Révélation personnelle du Hellfest 2018, en fin de matinée sous un cagnard déjà assassin (à moins que ce ne soient les deux/trois pintes précédentes), nous nous étions, mes acolytes et moi, fait littéralement démonter la gueule à la Warzone par les Québécois de GET THE SHOT. En à peine plus de trente minutes, JP et ses comparses avaient purement et simplement plié le Game pour la journée. D’une énergie folle, le groupe avait communié avec un public encore parsemé, comme rarement de mémoire de festivalier à une heure aussi indécente : slam, mosh, wall of death, tout y était passé. Alors que le groupe s’apprête à nous gratifier d’un quatrième album sous peu, il est plus que grand temps d’ouvrir la page GET THE SHOT sur NIME.

Pour définir la musique ici proposée sur une échelle de sophistication de 1 à DREAM THEATER, on est plus proche d’une note négative qu’autre chose. Croisement bâtard, au sens positif du terme, entre du Hardcore et SLAYER pour ses riffs malsains, on pourra trouver des passerelles avec BODY COUNT, avec un chant néanmoins bien plus agressif, ou les regrettés POWERTRIP. Comme pour ces derniers, l’influence Punk est également marquée, que ce soit au niveau du rythme ou des chœurs. On notera également de bons gros breakdowns, glissés en guise de toffees, sur la plupart des titres. Les gars sont là pour la bagarre, aucun doute à cela. Autant l’effet est garanti à 100% en live, autant la question peut se poser de l’intérêt d’écouter ces brûlots en version studio. C’est le difficile exercice auquel nous allons nous plier ci-après.

Ce qui caractérise GET THE SHOT, c’est avant tout l’agressivité, voire même l’agression, et si possible à fond la caisse, et ce dès le second titre, "Purgation" étant plus une introduction à base de cris qu’autre chose. "Faith Reaper" pose les bases de l’album et résume ce que l’on trouvera tout du long. Axé autour de riffs thrashisants bien sentis, l’originalité de l’ensemble réside sans doute dans l’utilisation de guitares leads plutôt réussies pour le style, incorporant même de la whammy à tout va, autre rareté dans le milieu Hardcore. C’est une agréable surprise car le genre est généralement avare en la matière. Tom et Guy-Pierre ne figureront sans doute pas au panthéon des guitar-heros, mais ils font le job plutôt mieux que la moyenne dans leur catégorie. Le tandem basse/batterie assure également, alternant les tempos, usant du half-time à bon escient afin de masser consciencieusement les cervicales, et proposant la panoplie complète (salade-tomate-oignons) de la bonne section rythmique de Thrashcore. Sans être foncièrement originaux, les aptitudes des musiciens sont à souligner, et cela me laisse penser que les coquins en gardent sous le pied.

Mais le vrai plus, cela reste le frontman, Jean-Philippe de son état. Difficile de savoir si je suis influencé par l’image gardée de leur prestation live, mais on ressent réellement la rage du bonhomme et une sincérité dans l’engagement, sur chaque morceau ici proposé, un peu à la manière de Riley Gale (RIP). Croyez-moi, la comparaison n’est pas usurpée. Il suffit de jeter une oreille à "Blackened Sun" pour comprendre que je ne suis pas en train de vouloir faire vibrer la corde sensible ici. Alors la palette n’est pas large, mais ce n’est pas le sujet. Cela pourra rebuter certains, car sur la durée d’un album, le risque d’être saoulé par un chant mono-octave existe, mais ce n’est pas mon cas. Les refrains sont pour la plupart scandés, ce qui permet d’apporter un peu de variété aux voix.

À souligner également la qualité de la production de ce "Infinite Punishment". Tout y est parfaitement équilibré, les instruments trouvent tous leur place, et le son des guitares, notamment rythmiques, y est excellent, évitant le piège de la surcompression que l’on a tendance à trop souvent trouver ces derniers temps sur les disques de Metal ; hardcore, jusqu’au bout de la prod, mais soignés s’il vous plaît. C’est là aussi assez rare pour être relevé.

La formule a beau être un peu répétitive sur la durée, nos amis de GET THE SHOT auront la bienséance de ne pas forcer le trait, l’album étant d’une durée de quarante minutes. Du coup, on ne s’ennuie pas un instant, même si la recette a tendance à être répétée à l’envie. On notera ainsi moins de variété que sur l’excellent "Nightmare Logic" de POWERTRIP, qui savait mieux varier les plaisirs, mais l’ensemble constitue néanmoins d’autant plus un bon parpaing à se prendre dans la tronche.

Et contre toute attente, au lieu de nous asséner le coup de tatane final, le groupe conclut son LP avec un peu de pommade et un "Den Of Torments" un peu étrange, seul titre chanté plutôt qu’hurlé, très lent. On pourrait croire à une pseudo balade de l’ami Zakk, jusqu’à la série de growls finale. Si le titre n’est pas mauvais en soi, il fait un peu tâche, comparé à l’ensemble.

Note : 3,5/5, ramené à 4, parce que.

Meilleurs titres : "Faith Reaper", "Blackened Sun", "Hellbringer", "Eternal Decay".

PS : à noter que les gars de GET THE SHOT étaient sensés faire le warm-up Hellfest 2022 avant de jeter l'éponge, du fait des multiples accusations portées vis-à-vis de Rage Tour. On ne jugera pas ici leur décision, mais la cohérence de celle-ci par rapport à leur propos.