinaire, fruit d'une maturation réussie de dix ans (tiens tiens dix ans... l'activité périodique, la "comète de Leipzig", tout ça, je vous renvoie à ma KroX de "Back To Times Of Splendor") suivi d'un second (à l'époque) opus pour le moins déroutant (1) et osant s'acoquiner avec l'Electro, puis quelques dates sporadiques (principalement dans des festivals) jusqu'en 2007, le groupe s'est étiolé (départs, retours et changements de line-up en cascade) et s'il a délivré quelques concerts en 2010/11 a fini par entrer en hibernation.

Et puis, le 29 Mai 2015... le retour de la comète. Dans la modeste Viper Room de Vienne (Autriche), DISILLUSION décide de célébrer les onze ans de "BTTOS" en le jouant en entier, assorti de quelques titres de "Gloria" et d'un dernier rappel hommage à un vieil EP ("The Porter", 2002). S'ensuivent trois dates en Allemagne dont la dernière, le 4 décembre au Werk II de Leipzig, propose en avant-première, une nouvelle chanson, "Alea". S'il faut attendre presque un an (7 octobre 2016) pour voir ce titre sortir en single, nous savons aujourd'hui que cette bonne vieille comète semble s'être satellisée autour de notre planète Metal en constante effervescence.

Téléportons-nous à l'automne 2016. Pour toutes celles et ceux n'ayant pas eu la chance de découvrir ce nouveau titre lors de cette live premiere, l'arrivée de cet "Alea" s'avérait autant excitante qu'inquiétante. En effet, après deux albums complètement différents et un hiatus aussi long, à quoi pouvions-nous nous attendre ?

Ne faisons pas languir le suspense plus longtemps, si "Alea" est encore une proposition différente, il se révèle plus traditionnel que l'excentrique "Gloria". Point d'Electro ici ni d'atmosphères Indus. Mais ce n'est pas non plus un retour franc à "BTTOS". Pas de growl si ce n'est une ou deux vociférations pour la forme. Pas de traces de Death Metal non plus. "Alea" est un long titre (10 min) qui mêle habilement Metal Progressif et Atmosphérique. Si le tout n'est pas foncièrement novateur, le savoir-faire du groupe et particulièrement de son leader Andy Schmidt le rend réjouissant.

Tout en explorant de nouveaux horizons, "Alea" garde une certaine patte DISILLUSION qui balise ce nouveau terrain afin de ne pas nous le rendre étranger. En témoignent le chant d'Andy évidemment mais aussi le groove particulier de la section rythmique qui rappelle par moments l'écriture aboutie de l'effort de 2004 et qui confère à la musique des Allemands ce côté progressif qu'ils se sont appropriés. Enfin, "Alea" se démarque par son final ensorcelant (cette trompette envoûtante) qui s'est presque commué en addiction pour ma part.

Après dix ans d'improductivité, DISILLUSION signe donc en 2016 un retour en fanfare ! Espérons que la suite soit du même acabit.

À noter que le côté cinématique de cet "Alea" a été porté à l'écran dans un vidéoclip naturaliste, dirigé par Valerian Takashi Seethaler, qui peut permettre d'envisager les paroles sous un angle... naturaliste justement. Comme si le narrateur se substituait aux pérégrinations physiques et métaphysiques d'une goutte d'eau (les aléas qu'elle rencontre) imageant le cycle de l'eau, le cycle de la vie. Alea jacta est.

(1) Le groupe avait parfois comparé son "Back To Times Of Splendor", sur le ton de la boutade, à l'opulence du "Seigneur des Anneaux" de Peter Jackson. Pour décrire "Gloria", annoncé différent par le groupe lui-même, Metal Blade Records avait écrit que Peter Jackson était devenu David Lynch. C'est une punchline plutôt bien trouvée.