Depuis quelques années, l’avènement de YouTube a vu fleurir bon nombre de guitaristes qui ont su se faire une certaine renommée. Pour ce qui concerne la France, Pascal Vigné, enseignant et pédagogue depuis des années au prestigieux M.A.I ( anciennement CMCN) est de ceux-là. Ses qualités d’enseignant ne semblent plus à démontrer (contrairement à beaucoup il sait de quoi il parle), mais il reste néanmoins la partie la plus difficile : la mise au service de l’expression musicale de ses connaissances théoriques.
Et oui car si aujourd’hui il est aux commandes d’un tribute Satriani (SURFING WITH JOE), ça ne l’a pas l’empêché de publier des albums fait de morceaux originaux.

Déjà d’entrée de jeu on remarque deux choses : la jolie pochette tirée d’un non moins joli tableau de l’artiste Jean Michel Simonin. Ça parait anecdotique mais au moins on évite les dragons, les héros Marvel ou les poses ridicules de guitare héro clichésque ! Deuxième point : l’album n’est pas un album que de Pascal Vigné mais bien celui d’un groupe (TRIPLE X ici). Chacun a sa place et l’ego du guitariste n’étouffe pas ses camarades qui ont de l’espace de jeu et d’expression.

Bien sûr, dès le premier titre, les influences Satriani sont marquées : Vigné ne cache pas que "The Extremist" est un de ses albums préférés. Quand je dis influences je ne parle pas de bête copie de plans mais d’idées de développement de mélodie qui charpentent le morceau et sur lesquelles se greffent des solos. Ce qui est sympa c’est aussi des morceaux qui comme "High On Life" font penser à des vraies chansons. On entend des couplets /refrains. Et ça c’est vraiment un plus. Le mec ne tricote pas dans le vide. Et dans ce morceau qui commence assez Funky se trouve des gros breaks inattendus. Le premier fait un gros clin d’œil à PANTERA et le suivant fait très groovy (on pense à Stevie SALAS et aux RED HOT).

"Malestorm" met le côté Metal en avant : très "Psycho Holiday", "Fucking Hostile" de nos cowboys Texans. Sympa mais sans plus. Ce qui manque c’est la hargne. Les frères Abbott disait faire la guerre en studio là on sent plus l’exercice de style. Maîtrisé mais trop convenu. Le break très Satch tombe aussi un peu à plat. Notre ami sait aussi panacher le tout pour suggérer plusieurs émotions : "AquaBlue" (du nom de son studio) est de celle-là. Cette balade, qui au milieu s’accélère, est du plus bel effet. Bien sûr "Always With You" vient se rappeler à notre souvenir mais faut avouer qu’il y a bien pire comme comparaison.
Dans le même esprit, les titres "Derniers Instants" et "White Bird" mettent en avant la finesse d’expression et la sensibilité du personnage. Quand bien même on ressent toujours les influences du maître californien une touche plus personnelle se fait jour et c’est pour le mieux. Sur le dernier titre le piano amène un vrai plus.
Autre perle du disque le morceau progressif "333" qui alterne les climats (on a même un break de batterie typé Black Metal et ce après un emprunt à "Walk" de qui-vous-savez). Qui dit progressif dit DREAM THEATER et effectivement on l’entend au milieu. "Asteroids" est quant à lui un Hard plus classique. Le choix de production est assez rêche. Peu d’effets et on penche plus vers une captation style Live plutôt qu’une version multi-travaillée.

Au final on a un album sympathique, sorti par un trio de musiciens aguerris et tout à fait compétents. Le seul souci est ces influences, qui si elles ne sont pas rédhibitoires, sont tout de même très présentes. Après il est dur quand on fait de l’Instrumental de se défaire des grands instigateurs du mouvement comme Satch. On perçoit quand même, lorsqu’il fait plus parler son cœur, comme sur les morceaux aux ambiances plus posées que Vigné a une vraie identité qui ne demande qu’à être plus développée.